Michel Onfray renonce à publier «Penser l’islam» en France

« Penser l'islam », essai critique de Michel Onfray, devait sortir en France début 2016 chez Grasset. L'éditeur annonce que le philosophe français a renoncé à faire paraître le livre dans son pays.

Michel Onfray face à une nouvelle polémique après avoir tenté d'expliquer les raisons des attentats de Paris. AFP PHOTO/CHARLY TRIBALLEAU

Avec AFP

« Le débat en France n’est plus possible », juge-t-il. Penser l'islam paraîtra donc début 2016 à l'étranger, mais pas en France. Présenté comme un livre d'entretien avec la journaliste algérienne Asma Kouar, il s’agit d’un essai critique sur l'islam. « Michel Onfray a lu le Coran de très près, expliquait le mois dernier son éditeur, et il ne craint pas d'y percevoir comme dans les autres monothéismes de fréquentes apologies de la violence et de la guerre ».

Mais les tueries du 13 novembre qui ont fait 130 morts à Paris ont changé la donne. « Droite et gauche qui ont internationalement semé la guerre contre l'islam politique récoltent nationalement la guerre de l'islam politique », a réagi dès le lendemain Michel Onfray sur Twitter. Des propos à contre-courant de l'opinion publique française largement favorable à la guerre menée contre le groupe Etat islamique et que ce dernier a repris dans une vidéo de propagande.

Droite et gauche qui ont internationalement semé la guerre contre l'islam politique récoltent nationalement la guerre de l'islam politique.

— Michel ONFRAY (@michelonfray) 14 Novembre 2015

Le fondateur de l’Université populaire de Caen a justifié son propos en expliquant dans une interview à l’hebdomadaire Le Point que « le travail du philosophe est de mettre en perspective ce qui est avec les conditions qui ont rendu possible ce qui advient. » « Ce qui a eu lieu le 13 novembre est certes un acte de guerre, mais il répond à d'autres actes de guerre dont le moment initial est la décision de détruire l'Irak de Saddam Hussein par le clan Bush et ses alliés il y a un quart de siècle », développe-t-il.

Sa position a rapidement provoqué une levée de boucliers. Dans les colonnes de son journal, le directeur de publication de Libération Laurent Joffrin a ainsi dénoncé des « erreurs factuelles » et une « légèreté intellectuelle ». « Par quel sophisme, Michel Onfray en vient-il à présenter Daech (EI) comme la victime des ses victimes », s’est interrogé sur Twitter le philosophe Raphaël Enthoven, tandis que l'historien et journaliste Benoît Raisky dénonçait : « Michel Onfray est l’homme qui crache sur les morts de Paris. »

Par quel sophisme #MichelOnfray en vient-il à présenter #Daech comme la victime de ses victimes ? https://t.co/ck2r1x8ZFN

— Raphaël Enthoven (@Enthoven_R) 23 Novembre 2015

Se revendiquant « philosophe libertaire », l'intéressé se défend : « Tacher de comprendre le FN ou le terrorisme quand on est philosophe ça n'est nullement justifier et légitimer ce qu'on analyse mais le penser », répète-t-il sur Twitter. Car Michel Onfray n’en est pas à sa première polémique. En septembre dernier, le philosophe était accusé de faire le jeu du Front national suite à une interview accordée au Figaro que Laurent Joffrin, déjà, avait voulu démonter point par point.

Cette dernière polémique semble donc être celle de trop pour Michel Onfray. En plus de ne pas publier son essai en France, il dit vouloir fermer son compte Twitter. « J’en ai assez que mes tweets soient plus importants que mes livres », a-t-il ainsi confié au Point. « Commenter les commentaires, ça ne m'intéresse pas. »