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Israël dit avoir pris le contrôle du côté gazaoui du point de passage de Rafah avec l'Égypte

L'armée israélienne a annoncé, ce mardi 7 mai, avoir pris le contrôle de la partie palestinienne du point de passage de Rafah, entre la bande de Gaza et l’Égypte, rapporte l’AFP. Israël a donc lancé une offensive contre Rafah, annoncée de longue date. L’armée israélienne ne le dit pas en ces termes et se contente de parler « d’une opération limitée », très certainement pour éviter les pressions internationales.

Les chars israéliens entrent du côté palestinien du poste-frontière de Rafah, entre Gaza et l'Égypte, le 7 mai 2024. (Photo de l’armée israélienne)
Les chars israéliens entrent du côté palestinien du poste-frontière de Rafah, entre Gaza et l'Égypte, le 7 mai 2024. (Photo de l’armée israélienne) © AFP
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Une unité de blindés « a manœuvré dans la zone. À l'instant présent, des forces spéciales inspectent le point de passage » de Rafah, « nous avons le contrôle opérationnel de la zone », a affirmé l'armée israélienne lors d'un point de presse, précisant parler « uniquement du côté gazaoui du point de passage ».

À lire aussiAprès sept mois de guerre, Gaza est un champ de ruines et une décharge à ciel ouvert

« Nous avions des indices, parmi lesquels les tirs » de roquettes dimanche contre le point de passage de Kerem Shalom entre Israël et Gaza, qui ont tué quatre soldats israéliens, « mais aussi du renseignement que la partie gazaouie du point de passage de Rafah [...] était utilisée par le Hamas à des fins terroristes », a expliqué l'armée.

« Une offensive temporaire et limitée »

Alors qu'Israël martèle depuis des mois son intention de mener une offensive terrestre d'ampleur sur Rafah, localité surpeuplée du sud de la bande de Gaza où, affirme-t-il, se terrent les derniers bataillons du Hamas, l'armée israélienne a assuré mardi que l'opération « de contre-terrorisme » était localisée et d'ampleur limitée.

« Nous opérons dans des zones spécifiques de l'est de Rafah. Nous n'opérons pas dans la totalité de la zone » mais « dans une zone précise d'une zone déjà déterminée » de Rafah, a indiqué l'armée. Il s'agit « d'une opération très ciblée, d'une ampleur très limitée contre des cibles très précises ». L'armée israélienne a refusé d'indiquer combien de temps durerait cette opération.

Pourquoi autant de prudence ? Il y a deux raisons à cela : rassurer les partenaires occidentaux et régionaux d’Israël. « Et laisser encore une chance au dialogue », assure Avi Melamed, ancien haut responsable des renseignements israéliens. « Nous assistons à la mise en place d’un plan israélien, dont la stratégie vise à mettre le Hamas sous pression militaire. L’objectif est de pousser le Hamas à accepter un accord pour la libération des otages aux conditions d’Israël. La deuxième phase est une plus grande pression militaire et l’invasion totale de Rafah. Mais personne ne peut dire si cette deuxième phase sera, ou non, mise à exécution. Car tout dépend de l’avancée des négociations avec le Hamas », dit-il à Sami Boukhelifa, notre correspondant à Jérusalem

Vers de nouveaux pourparlers au Caire en vue d'un cessez-le-feu

Israël et le Hamas sont attendus en Égypte ce mardi 7 mai, après l'annonce par le mouvement islamiste palestinien qu'il acceptait un projet de trêve devant notamment permettre une pause dans les combats en cours depuis sept mois dans la bande de Gaza et un échange de détenus palestiniens contre des otages enlevés par le Hamas le 7 octobre lors de sa sanglante attaque dans le sud d'Israël.

« L'ensemble des parties », dont Israël, « sont d'accord pour retourner à la table des négociations », a indiqué le média égyptien Al-Qahera News, proche des services de renseignements, citant un « haut responsable ». 

