Accéder au contenu principal

Xi Jinping en France: ce qu’il faut retenir de la première journée de la visite d’État du président chinois

Xi Jinping a pu constater lundi 6 mai, au début de sa visite d'État en France, une nouvelle fermeté affichée par les Européens face aux tensions commerciales qui s'accumulent. Le président chinois a par ailleurs apporté de manière plus consensuelle son soutien à la « trêve olympique » défendue par Emmanuel Macron. Voici les principaux dossiers évoqués lors de la première journée de la visite d'État du président chinois en France.

Le président français Emmanuel Macron avec le président chinois Xi Jinping avant leur rencontre à l'Élysée. Paris, France, le 6 mai 2024.
Le président français Emmanuel Macron avec le président chinois Xi Jinping avant leur rencontre à l'Élysée. Paris, France, le 6 mai 2024. © Christophe Ena / AP
Publicité

Pour les 60 ans des relations diplomatiques bilatérales, le président chinois a été accueilli à Paris Emmanuel Macron qui espère toujours poser son pays en « puissance d'équilibre » face au bras de fer sino-américain. Accueil en fanfare aux Invalides, tapis rouge et banquet à l'Élysée : pour sa première tournée européenne depuis 2019, le numéro un de la superpuissance asiatique a eu droit à tous les égards.

• Échanges fermes entre Emmanuel Macron, Ursula von der Leyen et Xi Jinping sur le commerce

Xi Jinping et Emmanuel Macron, rejoints en début de journée par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, n'ont pas tenté de dissimuler les tensions qui s'accumulent sur le commerce. Emmanuel Macron a expliqué vouloir soulever « en toute amitié et confiance » les « préoccupations, pour essayer de les surmonter », appelant à des règles commerciales « équitables ».

L'Union européenne « n'hésitera pas à prendre des décisions fermes » pour « protéger son économie et sa sécurité », a souligné Ursula von der Leyen. Elle était présente pour afficher un front continental uni sur les questions commerciales, même si l'Allemagne est souvent accusée de faire cavalier seul pour préserver ses exportations de voitures vers la deuxième puissance économique mondiale.

La patronne de l'exécutif européen avait auparavant prévenu que l'Europe ne pouvait « pas accepter » le « commerce déloyal » causé par l'afflux de véhicules électriques ou d'acier chinois fabriqués grâce à des « subventions massives ».

« Le soi-disant "problème de la surcapacité de la Chinen'existe pas », leur a répondu sèchement Xi Jinping, estimant que « l'industrie chinoise des nouvelles énergies » permettait au contraire « d'accroître l'offre mondiale et d'atténuer la pression de l'inflation mondiale ».

Menacée d'être prise en tenailles entre les économies américaine et chinoise — massivement aidées par la puissance publique, l'Union européenne a multiplié ces derniers mois les enquêtes sur les subventions étatiques chinoises à plusieurs secteurs industriels, notamment aux véhicules électriques. À Pékin, les mesures européennes sont jugées « protectionnistes ». Les autorités chinoises ont lancé leur propre enquête anti-subventions visant essentiellement le cognac français.

Emmanuel Macron a d'ailleurs opportunément offert à son invité des bouteilles du spiritueux charentais, avant de se féliciter, devant la presse, du « souhait » chinois de ne pas imposer de taxes douanières « provisoires » dans l'immédiat. Plaidant pour « un cadre de concurrence loyale », il a assuré que la discussion avait permis de « clarifier » les désaccords « pour assainir la relation économique et lui donner un nouvel élan ». Chaque année, la France export 35 millions de bouteilles en Chine, soit un quart de sa production.

• Plusieurs contrats dans l'énergie, la finance et les transports

Plusieurs contrats commerciaux entre des entreprises françaises et chinoises ont été signés lundi. Parmi les annonces figure un contrat pour Suez afin de construire une usine destinée à produire de l'énergie à partir des boues d'une cinquantaine de stations d'épuration dans le sud de la Chine, pour près de 100 millions d'euros.

