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France

France: le procès de la femme voilée de Trappes rouvre le débat sur le voile intégral

Un contrôle d'identité d'une femme intégralement voilée qui avait mal tourné. L'affaire avait déclenché trois nuits d'émeutes à Trappes, en banlieue parisienne, en juillet dernier. Elle est revenue mercredi 11 décembre devant la justice. La jeune femme concernée était jugée par le tribunal de Versailles pour outrage aux forces de l'ordre et port du voile intégral. Sa défense a voulu saisir l’occasion pour relancer le débat sur l’interdiction de dissimuler son visage.

En principe, la loi interdit à quiconque de dissimuler son visage dans l’espace public.
En principe, la loi interdit à quiconque de dissimuler son visage dans l’espace public. Reuters/Regis Duvignau
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Il y avait déjà eu une première audience en novembre au cours de laquelle Me Bataille, l’avocat de Cassandra Belin, avait annoncé qu’il voulait déposer une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) pour contester la validité de la loi interdisant le port du voile intégral. Le parquet avait alors demandé un report pour préparer son argumentaire contre cette requête. Et c’est donc sur cette QPC que s’est à nouveau ouvert le procès, mercredi.

La demande se heurte à un obstacle juridique majeur. Le Conseil constitutionnel a déjà été saisi en 2010 de cette loi et il l’a validée dans ses grandes lignes. Or, un même texte ne peut faire l’objet que d’une seule saisine des Sages, sauf s’il y a changement de situation. C’est ce que le parquet et l’avocat des parties civiles – les policiers qui ont procédé au contrôle d’identité – ont fait valoir.

QPC en délibéré

A l’inverse, pour Me Bataille, la mise en application de cette loi a entraîné ce changement de situation. L’avocat plaide que la portée discriminante du texte a alors été révélée : « Il vise uniquement les musulmans », argumente-t-il. En principe, la loi interdit à quiconque de dissimuler son visage dans l’espace public. Le texte concerne aussi bien le port d’un casque ou d’une cagoule que d’un voile intégral. « Mais dans les faits, seuls des musulmans ont été contrôlés », affirme Me Bataille. L’avocat estime aussi que deux principes fondamentaux en droit français sont absents de la décision du Conseil constitutionnel : la liberté d’aller et venir ainsi que le respect de la dignité. Or, dit-il, ces deux principes sont entravés par cette loi.

C’est à la présidente du tribunal qu’il revient de décider si la question sera transmise à la Cour de cassation, étape préalable avant le Conseil constitutionnel. Mais, revers pour la défense de Cassandra Belin : la magistrate ne voit pas d’urgence à transmettre cette QPC et entame l’examen du dossier. Elle rappelle les faits, ce contrôle d'identité de la jeune femme alors qu'elle se trouvait dans sa rue à Trappes avec son mari, son bébé et sa mère en juillet dernier. Intégralement voilée, elle est arrêtée par des policiers. Dans un premier temps, elle consent à leur montrer son visage mais une altercation éclate entre sa mère et l’un des policiers. La jeune femme aurait alors lancé des insultes, voire des menaces au policier. Ce qu'elle conteste. Son mari, lui, s'en serait pris physiquement à un des fonctionnaires. Lui aussi est en désaccord avec la version des forces de l’ordre mais a été condamné en première instance à trois mois de prison avec sursis.

Cassandra Belin absente

L’avocat de Cassandra Belin insiste alors sur la personnalité d’un des trois policiers ayant procédé au contrôle d’identité. L’homme a notamment posté sur son compte Facebook une photo dénigrant les femmes intégralement voilées. La défense le présente comme islamophobe et violent. Elle rappelle qu’une information judiciaire a été ouverte à son encontre par le procureur de Versailles. « Cette loi lui permet de faire ce qu’il veut », déplore Me Bataille.

Ayant anticipé cette ligne de défense, l’avocat des policiers a, lui, rappelé les états de service de son client : un homme travaillant à Trappes, une zone sensible, depuis dix ans et qui n’a jamais fait l’objet de mesures disciplinaires. Pour le parquet, le racisme ne peut être retenu non plus. « Mme Belin a reconnu qu’il n’y avait pas eu de propos offensants ». C’était lors de la procédure, avant le procès, car la jeune femme est absente à l’audience. « Il était difficile pour elle de retirer son voile intégral, c’est une fierté de le porter », a justifié son mari présent au tribunal. Le parquet a requis une amende de 500 euros pour l’outrage aux forces de l’ordre et 150 euros pour le port du niqab. Le jugement, et donc la décision sur la QPC, ont été mis en délibéré au 8 janvier.

→ A (RE)LIRE : L’interdiction du voile à l’université française: beaucoup de bruit pour rien

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