«Atteindre le niveau» de Bolt, Letsile Tebogo et la nouvelle vague de sprinteurs africains

Letsile Tebogo a raflé l'argent sur la finale du 100m aux Mondiaux d'athlétisme de Budapest dimanche 20 août. la première médaille mondiale africaine dans la discipline, peut-être le début d'une nouvelle ère pour le sprint sur le continent. 

Letsile Tebogo a décroché la première médaille africaine sur 100m dans un Championnat du monde à Budapest le 20 août 2023. REUTERS - SARAH MEYSSONNIER

Une existence entière d'attente pour l'athlétisme africain, à laquelle un gamin de 20 ans a mis fin dimanche à Budapest. Le Botswanais Letsile Tebogo, en décrochant l'argent sur le 100m aux Mondiaux, a rapporté sa première breloque mondiale à l'Afrique sur l'épreuve reine de l'athlétisme. 9 secondes et 88 centièmes, son nouveau record personnel, pour écrire l'histoire de son continent et se positionner juste derrière Noah Lyles (9''83).

WHAT. A. 100M PODIUM.

🥇 @LylesNoah 9.83 WL
🥈 @LetsileTebogo2 9.88 NR
🥉 @zharnel_hughes 9.88

0.004 separates the silver medal from fourth place.#WorldAthleticsChamps pic.twitter.com/hDbZxcvRo2

— World Athletics (@WorldAthletics) August 20, 2023

Un accomplissement de taille. Assez marquant pour qu'à son annonce en conférence de presse, il soit salué par des applaudissements venant notamment de Lyles, et du troisième sprinter monté sur le podium, le Britannique Zharnel Hughes. Et surtout une confirmation. Car voilà quelques années que la pépite botswanaise, lorsqu'elle court sa ligne droite, tire avec elle pas mal d'espoirs depuis ses titres de double champion du monde juniors du 100 m et double vice-champion du monde juniors du 200 m en 2021 et en 2022.

L'année dernière, quand il avait encore 18 ans, qu'il est devenu seulement le deuxième coureur de l'histoire à casser la barrière des dix secondes sur 100 m avant l'âge de vingt ans. Quelques mois plus tard, il passait sous les 20 secondes sur 200 m. 

CHAMPIONSHIP RECORD 🙌🏾

Picture Credit: @WorldAthletics pic.twitter.com/HAcJFUBodF

— Letsile Tebogo (@LetsileTebogo2) August 3, 2022

Omanyala dans son ombre

Tebogo n'était pas le seul Africain à prendre le départ du 100m dimanche sur les rives du Danube. A ses côtés, Ferdinand Omanyala, détenteur du record d'Afrique (9''77), qui a terminé septième en 10''07. Loin de sa meilleure marque, réalisée en altitude à Nairobi en 2021, le Kenyan détenait tout de même la deuxième meilleure performance mondiale de l'année avant la course. 

Le Sud-africain Akani Simbine (29 ans), auteur d'un faux départ en demi-finale, a quant à lui déjà figuré sur les grilles de départ de nombreuses finales internationales, sans jamais toucher le gros lot: 5e aux Jeux de Rio en 2016, 4e à ceux de Tokyo cinq ans plus tard, 4e aux Mondiaux de Doha en 2019 et 5e l'an passé à Eugene.

Sans compter les cinq autres athlètes issus du continent qui étaient présents sur les demi-finales. Des performances qui ne passent pas inaperçues, le sprint africain a déjà eu de très bon chronos, ce qui lui a manqué, ce sont des athlètes prêts le jour J. 

C'est l'heure pour l'Afrique de prendre les commandes du sprint

Pour autant, la médaille d'argent mondiale de Tebogo a dépassé ses propres espérances. « C'est vraiment une grande fierté de gagner cette médaille d'argent. C'est du bonus pour moi. Ce n'était pas le plan, l'objectif, c'était seulement la finale », a avoué le vice-champion du monde. À titre de comparaison, l'année de ses 21 ans, Usain Bolt ne savait pas encore ce que c'était de courir le 100 m en moins de 10 secondes.

Avant de venir à l'athlétisme, auquel il ne s'est mis sérieusement qu'autour de « 2018-2019, quand j'ai réalisé que je pouvais devenir professionnel », Tebogo, élevé par une mère célibataire avec son frère cadet, jouait au football, « ailier en raison de ma vitesse ». Mais lui qui a écrit une page de l'histoire sportive de son continent a finalement préféré la pratique d'un sport individuel.

« Je pense qu'après cette médaille, le continent et le pays vont réfléchir à organiser davantage de courses, et des grosses courses que les gens veulent voir », espère Tebogo, qui partage son entraînement entre Gaborone, la capitale du Botswana, l'Afrique du Sud et l'Europe au fil de l'année. « C'est l'heure pour l'Afrique de prendre les commandes du sprint sur la scène internationale », osait-il début 2022 auprès du site spécialisé Runblogrun. Lui qui va « essayer d'atteindre le niveau » de Bolt a fait le premier pas.