Le constructeur ferroviaire Alstom a aussi obtenu des contrats de fourniture de systèmes de traction électrique pour des lignes de métro à Pékin, Wuhan et Hefei.

Côté finance, l'assureur Groupama va créer une coentreprise avec Shudao Group « sur la finance verte ».

D'autres contrats commerciaux annoncés sont à des stades moins engageants, par exemple entre Schneider Electric et les points de recharge de véhicules électriques en vue de la création d'une coentreprise, ou entre le Crédit Agricole et Bank of China pour « faciliter leurs opérations conjointes ».

Plus tôt dans la journée, le ministre français de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, avait plaidé pour un « partenariat économique équilibré et solide » entre la France et la Chine, encore « loin » d'être atteint aujourd'hui au détriment de Paris, selon lui.

La France a accusé un déficit commercial d'environ 46 milliards d'euros avec la Chine en 2023, tandis que celui de l'Union européenne atteignait quelque 300 milliards d'euros.

• La guerre en Ukraine

Lors d'un tête-à-tête, qu'il rééditera mardi lors d'une escapade plus personnelle dans les Pyrénées, Emmanuel Macron a pu aborder plus en profondeur l'invasion russe de l'Ukraine. Après avoir appelé à une coordination « décisive » sur ce dossier sensible, Emmanuel Macron a salué « les engagements » chinois « à s'abstenir de vendre toute arme » à Moscou, et à « contrôler strictement l'exportation des biens à double usage » pouvant servir à des fins militaires.

Alors que Xi Jinping doit bientôt accueillir son homologue russe Vladimir Poutine, dont il reste le principal allié, le président français s'est réjoui d'un « moment de coordination » qui permettra d'« identifier les volontés ou non d'aller vers cette paix durable » que Paris et Pékin appellent de leurs vœux.

La France veut a minima s'assurer que la Chine, principale alliée de Moscou, ne bascule pas dans un soutien clair à son effort de guerre face à Kiev. Voire « l'encourager à utiliser les leviers » dont elle dispose sur Vladimir Poutine pour « contribuer à une résolution de ce conflit », selon l'Élysée, qui dit toutefois être « lucide » sur le fait qu'aucune percée n'est à attendre du jour au lendemain.

Le président chinois a défendu son « rôle positif » pour trouver une solution politique, et a appelé à ne pas « salir » la Chine à travers le dossier ukrainien. Xi Jinping a aussi plaidé pour que son pays et l'Union européenne renforcent leur « coordination stratégique » et demeurent « des partenaires ». La Chine et l'Union européenne doivent « adhérer au dialogue et à la coopération, approfondir la communication, renforcer la confiance mutuelle et construire un consensus stratégique, a assuré le chef de l'État chinois ce 6 mai. Le but est de « promouvoir le développement régulier et sain des relations Chine-Union européenne et apporter constamment de nouvelles contributions à la paix et au développement dans le monde », a-t-il ajouté.

À lire aussiVisite de Xi Jinping en France : la Chine espère un « moment de détente » avec l’Europe

• Sur la guerre à Gaza et l'Iran

« Nous partageons les mêmes préoccupations et les mêmes objectifs, à savoir parvenir à un cessez-le-feu immédiat pour libérer les otages, protéger les populations, faciliter la délivrance d’aide humanitaire, encourager une désescalade régionale et rouvrir une perspective politique », a assuré Emmanuel Macron.

« Il n’y a pas de double standard. Ni pour la Chine, ni pour la France, poursuit Emmanuel Macron. Cela vaut aussi pour l’Iran dont la fuite en avant nucléaire porte de nombreux risques. Notre souhait est de pleinement nous coordonner sur ce sujet. »

• Une « trêve olympique »

Xi Jinping a aussi appelé publiquement, de concert avec Emmanuel Macron, « à une trêve dans le monde entier à l'occasion des Jeux olympiques de Paris » du 26 juillet au 11 août.