Benyamin Netanyahu a indiqué avoir donné pour consigne à la délégation israélienne de « continuer à se montrer ferme sur les conditions nécessaires à la libération » des otages, ainsi que sur les conditions « essentielles » pour garantir la sécurité d'Israël. Le ministre de la Défense israélien a, lui, prévenu mardi que l'armée était prête à « intensifier » ses opérations militaires contre le Hamas « dans toute la bande » de Gaza s'il n'y avait pas d'avancées sur la libération des otages détenus dans le territoire palestinien.

« Nous sommes prêts à des compromis pour ramener les otages, mais si nous n'avons pas le choix, nous intensifierons l'opération dans toute la bande – au sud, au centre, et au nord », a déclaré Yoav Gallant.

Israël a envoyé une délégation au Caire, tandis que du côté du Hamas, un dirigeant du mouvement a averti mardi que les pourparlers prévus en Égypte autour d'un projet de cessez-le-feu dans la bande de Gaza représentaient « la dernière chance » pour obtenir la libération des otages qui y sont détenus.

La délégation du Hamas « quittera sous peu Doha pour Le Caire [...] pour achever les négociations sur un cessez-le-feu », a indiqué à l'AFP ce responsable ayant requis l'anonymat. « Cela pourrait être la dernière chance [pour Israël] de récupérer les captifs [...] vivants », a-t-il ajouté à propos des personnes enlevées en Israël lors de l'attaque du Hamas le 7 octobre et détenues depuis en otages dans la bande de Gaza.

Les autorités israéliennes estiment qu'il reste 128 otages dans le territoire palestinien, dont 36 sont morts. Le Forum des Familles d'otages a annoncé mardi le décès d'un ressortissant israélo-argentin, Lior Rudaeff, jusqu'ici présumé otage du Hamas mais, en réalité, tué le 7 octobre durant l'attaque du Hamas.

Israël et le Hamas « devraient être capables de combler les lacunes qui restent » pour conclure « très bientôt » un accord de cessez-le-feu actuellement en discussion, assure ce mardi le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, John Kirby.

John Kirby a aussi déclaré que Washington restait opposé à une offensive terrestre « majeure » à Rafah, et veut que le point de passage pour l'aide humanitaire à la frontière égyptienne soit rouvert « aussi rapidement que possible ». « Les points de passage fermés doivent rouvrir, il est inacceptable qu'ils soient fermés », a ajouté Karine Jean-Pierre, la porte-parole de la Maison Blanche, en précisant que le point d'entrée de Kerem Shalom devrait rouvrir mercredi.

Les Gazaouis contraints à un nouveau déplacement

Dans le sud de la bande de Gaza, la situation est critique. Tamara Alrifai est la directrice des relations extérieures de l'UNRWA, l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, le principal acteur humanitaire dans la bande de Gaza. L’incertitude sur la réouverture des points de passage l’inquiète. « Nous craignons le pire car nous n’avons pas de stocks pour plusieurs jours », déplore-t-elle à RFI.

Ce qui l’inquiète le plus, « c’est le manque de carburant qui passe uniquement par Rafah. Sans carburant, nous ne pourrons plus du tout travailler. L'eau propre à la consommation humaine est très rare à Gaza », assure-t-elle. Comment l'extraire sans carburant pour les camions ?, s'interroge-t-elle. « Nous sommes face à une catastrophe de santé publique. » En Égypte, « des centaines de camions chargés de carburant et d'aide humanitaire sont bloqués », selon des sources égyptiennes.

