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Photographie / Mode

Marseille expose Man Ray, le pionnier discret de la photographie de mode

Marseille accueille jusqu’au 8 mars deux expositions autour de l’œuvre de l’artiste américain Man Ray. Le travail de cette figure du surréalisme est présenté simultanément au musée Cantini et au Château Borély sous un angle moins connu du grand public : celui de photographe de mode, domaine dans lequel il a inspiré plusieurs générations. L’événement arrivera à Paris l’année prochaine.

Vue de la photographie «Les larmes» (1932), exposée dans «Man Ray et la mode», à Marseille.
Vue de la photographie «Les larmes» (1932), exposée dans «Man Ray et la mode», à Marseille. © Silvano Mendes / RFI
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De notre envoyé spécial à Marseille,

Celui qui a côtoyé Marcel Duchamp, Jean Cocteau et Francis Picabia était un personnage incontournable du Paris des années 1920, quand toute l’intelligentsia internationale flânait dans le quartier de Montparnasse, où l’Américain avait son studio. Mais contrairement à ses contemporains, Man Ray peine à trouver le succès qu’il espérait en tant que peintre et commence à faire des portraits photographiques de cette faune intellectuelle qui composait son entourage. Jusqu’à ce qu’il rencontre le couturier Paul Poiret, qui lui laisse prendre – gratuitement – ses modèles en photo et, sans le vouloir, l’introduit dans la discipline encore balbutiante de la photographie de mode.

C’est ce « travail d’un artiste majeur dans un domaine considéré comme mineur », comme le résume la commissaire Claude Miglietti, que Marseille explore avec Man Ray et la Mode. Parce qu’à cette époque, photographier la haute couture n’était pas très valorisant, surtout au regard de ceux qui s’identifiaient en tant qu’artistes. « Man Ray a toujours prétendu être un peintre. Et un artiste ne faisait pas la manche après des revues commerciales », explique Alain Sayag, l’un des commissaires scientifiques de l’exposition. « Il a passé son temps à masquer cette activité », poursuit-il. Ce que pourrait expliquer la méconnaissance de cette facette du travail de l’Américain.

D’ailleurs, certaines des images les plus iconiques de la mode sont signées Man Ray, même si peu le savent. C’est le cas d’un portrait de Gabrielle Chanel, datant de 1935, dans lequel Coco apparait dans une pose devenue emblématique de son personnage de femme libre, assise de profil avec une cigarette, avec ses nombreux colliers en perle autour du cou.

Vue du parcours de l’exposition « Man Ray et la mode », à Marseille.
Vue du parcours de l’exposition « Man Ray et la mode », à Marseille. © Silvano Mendes / RFI

Des magazines en quête de modernité

Le parcours présenté à Marseille montre que la photographie de mode est loin d’être anecdotique dans la trajectoire de Man Ray. Embauché par les magazines Vogue et Harper’s Bazaar, il a été l’un des noms qui comptaient à l’époque. « Il est l’un de ceux qui ont créé la photographie de mode », affirme Catherine Örmen, historienne de la mode et également commissaire scientifique de l’exposition.

« C’était une discipline qui n’existait pas et qui était liée surtout au reportage. On plaçait les mannequins et les femmes du monde dans un contexte et on les photographiait. Il va inventer autre chose, puisqu’il va les mettre en situation. Il va créer des images oniriques et apporter du rêve par le décalage et des cadrages tout à fait différents de ce que l’on pouvait attendre. Et les magazines en étaient friands ».

Surtout parce que, comme le rappelle Alain Sayag, la presse vivait une transformation dont Man Ray devient l’un des acteurs. « Les revues de mode, qui étaient remplies de dessins, commencent à publier des photographies. Celles qui se voulaient modernes, comme Vogue et Harper’s Bazaar, veulent utiliser la photographie, qui est le support de la modernité. Et Man Ray était un technicien hors pair, qui maîtrisait impeccablement son médium », résume le spécialiste.

Poses dramatiques et inspiration surréaliste

Mais au-delà de la maîtrise technique, ce que ressort du parcours, composé de très beaux tirages, des pages de revues, mais aussi des nombreuses robes sélectionnées par Catherine Örmen et qui donnent au visiteur une idée de la folie artistique de l’entre-deux-guerres, c’est la créativité et le côté précurseur de Man Ray. Le photographe introduit l’inspiration surréaliste dans la photo de mode, crée des mises en scène ponctuées par des poses dramatiques, photomontages et dialogues improbables entre les modèles et les objets. Une recette qui a inspiré des noms comme Erwin Blumenfeld, son héritier version couleur dans années 1950, ou encore Viviane Sassen, qui enchante la presse et les galeristes aujourd’hui. Sans oublier tous ceux qui lui rendent hommage sans même le savoir. Il suffit de tourner les pages d’un magazine de mode plus pointu ou regarder des campagnes publicitaires un peu plus arty pour s’en rendre compte.

Une photo de Gabrielle Chanel, prise par Man Ray en 1935, exposée dans l’exposition « Man Ray et la mode », à Marseille.
Une photo de Gabrielle Chanel, prise par Man Ray en 1935, exposée dans l’exposition « Man Ray et la mode », à Marseille. © Silvano Mendes / RFI

► Man Ray et la Mode, exposition au Musée Cantini et au Château Borély, à Marseille, du 8 novembre 2019 au 8 mars 2020.
Une autre version de cette exposition sera présentée au musée du Luxembourg, à Paris, du 9 avril au 26 juillet 2020.

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