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Législatives et régionales au Togo: un scrutin inédit sur fond de changement de la Constitution

Un peu plus de quatre millions d’électeurs togolais sont appelés aux urnes, lundi, pour des élections législatives et régionales. Reporté à plusieurs reprises, ce double scrutin se tient alors qu’une nouvelle Constitution adoptée par les députés sortants, le 19 avril, fait passer le Togo d’un régime présidentiel à un régime parlementaire. Les élections vont-elles se transformer en référendum pour ou contre le nouveau texte ? C’est le vœu de l’opposition qui revient dans la course après avoir boycotté les législatives de 2018.

Affiches électorales du parti UNIR au pouvoir pour les législatives et les régionales au Togo, à Lome, le 24 avril 2024.
Affiches électorales du parti UNIR au pouvoir pour les législatives et les régionales au Togo, à Lome, le 24 avril 2024. AFP - DODO ADOGLI
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« Nous avons appris de nos erreurs passées », martèlent plusieurs figures de l’opposition togolaise, tournant le dos à une politique de la chaise vide qui a fait d’eux des partis extra-parlementaires. Ces élections marquent le retour dans la course de partis comme l’ANC de Jean-Pierre Fabre ou la DMP de Brigitte Adjamagbo Johnson. Lors des dernières législatives de 2018, ils avaient boycotté le scrutin, dénonçant notamment des irrégularités dans le processus d’enrôlement des électeurs.

Cette fois-ci, ils s’apprêtent à affronter dans les urnes le parti UNIR du président Faure Gnassingbé qui va tenter de conserver sa majorité absolue, avec en ligne de mire les 113 sièges de députés, et pour la première fois 179 de conseillers régionaux, à pourvoir lors du double scrutin législatif et régional de ce lundi 29 avril. Même si les opposants continuent de dénoncer pêle-mêle le fichier des électeurs, le nouveau découpage électoral et le retard pris dans l’organisation du scrutin.

Le parti au pouvoir veut garder la majorité absolue

Car cela fait déjà plusieurs mois que les élections auraient dû se tenir. Avant la fin de l’année dernière, le mandat des députés étant arrivé à échéance début 2024. Annoncées pour le premier trimestre, elles sont finalement fixées au 13 avril, puis décalées à deux reprises. La dernière fois, à quelques heures seulement de l’ouverture de la campagne, le temps pour le pouvoir d’expliquer aux Togolais le contenu de la nouvelle Constitution.

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Et c’est bien cette question du changement constitutionnel qui a finalement plané sur toute la campagne, au-delà du coût de la vie, de l’accès aux services de base et du contrôle de l’action gouvernementale. Ce texte, qui fait passer le Togo d’un régime présidentiel à un régime parlementaire, a été adopté en seconde lecture le 19 avril, à dix jours seulement des élections législatives, par les députés sortants à l’unanimité des présents (87 voix sur 91). Il prévoit que le président de la République – dont le rôle devient symbolique – est élu par les parlementaires. Le pouvoir exécutif revient à un président du Conseil des ministres, qui est le chef du parti majoritaire à l’Assemblée. Une fonction qui, si cette nouvelle Constitution avait été appliquée à l’Assemblée sortante, serait donc revenue à Faure Gnassingbé, en tant que président du parti UNIR.

Depuis plusieurs semaines, le changement de Constitution cristallise la colère d’une partie de la société civile et de l’opposition. Si la majorité le présente comme un moyen de renforcer le pouvoir du peuple, eux y voient un moyen pour Faure Gnassingbé, au pouvoir depuis 2005 après avoir succédé à son père, de se maintenir à la tête du pays sans limitation de mandat, et sans se confronter directement à ses opposants dans les urnes.

« C’est un scrutin unique en son genre que le Togo s’apprête à vivre ! », résume Berges Mietté, chercheur associé au LAM (Les Afriques dans le monde), qui résume l’enjeu principal pour le parti UNIR au pouvoir : conserver la majorité absolue, surtout dans le cadre de la nouvelle Constitution, car une opposition forte pourrait risquer de remettre en cause tout le dispositif. 

« Un coup d’État constitutionnel », dénoncent les opposants

À défaut de pouvoir organiser des manifestations qu’ils se voient interdire, les opposants se sont donc emparés de la campagne électorale pour dénoncer ce qu’ils qualifient de « coup d’État constitutionnel ». Nathaniel Olympio, membre du front Touche pas à ma Constitution et président du Parti des Togolais ne se présente pas au scrutin, considérant que « les élections au Togo sont devenues un instrument de confiscation du pouvoir ». Mais pour lui, « l’objectif de l’opposition est de transformer l’élection en référendum pour ou contre le changement de Constitution ».

« Qu’à cela ne tienne, ça nous fera l’économie d’un référendum ! », lance Isaac Tchiakpé, candidat de l’UFC, qui disposait de 7 sièges dans l’Assemblée sortante et entend faire mieux « pour peser dans les politiques publiques ».

Dans le camp du parti UNIR, on affiche satisfaction et sérénité à l’approche du verdict des urnes. « Chacun a pu donner son point de vue sur la marche du pays et sur la réforme constitutionnelle. C’est une bonne chose, estime le ministre Gilbert Bawara. Chacun sait désormais que c’est sur la base de cette nouvelle Constitution que l’élection se tient. » Le texte doit encore être promulgué par le président. Il dispose d’un délai de quinze jours après le vote pour le faire.

Après le scrutin, l’heure sera sans doute aux tentatives de rapprochements entre partis d’opposition pour peser davantage dans l’Assemblée nouvelle version. « Dans le contexte actuel, nous n’avons pas le choix », explique Paul Dodji Apevon. « On se battra, le combat ne fait que commencer », conclut le président des Forces démocratiques pour la République (FDR).

Des élections supervisées par quatre organisations internationales et régionales

 

Depuis 23h59 ce samedi, fini les meetings, les caravanes, la distribution de gadgets, tout est désormais mis dans les tiroirs pour observer le silence électoral. Seules quatre organisations sont accréditées pour observer le double scrutin : législative et régionale. La communauté des États sahélo-sahariens, CEN-SAD déploie sept observateurs, l’Union Africaine, une dizaine, la francophonie, une dizaine et la communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, une quarantaine d’observateurs.

En tout, ils seront une soixantaine d’observateurs internationaux autorisée et quelques observateurs nationaux. La commission Justice et Paix de l’Église catholique s’est vue refuser l’accréditation pour observer le scrutin au motif qu’elle n’a pas justifié l’origine du financement de ces bénévoles. Une situation que déplore la conférence des évêques du Togo.

Lundi, 4,2 millions d’électeurs sont appelés aux urnes, pour 113 députés parmi les 2 352 candidats et désigner 179 conseillers régionaux sur les 2 312 inscrits pour l’occasion.

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