« Parmi les 1,4 million de personnes déplacées à Gaza, la moitié sont des enfants, poursuit Tamara Alrifai à RFI. Cette population est très vulnérable et fragilisée par plusieurs déplacements. Si elle se déplace à nouveau, elle le fait sans rien mais surtout » elle se dirige « vers une zone de Gaza où il n’existe rien, ni infrastructures, ni tentes. »

Asma et sa famille font partie de ces Gazaouis contraints à plusieurs déplacements. Elle a fui sa ville, Khan Younès et les bombardements israéliens en décembre dernier, et trouvé refuge à Rafah. Désormais, un chemin en sens inverse s'impose, rapporte notre correspondant à Jérusalem, Sami Boukhelifa. Mohamed, un Gazaoui originaire, lui, de Rafah, se tâte à partir avec sa famille. « Nous n'avons nulle part où aller. Nous sommes neuf », lâche-t-il, plein de désarroi. Ici, personne ne croit l’armée israélienne, confie le jeune homme à notre correspondant à Jérusalem. Elle a déjà demandé aux Gazaouis d’aller dans des zones présentées comme sûres, avant de les bombarder. Après sept mois de guerre, poursuit-il, on pensait que le plus dur était derrière nous. Finalement le pire est peut-être à venir ».

« Préoccupation » après l'opération israélienne à Rafah

Le Premier ministre français, Gabriel Attal, a redit mardi la « préoccupation » de la France« face à l'offensive » d'Israël à Rafah. Le président de la République [Emmanuel Macron] a dit très clairement sa préoccupation face à cette offensive. Il a eu l'occasion de le dire très directement au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu », a affirmé Gabriel Attal à l'Assemblée nationale, lors de la séance des questions au gouvernement.

« Oui, la situation humanitaire à Gaza est catastrophique. Et oui, les civils doivent toujours être épargnés », a souligné le chef du gouvernement, en rappelant la position de Paris pour « exiger un cessez-le-feu immédiat, rechercher la paix par tous les moyens, éviter l'escalade dans la région et permettre à l'aide humanitaire d'arriver ».

De son côté, la Chine a exhorté Israël à « cesser d'attaquer Rafah ».

L’Allemagne met en garde contre une offensive à Rafah et appelle à rouvrir les points de passage, à l’instar des Nations unies. Sur X, Annalena Baerbock, la ministre allemande des Affaires étrangères, a écrit que les civils palestiniens déplacés à Rafah « ont besoin de protection et d'une aide humanitaire de toute urgence. Pour cela, les points de passage de Rafah et Kerem Shalom doivent être immédiatement rouverts. »

L'ONU interdite d'accès à Rafah

La fermeture des points de passage de Rafah et de Kerem Shalom par Israël coupe l'acheminement de l'aide vers Gaza. « La fermeture à la fois des points de passage de Rafah et de Kerem Shalom est particulièrement néfaste pour la situation humanitaire déjà désespérée. Ils doivent être rouverts immédiatement », a déclaré Antonio Guterres à la presse. « Après plus de 1 100 Israéliens tués lors des attaques du Hamas du 7 octobre, après plus de 34 000 Palestiniens tués à Gaza, n'en avons-nous pas vu assez ?, a-t-il lancé. Les civils n'ont-ils pas assez subi de mort et de destruction ? ».

D'après le porte-parole de l'ONU, l'organisation internationale est interdite d'accès au point de passage de Rafah par les autorités israéliennes. « Nous n'avons actuellement aucune présence physique au point de passage de Rafah, car le Cogat [organisme israélien chargé de coordonner la politique israélienne dans les territoires palestiniens occupés, NDLR] nous a refusé l'accès à cette zone », qui est le principal point de passage de l'aide humanitaire, a déclaré Jens Laerke, lors d'un point de presse régulier à Genève.

L'ONU a par ailleurs indiqué ne plus disposer que d'un seul jour de réserve de fuel pour les opérations humanitaires dans la bande de Gaza, en raison de cette fermeture du point de passage de Rafah.

Quant à l'évacuation des civils, exhortés à quitter une partie de la ville par Israël, elle n'est pas sans danger, souligne notre correspondant à Genève, Jérémie Lanche. Située à une dizaine de kilomètres de Rafah, la zone côtière d'Al Mawasi, où s'enchevêtrent les tentes, n'est pas « sûre », dénonce à RFI James Elder, de l'Unicef. « Il y a quelques semaines, un garçon dénommé Mustafa, sorti chercher de la nourriture pour sa famille, a été tué d’une balle dans la tête à Al Mawasi », indique-t-il.

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