Autriche: les costumes traditionnels sont plus en vogue que jamais

Héritiers d’une longue histoire, parfois tourmentée, les costumes traditionnels sont aujourd’hui largement portés en Autriche, y compris par des jeunes. Comment expliquer ce succès ?

Vente de costumes traditionnels dans un magasin de Bad Ischl, en Autriche. © AFP / Alex Halada

De notre correspondante à Vienne,

En ce premier week-end de mai, le petit village de Zell Am Ziller, situé dans le Tyrol, accueille le Gauder Fest, le plus grand festival de costumes traditionnels d’Autriche, des costumes que l'on désigne ici sous le nom de Tracht et dont le Dirndl, une robe alpine pour les femmes et le Lederhosen, une culotte de peau pour les hommes sont aujourd’hui l’incarnation.

Des dizaines de milliers d’Autrichiens se retrouvent à cette occasion, en costume traditionnel. Parmi eux, de nombreux jeunes, à l’instar de Georg et son amie Valentina. « Cela est lié à notre patrie. Porter un costume nous donne un sentiment d’appartenance et nous rend fier. Et puis, c’est aussi moderne », insiste Georg. « Comme vous pouvez le voir, les costumes sont également différents les uns des autres. On les porte dès qu’il y a une occasion festive », indique Valentina.

Le Tracht a une longue histoire derrière lui. À l’origine, ce type de costume était lié au monde paysan et s’est peu à peu étendu à d’autres milieux. Son histoire a presque toujours été politique, selon la folkloriste Elsbeth Wallnöfer, qui affirme que le Tracht joua notamment un rôle essentiel sous le national-socialisme.

« Lorsque la politisation de la société a évolué de plus en plus vers un système antijuif et raciste, le costume traditionnel est devenu uniquement un outil politique. Les nationaux-socialistes ont voulu faire de la politique avec, car ils savaient qu’en s’intéressant aux costumes traditionnels, ils seraient en phase avec la population. »

Porter un vêtement sans arrière-pensée politique

Si Dirndl et Lederhosen sont aujourd’hui revendiqués par les milieux conservateurs, extrême droite en tête, de très nombreux Autrichiens les portent sans aucune arrière-pensée politique. Il faut dire qu’ils sont devenus, ces dernières années, de véritables objets de mode. Lena Hoschek, une jeune créatrice autrichienne, au succès fulgurant, affirme ainsi créer des Dirndl apolitiques, en phase avec la société d’aujourd’hui.

« Reconnaître ce qui s’est passé durant la Seconde Guerre mondiale a été quelque chose de très important pour les Autrichiens et les Allemands, et c'est pourquoi nous faisons partie des nationalités qui sont très prudentes lorsqu'il s'agit d'exprimer une fierté nationale », souligne la créatrice de mode. « Mais on peut très bien, en tant qu'Autrichien ou Allemand, assumer ses origines, non pas de manière exclusive, mais de manière inclusive. Pour moi, ce qui fait un Dirndl classique, c'est le travail manuel, la coupe et la finition, mais j’utilise, par exemple, des tissus roses d'Angleterre ou des tissus de Provence. C'est ma nouvelle interprétation du Dirndl et en utilisant des tissus très différents, qui n'ont rien à voir avec l'Autriche, je l'ai probablement un peu dépoussiéré. »

Il existe aujourd’hui pléthore de boutiques vendant Dirndl et Lederhosen en Autriche, la qualité et le prix varient selon les enseignes, d’une cinquantaine à plus de 500 euros.