Selon une source diplomatique française, cette trêve pourrait servir, s'agissant de l'Ukraine, à enclencher un processus plus politique, même si les exigences occidentales (retrait russe et respect de l'intégrité territoriale ukrainienne) restent inchangées. Xi Jinping continue d'afficher son soutien à la Russie, et se rendra après la France en Serbie et en Hongrie, deux pays restés proches de Moscou.

À lire aussiEn tournée européenne, Xi Jinping n’a pas choisi Paris, Belgrade et Budapest au hasard

• Visas facilités pour les Chinois en France et exemption de visas pour les Français en Chine 

La délivrance de visas de circulation pour les Chinois en voyage d'affaires, comme les visas de courts séjours à multiples entrées, sera « facilitée ». C'est ce qu'indique Matignon en amont d'un comité interministériel du tourisme autour du Premier ministre Gabriel Attal mardi.

Cette mesure permettra à ces personnes d'entrer et sortir du territoire français pour différents salons et rendez-vous d'affaires sans avoir à demander un visa à chaque entrée. Et, d'autre part, de « continuer à développer les partenariats avec des acteurs économiques locaux » (chambres de commerce, fédérations professionnelles, etc.), ont précisé les services du Premier ministre.

« Des instructions » ont été données au réseau consulaire afin qu'il accorde « un traitement prioritaire » à ce public et « des échanges sont en cours » avec le programme France-Visas, « afin de mieux identifier » ces demandes de visas. La saisie et le traitement des demandes de visas des groupes de touristes chinois sur la plateforme France-Visas seront également « facilités » à compter du premier semestre 2025.

Le président chinois Xi Jinping a annoncé à Paris la prolongation pour un an, jusqu'à fin 2025, de l'exemption de visa touristique court pour les Français désireux de se rendre dans le pays asiatique. Cette mesure permet de faire du tourisme en Chine sans visa en cas de séjour n'excédant pas 15 jours. Elle avait initialement été lancée l'an passé à titre « expérimental » pour la période du 1er décembre 2023 au 30 novembre 2024.

• Les droits humains

Sur la question sensible des droits humains, Emmanuel Macron avait prévenu qu'il préférait évoquer « les désaccords » plutôt « derrière des portes closes ». Plusieurs milliers de Tibétains, selon leurs représentants, ont manifesté dimanche à Paris contre la venue de Xi Jinping en France, « pays des droits de l'homme » qui accueille « un dictateur ». Les Ouïghours se sont aussi rassemblés à Paris.

À lire aussiEn France, les Ouïghours manifestent contre la visite d'État du président chinois Xi Jinping

 

Xi Jinping et Emmanuel Macron sur les terres familiales du président dans les Hautes-Pyrénées

Les deux hommes et leurs épouses se rendent ce mardi 7 mai au col du Tourmalet, dans les Hautes-Pyrénées, où vivaient les grands-parents maternels du chef de l'État.

Ce voyage est une manière d’échanger de manière moins formelle avec le président chinois, mais aussi de lui rendre la pareille après l'étape intimiste que ce dernier lui avait organisée lors de sa visite en Chine en 2023. « Xi Jinping avait invité Emmanuel Macron à Canton, là même où son propre père avait été le responsable du parti dans la région », souligne à RFI le sinologue Emmanuel Lincot, professeur à l'Institut catholique de Paris et chercheur associé à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris).

Ce voyage dans le fief familial du chef de l’État français n’est pas une première. En 1999, Jacques Chirac avait accueilli sur ses terres corréziennes le président chinois de l’époque, Jiang Zemin.

« Personne n’est dupe », avertit Emmanuel Lincot qui dit « douter fort que l’on avance de quelque manière que ce soit, en tout cas sur le dossier ukrainien ».

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI

Partager :
Page non trouvée

Le contenu auquel vous tentez d'accéder n'existe pas ou n'est plus disponible.