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Indonésie / Justice / Corruption

Indonésie: le président du Parlement inculpé dans un vaste scandale de corruption

Setya Novanto, le n°3 de l’Etat indonésien, est mis en cause dans une affaire de corruption impliquant de nombreux hommes politiques. En six ans, 150 millions d’euros auraient ainsi été détournés des caisses publiques.

Setya Novanto à son arrivée au siège de la KPK, à Jakarta (Indonésie) le 14 juillet 2017.
Setya Novanto à son arrivée au siège de la KPK, à Jakarta (Indonésie) le 14 juillet 2017. Antara Foto/Hafidz Mubarak via Reuters
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384 millions d’euros étaient destinés au nouveau système de cartes d’identité électroniques en Indonésie. Entre 2009 et 2015, 150 millions, près d’un tiers du budget total, se sont volatilisés. Selon la Commission pour l'éradication de la corruption (KPK), ils auraient été détournés des caisses de l’Etat vers les poches de nombreux hommes politiques, notamment des ex-ministres et gouverneurs. Parmi les bénéficiaires de ces pots-de-vin, le Jakarta Post mentionne deux hauts fonctionnaires du ministère de l’Intérieur, un membre de la Chambre des représentants et un homme d’affaires, mais aussi Setya Novanto en personne, le président du Parlement indonésien.

Ce dernier est soupçonné d'avoir « abusé de son autorité et de sa position pour enrichissement personnel ou pour l'intérêt d'une société », a déclaré le président de la KPK, Agus Rahardjo, lors d'une conférence de presse lundi soir. Ce mardi matin, le mis en cause a réfuté ces accusations, qu’il a qualifiées de « toutes fausses ».

Setya Novanto déjà mis en cause dans une affaire similaire en 2015

Ce n’est pas la première fois que Setya Novanto, également président du parti Golkar, membre de la coalition au pouvoir, est mis en cause dans un scandale de corruption. En 2015, il était soupçonné d'avoir extorqué une participation dans la multinationale américaine Freeport-McMoRan, qui exploite la mine de Grasberg, l'une des plus grandes mines d'or et de cuivre à ciel ouvert au monde, en Papouasie. L’enregistrement d’une rencontre informelle entre Setya Novanto et le magnat du pétrole Riza Chalid avait fuité. On y entendait les deux hommes tenter de négocier 3,5 milliards de dollars, une participation de 20% dans les mines de Freeport et une centrale hydroélectrique.

Face à la polémique, Setya Novanto avait démissionné de la présidence du Parlement, tout en conservant le siège de député qu’il occupait depuis 2009. Mis hors de cause, il était redevenu président du Parlement en 2016.

La KPK, un organisme indépendant pour lutter contre la corruption

Le président indonésien Joko Widodo a, depuis son élection en 2014, fait de la lutte contre la corruption l’un de ses principaux chevaux de bataille. La KPK lutte sur le même front : cet organisme indépendant, fondé en 2002, a le pouvoir de mener des enquêtes et des poursuites dans les affaires de corruption. Et ses faits d’armes sont nombreux.

En 2014, la KPK a notamment arrêté Annas Maamun, le gouverneur de la province de Riau, pour s’être fait offrir 130 000 euros par un marchand d’huile de palme en échange d’un permis d’exploitation de forêt tropicale. Face à la pratique endémique des pots-de-vin en Indonésie, la commission a également lancé des applis éducatives destinées à informer le public et les fonctionnaires. GRATis propose par exemple à l'utilisateur d’attraper des employés corrompus, d’éviter des pots-de-vin tombés du ciel ou d’incarner un fonctionnaire soudoyé par un marchand d’ordinateurs véreux. Dans AntiKorupsi, on se glisse dans la peau du gouverneur de Semarang, Hendrar Prihadi, lors d’une course d’obstacles où il doit esquiver des sacs d’argent.

L'application AntiKorupsi vous propose d'incarner le gouverneur de Semarang dans une course d'obstacles où il doit esquiver les sacs d'argent.
L'application AntiKorupsi vous propose d'incarner le gouverneur de Semarang dans une course d'obstacles où il doit esquiver les sacs d'argent. Captures d'écran

Ces opérations de sensibilisation ne sont que la pointe émergée de l’iceberg : l’essentiel des actions du KPK vise à arrêter des poids lourds de la corruption. Interviewé en 2014 par The Diplomat (article en anglais), son porte-parole Johan Budi distingue « deux types de corruption : la corruption de besoin, commise par des fonctionnaires rémunérés au minimum légal, et la corruption de cupidité. Nous traquons la cupidité. »

Un combat difficile et dangereux

L’Indonésie est encore loin d’avoir atteint les objectifs de la KPK. Dans son dernier classement, l'ONG Transparency International la place au 90e rang des pays les plus corrompus, sur 176 nations. En avril dernier, un enquêteur anti-corruption qui travaillait sur l’affaire impliquant Setya Novanto a été attaqué à Jakarta : deux assaillants à motocyclette lui ont jeté de l’acide au visage.

Busyro Muqoddas, un ancien chef du KPK, explique alors : « Il y a régulièrement des intimidations contre les enquêteurs anti-corruption. Le véhicule de l'un d'entre eux a par exemple aussi été attaqué à l'acide et des oeufs pourris ont été jetés sur sa maison. Un autre a été renversé par une voiture juste à côté du bureau de la commission et il a eu la jambe cassée. » Pour l’enquêteur brûlé à l’acide, il s’agissait de la 5e attaque qu'il subissait.

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