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Royaume-Uni

Brexit: la classe politique britannique dans tous ses états

Démission du Premier ministre David Cameron, leadership contesté au Labour, triomphe des europhobes du parti Ukip, le Brexit a provoqué ce vendredi un bouleversement sans précédent dans la vie politique britannique. Le Royaume-Uni entre dans une période de fortes turbulences pour les mois à venir. 

Dans le métro de Londres, le 12 mai 2014. Boris Johnson est alors maire de Londres et David Cameron Premier ministre. Les deux hommes sont conservateurs, mais le premier a milité pour la sortie, le second contre.
Dans le métro de Londres, le 12 mai 2014. Boris Johnson est alors maire de Londres et David Cameron Premier ministre. Les deux hommes sont conservateurs, mais le premier a milité pour la sortie, le second contre. REUTERS/Stefan Rousseau
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Triste fin de règne pour David Cameron, les conservateurs plus divisés que jamais

Le choix du peuple sera respecté, a déclaré le Premier ministre, le conservateur David Cameron, qui voulait rester dans l'Union. Il va bientôt démissionner pour laisser place à un autre chef du gouvernement qui engagera les négociations de sortie. Le Premier ministre conservateur est le grand perdant de ce référendum.

Royaume-Uni: David Cameron annonce sa démission après la victoire du Brexit

« On se souviendra maintenant principalement de David Cameron pour la manière dont son mandat s'est terminé », note Andrew Blick, maître de conférence au King's College de Londres. « David Cameron sait que son épitaphe politique sera "l'homme qui nous a sortis de l'UE" », abondait ce vendredi le journal en ligne The Independent dans un éditorial.

C'est lui qui avait parié sur un référendum, il y a trois ans, dans l'espoir d'enrayer la montée des eurosceptiques au sein du parti conservateur. Une manoeuvre qui se retourne finalement contre lui, et qui va au contraire, selon certains observateurs, créer une crise profitable au parti antieuropéen Ukip.

« Le parti conservateur est divisé sur la question européenne au moins depuis le départ de Margaret Thatcher en 1990. Une partie du pari de David Cameron, c'était justement d'essayer de mettre fin à ce qui est une véritable guerre civile au sein du conservatisme britannique. Le moins que l'on puisse dire, c'est que le pari a échoué [...] Rien n'empêche Ukip de devenir un jour le premier parti au moins de la droite britannique »,  analyse Keith Dixon, professeur de civilisation britannique à l'université Lumière Lyon 2.

Le Labour fragilisé

Le Parti travailliste britannique, majoritairement pro-européen, se voit lui aussi divisé par l'issue du référendum : deux de ses membres ont déposé vendredi une motion de défiance contre leur chef de file, Jeremy Corbyn, en mettant en cause sa gestion de la campagne. Si cette motion est soutenue lors d'un vote à bulletin secret, elle pourrait provoquer une crise de succession au sein du Labour.

« Ça va être très compliqué pour M. Corbyn, qui va être accusé d'être entré tard dans la campagne », remarque Iain Begg analyste à la London Schools of Economics, en estimant que les « couteaux vont être de sortie » chez les travaillistes. L'expert évoque même un possible « coup d'Etat interne ». La motion de défiance semble lui donner raison.

Au-delà du cas de son chef, c'est un vrai désaveu pour le Labour qui se présente comme le parti naturel de cet électorat fragilisé par la crise économique et qui avait appelé à voter pour le maintien dans l'union. Philippe Marlière, professeur de sciences politiques à l'University college London, avance une explication à cette défaite politique.

Les électeurs ont été attirés par le discours Brexit, mais qui n'était pas de gauche. C'était un Brexit de droite, économiquement ultralibéral, avec des relents, une tonalité assez xénophobe. Cela explique que la sortie de la Grande-Bretagne, telle qu'elle se fait là, ne va pas améliorer le sort de la classe ouvrière, bien au contraire.

01:02

Philippe Marlière: «L'échec idéologique du Labour»

■ « Pas de plan B »

Pour Tony Travers, de la London School of Economics, le gouvernement n’a aucun plan et travaille maintenant d’arrache-pied pour reprendre le contrôle de la situation.

« L’élite politique de ce pays en particulier les membres du gouvernement et les agents des ministères réfléchissent aux moyens de faire au mieux pour la suite. C'est un véritable défi. Le système politique britannique a parfois connu des moments difficiles, mais jamais rien de tel. Je pense qu’ils n’y étaient simplement pas préparés. Il était déjà très tard quand ils se sont mis à réfléchir à d'éventuelles solutions si cela se passait. Et cela s'est passé. Il n'y a pas de plan B, à ma connaissance. Ce sont des gens rationnels donc ils ont laissé de côté cette éventualité. C'était tellement démesuré. Maintenant c’est arrivé et il leur faut un plan », explique le spécialiste.

■ Le grand paradoxe de Ukip

Quand on regarde les résultats de différentes élections aux institutions nationales du Royaume-Uni, le soutien des électeurs britanniques au parti eurosceptique Ukip semble très limité. En revanche, une forte représentation de Ukip siège au Parlement européen, mais elle devra le quitter bientôt. Comment cette formation va-t-elle gérer sur la scène politique nationale l’énorme succès politique que constitue pour elle la sortie des Britanniques de l’Union européenne ?

Ukip ne dispose que d’un seul député au Parlement national, et de 24 députés au Parlement européen. C’est le paradoxe de ce parti : il est politiquement mieux représenté au niveau des institutions européennes qu’il combat, qu’au Royaume-Uni, où il est arrivé troisième aux dernières législatives, mais avec un seul député élu.

Il n’est donc pas étonnant qu’une fois les résultats du référendum connus, Nigel Farage est revenu avec fracas sur la scène politique intérieure. Il a réclamé « un gouvernement Brexit », pour mieux refléter les rapports de forces politiques du pays.

Toutefois, la tâche s’annonce difficile. Certes, David Cameron s’apprête à quitter le pouvoir, mais le poste de Premier ministre risque d’être confié à une grande figure eurosceptique de la campagne référendaire, Boris Johnson, ancien maire conservateur de Londres. Ce qui pourrait priver Nigel Farage de son fonds de commerce politique et l’inciter à essayer de provoquer des élections anticipées avant le congrès des conservateurs en octobre.

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Stéphane Lagarde

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