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Le pétrolier Shell aurait vendu des millions de crédits carbone «fantômes»

Shell aurait vendu de millions de crédits carbone « fantômes », a révélé dimanche 5 mai le quotidien britannique Financial Times. La major pétrolière aurait vendu plus de crédits de captage de carbone qu’elle ne pouvait, seulement la moitié de la quantité promise étant réellement soustraite de l’atmosphère. Au-delà du montage, la révélation met en doute la technologie mise en avant par les géants de l’hydrocarbure pour les rendre compatibles avec la lutte contre le changement climatique.

Le Projet Quest, de Shell, pour le captage et le stockage du carbone (CSC) près de Fort Saskatchewan, en Alberta, au Canada.
Le Projet Quest, de Shell, pour le captage et le stockage du carbone (CSC) près de Fort Saskatchewan, en Alberta, au Canada. © Business Wire / via AP
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Shell exploite une usine de captage de CO2 près d'Edmonton, dans l'Alberta, au Canada. L’usine de Quest, de son nom, récupère du dioxyde de carbone au moment d'une opération de transformation de bitume des gisements canadiens, puis le compresse pour le liquéfier et l'injecte dans un puits pour l'emprisonner sous terre. Cela plutôt que de le libérer dans l'atmosphère.

Ce carbone séquestré permet à Shell de générer des « crédits carbone » et de les vendre à des entreprises émettrices de gaz à effet de serre. De la sorte, ces entreprises effacent comptablement une partie de leurs émissions. Selon le Financial Times, en huit ans, des crédits générés pour 5,9 millions de tonnes d'équivalent CO2 reposaient sur une réduction réelle des émissions.

Mais selon les informations du journal britannique, l'Alberta a autorisé Shell à en enregistrer quasiment le double. Cela dans le cadre d'un programme de subventions visant à stimuler l'industrie. Car Shell proposait de les vendre à des producteurs de sable bitumineux.

La technologie de captage et séquestration de carbone coûte cher. Pour la rendre plus rentable, Shell a bénéficié de subventions pendant plusieurs années, le tout en vendant des crédits « fantômes » de 2015 à 2021. Les subventions ont été réduites, puis ont été supprimées en 2022.

En résultat de ce mécanisme, Shell a pu enregistrer 5,7 millions de crédits qui ne se sont jamais traduits en réduction d’émissions de carbone, affirme le quotidien britannique. Cela en vendant des crédits à certains des grands producteurs de sable bitumineux, voire à ses propres filiales. Parmi ses clients de crédits se trouvaient Chevron, Canadian Natural Resources, ConocoPhillips, Imperial Oil et Suncor Énergies.

Cela « aggrave littéralement le changement climatique »

Keith Stewart, stratège principal en matière d'énergie chez Greenpeace Canada, a critiqué ces « crédits fantômes ». « Vendre des crédits d'émission pour des réductions qui n'ont jamais eu lieu aggrave littéralement le changement climatique », a-t-il indiqué lors d’un entretien au Financial Times.

L'entreprise Shell a, quant à elle, déclaré que le piégeage du carbone jouait « un rôle important dans la décarbonisation de l'industrie et des secteurs où les émissions ne peuvent être évitées » et que la réalisation de son potentiel « nécessitait la création d'incitations commerciales dès maintenant », a rapporté le Financial Times.

Depuis plusieurs années, et notamment lors de la COP27, les multinationales des hydrocarbures et de l’énergie font pression pour plus d’investissements dans le captage et le stockage du carbone. Elles réclament davantage de subventions étatiques, avançant que cette technologie pourrait les rendre compatibles avec les objectifs de lutte contre le changement climatique.

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