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Sommet de l'Union africaine

[Portrait] Un ministre d'Idriss Déby à la tête de la Commission de l'UA

Le Tchadien Moussa Faki Mahamat dirigera désormais la Commission de l’Union africaine. Il a été élu par les 54 chefs d’Etat et de gouvernement réunis en Sommet à Addis Abeba. Changement de style en perspective pour le bras exécutif de l’UA.

Moussa Faki Mahamat connaît bien les dossiers stratégiques dans lesquels son pays affublé du titre de «gendarme du Sahel» a été ou est engagé.
Moussa Faki Mahamat connaît bien les dossiers stratégiques dans lesquels son pays affublé du titre de «gendarme du Sahel» a été ou est engagé. RFI
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Au 28e sommet de l’Union africaine, le Tchadien Moussa Faki Mahamat s'est imposé à la surprise générale comme le successeur de la présidente sortante de la Commission de l’UA (CUA), la Sud-Africaine Nkosazana Dlamini-Zuma. Candidat du bloc régional de l’Afrique centrale moins bien représenté que les autres régions dans les instances continentales et ministre des Affaires étrangères de son pays depuis neuf ans, l’homme a emporté le graal en faisant valoir sa longue expérience à l’international et sa bonne connaissance des dossiers stratégiques et sécuritaires du continent dans lequel le Tchad est devenu un acteur incontournable.

Preuve du dynamisme politique du continent, il a fallu plusieurs tours de scrutin pour départager les cinq candidats en lice. C’est au septième tour seulement que Moussa Faki Mahamat a remporté la victoire finale contre la candidate kényane Amina Mohamed, avec 39 voix avec une majorité de deux tiers des voix, comme l'exigent les règlements. Les autres concurrents le Sénégalais Abdoulaye Bathily, la Botswanaise Pelonomi Venson-Moitoi et l’Equato-Guinéen Agapito Mba Mokuy ont été éliminés dès les trois premiers tours, enfin la Kényane Amina Mohamed au sixième tour.

L’homme de confiance

Cheveux grisonnants et toujours impeccablement habillé en costume cravate ou en boubou ample, le nouveau président de la CUA est un juriste de formation. Il parle couramment trois langues (français, anglais et arabe) et a fait ses études à Brazzaville et Paris. Il a à son actif un doctorat en thèse de droit public obtenu à l’université Paris XIII.

L’homme est issu de l’ethnie zaghwa tout comme son mentor qui n’est autre que le président Idriss Déby du Tchad. Les deux hommes sont proches et c’est sous l’égide du dernier que Moussa Faki Mahamat a effectué l’essentiel de sa brillante carrière ministérielle, jusqu’à devenir le Premier ministre entre 2003 et 2005. D’aucuns susurrent dans les couloirs du siège de l’UA que ce nouveau chef de l’exécutif a bénéficié d'un gros coup de pouce par l’homme fort de N'Djamena, qui, rappelons-le, a assuré au cours des douze derniers mois la présidence tournante de l’organisation panafricaine. Avec une opposition qui conteste sa récente réélection à la tête de son pays et dénonce une fraude massive, c’était sans doute important pour le chef d’Etat tchadien, au pouvoir depuis 1990, d’avoir son homme de confiance à la tête du stratégique exécutif continental.

Cela dit, l’expérience de l’heureux élu en ce qui concerne les relations internationales est réelle. A la tête de la diplomatie tchadienne depuis presque une décennie, l’homme connaît les rouages des institutions internationales qu’il pratique depuis si longtemps. Considéré comme l’artisan de l’entrée de son pays pour la première fois au Conseil de Sécurité en 2013 comme membre non-permanent, il avait su imposer pendant la présidence tchadienne en décembre 2014 de l'instance internationale que ses travaux soient consacrés aux questions africaines, en particulier aux relations des Nations unies avec les organisations régionales telles que l’Union africaine.

Longévité

La longévité de Moussa Faki Mahamat comme chef de la diplomatie tchadienne lui a permis d’avoir une large connaissance des dossiers internationaux, mais aussi du fonctionnement de l’Union africaine dont il a récemment dirigé la session des ministres, le Tchad assurant la présidence de l’UA. Il connaît également bien les dossiers stratégiques dans lesquels son pays affublé du titre de « gendarme du Sahel » a été ou est engagé, comme le candidat Mahamat l’avait déclaré à l’antenne de RFI : « Depuis 2008, j’ai eu à travailler sur un certain nombre de dossiers comme celui du Darfour, sur le dossier libyen, sur le dossier malien, sur la crise dans le bassin du lac Tchad. Donc, cela me donne certainement un avantage, au moins sur la connaissance de de plus près de la plupart des crises qui sont en cours dans le continent. »

La campagne du candidat tchadien avait été effectivement très axée sur les questions de paix et sécurité, comme les spectateurs avaient pu le constater lors du débat télévisé qui avaient opposé les cinq candidats le 9 décembre 2016. Mais, chemin faisant, il a réinitialisé son discours, faisant valoir aux côtés de ses préoccupations sécuritaires son rêve d’un continent « où le bruit des armes » se tairait pour faire place aux « hymnes de la culture et le grondement des usines ». Dans sa profession de foi publiée en trois langues (anglais, français et arabe) et dont il a inondé le lobby de l’Union africaine pendant le sommet, il déclare vouloir au cours de son mandat de quatre ans « revigorer la jeunesse africaine », « rehausser la femme africaine », « renforcer la gouvernance » et s’attaquer à bras le corps aux nouveaux défis continentaux qui sont l’environnement et la migration

Ce programme n’a pas apparemment convaincu la société civile tchadienne qui a pointé du doigt le peu de cas fait des droits de l’homme et de la démocratie par l’administration tchadienne au sein de laquelle Moussa Faki Mahamat occupe des positions éminentes depuis plusieurs décennies. Les déclarations ambiguës du président élu de la CUA sur les « limites » de la « démocratie pluraliste en Afrique » dans l’hebdomadaire Jeune Afrique inquiètent. Et certains regrettent déjà la présidente sortante qui n’a pas fait que du bien à l’UA, mais dont la « fibre démocratique » n’a jamais été en cause.

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