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Comment le régime iranien a utilisé les réseaux pour diffuser des infox lors du raid sur Israël

Samedi 13 avril, les chaînes publiques iraniennes ont diffusé des images laissant penser qu’Israël avait été touché de plein fouet par les raids des missiles et de drones iraniens. 99% des projectiles iraniens auraient été interceptés, selon l’armée israélienne. Toutefois, les médias affiliés au régime iranien ont utilisé des images sorties de leur contexte pour amplifier les résultats de l’opération et satisfaire l'opinion.

Publié le :

5 mn
Des images d'un incendie au Chili ont été détournées par le régime iranien.
Des images d'un incendie au Chili ont été détournées par le régime iranien. © Captures d'écran/ Montage RFI
Par : Olivier Fourt Suivre | Grégory Genevrier Suivre
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Dans un pays où le paysage audiovisuel est très encadré, la diffusion de la propagande du régime iranien a pris une part centrale dans l’opération militaire lancée par l’Iran dans la nuit du 13 au 14 avril. Quarante-huit heures après le lancement des missiles, aucun dégât significatif n’a été rapporté. Le porte-parole de l’armée a indiqué que la base aérienne de Nevatim, dans le Néguev, avait été « légèrement touchée » par des missiles balistiques iraniens. L’armée israélienne a publié une vidéo montrant quelques cratères et des engins de chantier en train de réparer ce qui semble être un taxiway.

À l’heure où nous publions ces lignes, il est impossible d’évaluer avec précision et de manière indépendante les dégâts survenus sur la base aérienne de Nevatim abritant les chasseurs F-35 récemment achetés aux États-Unis par l’armée israélienne. Des appareils employés dans le raid contre le consulat iranien à Damas début avril.

Les missiles iraniens n'auraient pas fait de gros dégâts à en croire une source officielle américaine.

Côté iranien, le chef des forces armées iraniennes, le général Mohammad Bagheri, s’est toutefois félicité que l’attaque ait « atteint tous ses objectifs », notamment en mettant « hors service un centre de renseignement et une base aérienne ». Il a précisé qu’aucun centre urbain ou économique n’avait été visé par les drones et missiles iraniens

Ce compte X attribué à un journaliste turc reprend la déclaration du Général iranien Bagheri le soir des frappes

Emballement médiatique  ? 

Reste que dans les minutes et les heures qui ont suivi l’annonce du raid iranien, la chaîne d’État iranienne IRINN a diffusé des images laissant penser qu’un déluge de feu s’est abattu sur Israël. Une image a particulièrement retenu notre attention : celle d’un horizon en flammes et d’explosions au loin, alors qu’au premier plan, se détache une ligne d’arbres. L’image porte le logo de la chaîne publique Islamic Republic of Iran News Network. Cette chaîne d’information en continu dépendant du régime émet en farsi (persan) et dispose d’une section en langue arabe. Elle peut être captée en Europe par satellite. Nous avons retrouvé l’extrait où un speaker commente en direct les frappes sur Israël. On l’écoute ici.

Il s’exprime en langue arabe : « Vous voyez à l’écran, des images que l’on trouve sur les réseaux sociaux (…) les images de missiles qui se sont abattus sur Israël. » Il ajoute : « Si les États-Unis ripostent, ou si d’autres pays leur viennent en aide contre l’Iran, ils le regretteront. » On peut entendre aussi la voix d’un invité qui assure que « cette riposte n’est pas seulement la réponse au bombardement du consulat iranien à Damas, mais la réponse à la demande des peuples palestiniens ».

Le message reprend donc la position politique du régime iranien à destination des pays arabes. Le journaliste prend soin d’affirmer que les images diffusées par ce média d’État proviennent des réseaux sociaux, mais ne dit pas qu’elles n’ont rien à voir avec Israël. Quoi qu’il en soit, elles viendront nourrir la propagande. Les internautes ont rapidement retrouvé l’origine des images : il ne s’agit pas des bombardements iraniens, mais du gigantesque incendie de Villa del Mar au Chili.

La chaîne franceinfo qui s'est également penchée sur la question affirme que le 14 avril : « La vidéo originelle, diffusée sur le réseau social TikTok, a vu son compteur exploser depuis l’attaque de l’Iran, jusqu’à atteindre 7,5 millions de vues dimanche après-midi. » Le 15, en fin de journée, cette vidéo était toujours inaccessible.

Ajoutons que sur les réseaux, beaucoup de commentaires ont évoqué tout d’abord des images de feux forêt au Texas en mars, avant que des corrections ne soient apportées, comme en témoigne ce post.

Cette vidéo montrant un incendie au Chili a été largement diffusée sur les réseaux, laissant penser à tort à des frappes iraniennes.
Cette vidéo montrant un incendie au Chili a été largement diffusée sur les réseaux, laissant penser à tort à des frappes iraniennes. © capture d'écran X

Recel et fabrication d’Infox

L’agence Mehr News Agency, autre organe du régime, dont la mission principale est de diffuser les idéaux de la révolution islamique iranienne, diffuse les mêmes images, visibles ici en titrant alors sur son site internet « un incendie massif dans la région du Néguev en Israël dû à des attaques de missiles iraniens ».

Cette affirmation est fausse et elle est volontairement ambigüe, car les images montrent bien un incendie, mais il n’est aucunement lié aux frappes iraniennes en Israël. D’ailleurs, en prêtant une oreille attentive à la bande son de la vidéo, on entend la voix de personnes s’exprimant… en espagnol, ce qui laisse peu de doutes sur la provenance réelle de la vidéo. Mehr News Agency a passé un partenariat avec l’agence russe Sputnik en 2018.

Ce compte X pointe le détournement de la même image sur une chaine des gardiens de la révolution.

Pour sa part, la journaliste Ghoncheh Habibiazad, travaillant pour la BBC, a repéré une autre vidéo, vue plus de 5 millions de fois et diffusée par les médias iraniens, laissant croire à un vent de panique le soir des frappes iraniennes en Israël. Ces images montraient en réalité un mouvement de foule à Buenos Aires, en Argentine.

D'autres vidéos ont été récupérées par la propagande iranienne et relayées sur certains comptes.

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