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Guerre au Soudan: Un «possible génocide» aurait été commis au Darfour, selon un rapport de HRW

L’ONG Human Rights Watch a publié jeudi 9 mai un nouveau rapport sur le Soudan, spécifiquement sur la ville martyre d'el-Geneina, au Darfour-ouest. Au cours de 186 pages, l’ONG « soulève la possibilité » d'un « génocide », évoquant un nettoyage ethnique et des crimes contre l'humanité commis contre la communauté Massalit de la ville par les Forces de soutien rapide. Les paramilitaires soudanais sont en guerre contre l'armée depuis le 15 avril 2023.

Des Soudanaises d'el-Geneina, au Darfour occidental, pleurent après avoir reçu des nouvelles de leurs proches disparus à Ardamata, alors qu'elles les attendaient de l'autre côté de la frontière, au Tchad, le 7 novembre 2023.
Des Soudanaises d'el-Geneina, au Darfour occidental, pleurent après avoir reçu des nouvelles de leurs proches disparus à Ardamata, alors qu'elles les attendaient de l'autre côté de la frontière, au Tchad, le 7 novembre 2023. © El Tayeb Siddig / Reuters
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Plus de 500 000 réfugiés du Darfour occidental ont fui vers le Tchad depuis avril 2023, selon les derniers chiffres de l’ONU. Fin octobre, 75 % d'entre eux étaient originaires d’el-Geneina, alerte Human Rights Watch (HRW).

Les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), ainsi que les milices alliées, ont été largement accusées de nettoyage ethnique, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre dans leur guerre contre l'armée régulière, qui a débuté en avril 2023.

La guerre a tué des dizaines de milliers de personnes. Parmi celles-ci, des experts de l'ONU ont découvert qu'entre 10 000 et 15 000 personnes ont été tuées dans la ville d'el-Geneina, au Darfour occidental : cela représente le noyau de ce que HRW a appelé « une campagne de nettoyage ethnique contre l'ethnie Massalit et d'autres populations non arabes de la région ».

Le rapport de 186 pages documente comment, de fin avril à début novembre 2023, les FSR et les milices alliées « ont mené une campagne systématique visant à expulser, notamment en tuant, les habitants de l'ethnie Massalit ».

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Des milliers de personnes tuées en quelques jours

Selon l'ONG Human Rights Watch (HRW), qui a entendu des dizaines de rescapés réfugiés au Tchad, ces paramilitaires et leurs milices alliées, ont ciblé les quartiers à prédominance Massalit d'el-Geneina lors de vagues d'attaques incessantes d'avril à juin dernier, puis en novembre. Les assaillants ont commis d'autres abus graves tels que la torture, le viol et le pillage.

Les violences ont culminé à la mi-juin, lorsque des milliers de personnes ont été tuées en quelques jours, et ont de nouveau augmenté en novembre.

Des avocats locaux spécialisés dans les droits de l'homme ont déclaré que les combattants s'en prenaient en premier lieu à « des membres éminents de la communauté Massalit », notamment des médecins, des défenseurs des droits de l'Homme, des dirigeants locaux et des représentants du gouvernement.

HRW ajoute que les assaillants « ont méthodiquement détruit les infrastructures civiles vitales » dans les communautés déplacées principalement de Massalit.

Jean-Baptiste Gallopin, chercheur senior auprès de la division crises et conflits à Human Rights Watch, revient sur les détails de cette enquête. Selon HRW, les attaques des FSR « constituent des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre », notamment « dans le cadre d’un nettoyage ethnique visant la population Massalit ».

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Les violences des FSR au Darfour «constituaient des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre», commises «dans le cadre d’un nettoyage ethnique visant la population Massalit», explique Jean-Baptiste Gallopin, chercheur senior auprès de la division crises et conflits à Human Rights Watch

Houda Ibrahim

Des images satellite montrent que depuis juin, les quartiers majoritairement Massalit de la ville - qui abritaient auparavant environ 540 000 personnes - ont été « systématiquement démantelés, beaucoup à l'aide de bulldozers, empêchant les civils qui ont fui de rentrer chez eux », ont-ils indiqué.

Selon l'ONG basée à New York, « l'objectif apparent » des attaques était « au moins de les pousser à quitter définitivement la région », ce qui « constitue un nettoyage ethnique ».

HRW souligne que le contexte des meurtres « soulève la possibilité que les FSR et leurs alliés avaient l'intention de détruire tout ou une partie des Massalit au moins dans l'ouest du Darfour, ce qui indiquerait qu'un génocide a été et/ou est en train d'être commis là-bas ».

Cette combinaison créée le 16 juin 2023 d'images satellites diffusées par Maxar Technologies montre (à gauche) le marché d'El Geneina dans la capitale du Darfour occidental le 20 avril 2023, et (à droite) la même zone le 17 mai 2023.
Cette combinaison créée le 16 juin 2023 d'images satellites diffusées par Maxar Technologies montre (à gauche) le marché d'El Geneina dans la capitale du Darfour occidental le 20 avril 2023, et (à droite) la même zone le 17 mai 2023. © Satellite image ©2023 Maxar Technologies / via AFP

HRW appelle à une enquête sur intention génocidaire et des sanctions ciblées face à des « atrocités à grande échelle »

HRW a appelé à une enquête sur l'intention génocidaire et à des sanctions ciblées contre les responsables et exhorté les Nations unies à « élargir l'embargo sur les armes imposé au Darfour pour couvrir l'ensemble du Soudan ».

La Cour pénale internationale enquête actuellement sur les meurtres à caractère ethnique commis principalement par les FSR au Darfour. L'instance affirme avoir des « raisons de croire » que ces paramilitaires, de même que l'armée, commettent des crimes qui s'apparentent au génocide, aux crimes contre l'humanité et aux crimes de guerre.

Tous les regards sont présentement tournés vers el-Fasher, chef-lieu de l'État du Darfour-Nord. Il s'agit de la seule capitale des cinq États du Darfour à ne pas être aux mains des FSR, à environ 400 km à l'est d'el-Geneina.

« Alors que le Conseil de sécurité de l'ONU et les gouvernements prennent conscience du désastre imminent à el-Fasher, les atrocités à grande échelle commises à el-Geneina devraient être considérées comme un rappel des atrocités qui pourraient survenir en l'absence d'une action concertée », a souligné Tirana Hassan, directrice exécutive de HRW.

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