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Elon Musk lance la bagarre des IA en promettant une intelligence artificielle en accès libre

Un dilemme réside en intelligence artificielle : les progrès dans le domaine sont-ils la propriété des entreprises ou doivent-ils être partagés à la communauté de chercheurs ? En annonçant déployer en « open source » son « chatbot » conversationnel baptisé Grok, Elon Musk a non seulement relancé le débat, mais aussi taclé la société Open AI -créatrice de chat GPT- devenue une entreprise à but lucratif, au grand dam du milliardaire. Les motivations du patron de X sont-elles louables et un juste équilibre peut-il exister dans le monde de l'IA ?

Dans le secteur de l'intelligence artificielle, «l'open source» ne coule pas vraiment de source.
Dans le secteur de l'intelligence artificielle, «l'open source» ne coule pas vraiment de source. REUTERS - Dado Ruvic
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Elon Musk a annoncé lundi que sa start-up xAI allait mettre en accès libre -open source- le programme informatique sur lequel est basée son interface d'intelligence artificielle générative Grok. Le patron de Tesla, SpaceX et X (ex-Twitter), demeure cohérent avec sa plainte déposée la semaine dernière contre la société Open AI dont il est un des cofondateurs. Il avait alors accusé Sam Altman d'avoir « trahi » la mission initiale d’OpenAI qui, à l’origine à but non lucratif, devait œuvrer pour le bien de l'humanité et concevoir des programmes open source, c’est à dire accessibles, modifiables, utilisables et redistribuables par tous. C’est un débat qui fait rage chez les fabricants d’intelligence artificielle, domaine à la fois prometteur et inquiétant. Le choix de l’open source serait-il à la fois un gage de transparence, de confiance et d'efficacité ? Rien n’est moins certain.

Arthur Mensch cofondateur de Mistral, fleuron français en IA le précise dans un entretien au quotidien Le Monde : « Nous avons commencé par des modèles open source, que tout le monde peut déployer gratuitement, car c'est une manière de les diffuser largement et de créer de la demande » [...] « Mais nous avons, dès le début, prévu un modèle économique avec des modèles optimisés » plus puissants. Il réfute toutefois l'idée d'un abandon de l'open source malgré le lancement d'une offre payante. « L'activité commerciale nous permettra de financer la recherche coûteuse nécessaire au développement de modèles » et « nous continuerons d'avoir deux gammes. » Selon Audrey Herblin-Stoop, directrice des affaires publiques de la société française Mistral AI, « il faut qu'on soit transparent et qu'on permette d'ouvrir le capot de cette technologie révolutionnaire » qu'est l'intelligence artificielle générative et « c'est l'open source qui permet ça. »

« Voyant les avancées d'OpenAI, Musk veut désormais ce succès pour lui-même »

Les enjeux d’ouvrir ce capot de l’IA pour en exhiber le moteur sont techniques, éthiques et économiques et les implications mondiales. Certains acteurs de l'IA demeurent réticents à partager leurs avancées, notamment par crainte de perdre leur avantage concurrentiel. Elon Musk reproche ainsi à Open AI une logique devenue commerciale - Microsoft y a investi quelque 13 milliards de dollars et les deux entreprises proposent des services d'IA pour les développeurs et les particuliers, et rivalisent dans le domaine avec Google et les autres géants de la Tech.

Non sans ironie, OpenAI a répondu aux griefs de Musk : « Voyant les avancées technologiques remarquables accomplies par OpenAI, Musk veut désormais ce succès pour lui-même. » Puis : « Musk proclame mener ces poursuites au nom de l'humanité alors que la vérité est (...) qu'il les mène pour promouvoir ses propres intérêts commerciaux. » E-mails à l'appui, ils ont montré que le milliardaire ne s'était pas opposé à l'idée de transformer OpenAI afin de mener à bien sa mission de construire l'IA générale dans l'intérêt commun. En 2017, « nous avons tous compris que nous allions avoir besoin de beaucoup plus de capitaux pour réussir notre mission - des milliards de dollars par an, ce qui était bien plus que ce qu'aucun d'entre nous, en particulier Elon, pensait pouvoir lever en tant qu'organisation à but non lucratif », explique Open AI.

À lire aussiVisite chez les Français Hugging Face où le code source peut être relu et amélioré par tout le monde (on dit alors qu’il est en open source)

L’open source en IA ne coule pas forcément... de source et n’est pas exempte de reproches, voire d’inquiétudes. Ainsi, il peut être plus difficile de maintenir la sécurité et la confidentialité des données, tout comme de contrôler l'utilisation et la distribution des modèles d'IA. Les deux raisons pouvant être de dangereuses sources d’abus et d’utilisations malveillantes. Les détails de la future ouverture du capot chez Grok ne sont d'ailleurs pas encore clairement définis. À quel niveau de la source pourront s’abreuver les chercheurs ? Les entreprises privées protègeront toujours leurs recherches et leurs propriétés intellectuelles, en raison de stratégies commerciales ou de considérations de confidentialité et de sécurité. Ainsi, algorithmes propriétaires, données, modèles pré-entraînés, logiciels, plateformes de services cloud peuvent demeurer propriétés des créateurs.

De nombreux aspects de l'intelligence artificielle (IA) sont traditionnellement en open source pour améliorer les performances du machine learning et deep learning notamment. On parle de bibliothèques de développement, frameworks, jeux de données, modèles pré-entraînés, outils de visualisation… Si en informatique on utilise pour expliquer le fonctionnement d'un ordinateur l’analogie du bureau, fichier et dossiers, alors pour expliquer la capacité d'apprentissage en IA on doit parler de bibliothèques. Cet accès à une bonne bibliothèque, une bibliothèque universelle ferait toute la différence. Mais qui en possède les clés, qui peut y entrer et y faire du rangement avant d'en extraire le savoir ?


► GLOSSAIRE

Grok, kézako ? Le nom du chatbot Grok provient du roman En terre étrangère publié en 1961 par l'écrivain de science-fiction Robert A. Heinlein. Dans le contexte du roman, « grok » signifie boire et plus largement, « comprendre profondément et intuitivement ». Le terme s’est répandu dans la culture informatique pour décrire la compréhension approfondie d'un sujet ou d'un système.

Chatbot, kézako ? C'est un programme informatique qui simule et traite une conversation humaine (écrite ou parlée), permettant aux humains d’interagir avec des terminaux digitaux comme s’ils communiquaient avec une personne réelle.

Open Source, kézako ? Un logiciel Open Source est un logiciel dont le code informatique est accessible au public, permettant à tout un chacun de voir, modifier, améliorer et distribuer ce code.

Machine learning, kézako ?  C'est une forme d’intelligence artificielle (IA) qui repose sur la création de systèmes qui apprennent et améliorent leurs performances, en fonction des données qu’ils sont amenés à traiter. 

Deep learning, kézako ? C'est une partie du machine learning (ML), dans laquelle des algorithmes conçus pour fonctionner comme le cerveau humain, apprennent à partir d'immenses quantités de données.

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