Emmanuel Macron a-t-il les moyens de ses ambitions en Europe?

Les ambitions du président français Emmanuel Macron en Europe alors que la France s’apprête à prendre la présidence de l’Union européenne le 1er janvier prochain 2022. Emmanuel Macron a-t-il les moyens de ses ambitions ?

Le français Naval Group avait été sélectionné en 2016 par Canberra pour fournir douze sous-marins à propulsion conventionnelle (non nucléaire), dérivés des futurs sous-marins nucléaires français Barracuda (ici en photo, en octobre 2020). © Naval Group / AFP

La réponse est en partie non. Emmanuel Macron a toujours eu une vision ambitieuse et volontariste de l’Union européenne. Il plaide pour une plus grande solidarité financière entre ses membres et surtout pour une autonomie stratégique renforcée, en développant une Europe de la Défense.

Il estime que la période actuelle est favorable pour faire avancer les thèses françaises. A priori en effet, les planètes semblent bien alignées : la décision du Royaume-Uni de faire le Brexit et le départ d’Angela Merkel en Allemagne font que la France se retrouve de facto en position de force sur la scène européenne.

Alors que Paris va présider aux destinées de l’UE le 1^er janvier prochain, Emmanuel Macron se verrait bien en leader du Vieux Continent. Et d’un mal sortant parfois un bien, la récente crise des sous-marins avec l’Australie et les États-Unis a souligné à quel point les Européens devaient plus compter sur eux-mêmes, et se montrer davantage solidaires les uns vis-à-vis des autres.

Sur ce dernier point d’ailleurs, la crise des sous-marins a permis un léger progrès. Bruxelles a certes attendu 5 jours pour réagir face à la très mauvaise manière faite par Washington à Paris, mais a fini par réagir par la voix de la Commission européenne. C’est positif, mais clairement, peut mieux faire.

Sur le premier point, le constat d’Emmanuel Macron semble plutôt pertinent : les Européens doivent renforcer leur autonomie tout simplement parce que les États-Unis se comportent désormais davantage en alliés qu’en amis. Et que la protection des Européens, à travers l’Otan notamment, est moins une priorité aujourd’hui. Cela fait plus de dix ans que la priorité pour les Américains se situe dans la zone Indo-Pacifique et que leur nouveau challenger ce n’est plus la défunte URSS, mais la Chine, qui entend tout simplement leur ravir la place de première puissance mondiale.

La crise des sous-marins comme un révélateur

Alors ? Les Européens, des alliés oui, mais seulement des alliés en quelque sorte. Et, lorsque c’est nécessaire, Washington fait passer ses intérêts propres avant ceux de ses alliés. Comme disait le Général de Gaulle : en politique, il n’y a pas d’amis, il n’y a que des intérêts.

Et c’est bien ce qu’a révélé l’affaire des sous-marins. Les Américains ont estimé que le fait de tenir la France à l’écart du nouveau contrat n’était finalement pas si grave. En partie parce qu’ils savent que ce pays européen reste très dépendant du grand frère américain.

Et c’est cela que veut changer Emmanuel Macron. Le problème, c’est que beaucoup de pays membres de l’UE ne partagent pas cette vision, qu’ils estiment irréaliste, et préfèrent rester sous le parapluie américain. Mais, avec le départ de Londres, les plus réticents, notamment en Europe centrale et orientale, ont perdu l’allié qui disait souvent non à Paris. Il y a aussi une prise de conscience de l’éloignement des États-Unis.

De ce point de vue, le président français bénéficie d’une fenêtre d’opportunité. À lui de convaincre ses partenaires sur le renforcement nécessaire de l’autonomie stratégique européenne sans que cela paraisse comme une volonté d’imposer les vues françaises au Vieux Continent. La tâche ne sera pas aisée.