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Athlétisme / Jeux de la Francophonie

[Abidjan 2017] Franck Elemba: «Je me sens abandonné par le Congo»

Médaillé d’or aux Jeux de la Francophonie 2017, Franck Elemba n’avait pourtant pas le cœur à sourire, ce 23 juillet à Abidjan. Usé physiquement et moralement, criblé de dettes en France et au Maroc, victime d’une arnaque à Brazzaville, le lanceur de poids se sent abandonné par le Congo. A deux semaines des Championnats du monde à Londres, celui qui avait fini 4e aux JO 2016 envisage même de changer de nationalité sportive pour les JO 2020.

Le lanceur de poids congolais Franck Elemba.
Le lanceur de poids congolais Franck Elemba. Gregor Fischer / dpa / AFP
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RFI : Franck Elemba, vous voilà médaillé d’or aux Jeux de la Francophonie 2017 après avoir fini non loin du podium en 2009 et 2013. Êtes-vous satisfait de votre performance à Abidjan ?

Franck Elemba : C’est la deuxième médaille d’or de ma carrière dans un tournoi international. Mais je l’ai obtenu avec beaucoup de difficultés et de petits soucis au niveau du matériel. Les organisateurs ont en effet refusé que je lance avec le poids que j’utilise habituellement. […] Mais j’ai été obligé de faire avec. J’ai essayé d’avoir cette première place pour l’honneur du Congo. […]

Être athlète dans un sport individuel, ce n’est pas simple… On travaille dur matin, midi et soir pour hausser son niveau. Du coup, des blessures surviennent. C’est d’ailleurs ce qui me ralentit un peu dans ma progression, en ce moment. En plus, j’ai du mal à aller au bout des traitements. Mais je vais essayer de conserver toutes mes forces pour réussir quelque chose aux Mondiaux à Londres.

Ces blessures sont-elles inévitables ?

Ça vient de la charge de travail que je me suis imposé. Des blessures sont apparues au niveau de mes tendons rotuliens, ces dernières semaines. Je dois néanmoins continuer à appuyer sur mes jambes. Résultat, j’ai ces douleurs en tête. Et, du coup, il y a beaucoup de stress.

En plus, je me sens délaissé et même abandonné. C’est très difficile de garder le moral durant la préparation pour ces Mondiaux. Imaginez un peu que vous passiez votre temps à emprunter de l’argent aux banques pour vous soigner et pour financer des stages…

Qui vous a abandonné ?

Mon pays. Ses dirigeants n’ont pas voulu ou pas pu me payer un stage de préparation depuis un an. Rien de tout ce que je leur ai demandé n’a été fait.

Lorsque les gens essaient de vous aider, vous le sentez au moins... Mais lorsque vous sentez qu’il n’y a rien de fait pour vous, ça devient difficile et ça fait mal au cœur.

J’ai prévu des stages un peu partout dans le monde. Pour le premier, par exemple, il a fallu emprunter de l’argent en banque pour payer les billets d’avion de mon entraîneur [le Marocain Mohammed Fatihi, Ndlr] qui a dû en partie payer ses nuits d’hôtel. Mon club en France, l’EFCVO, a également contribué au fait que je participe à ce stage.

Les choses sont vraiment difficiles car seul mon club essaie de faire quelque chose depuis les Jeux olympiques 2016. C’est très dur pour moi et vraiment dommage pour mon pays. Surtout lorsque je vois le traitement réservé à l’équipe de football du Congo qui effectue des stages à Paris en vue de matches amicaux…

Je n’arrive pas à avaler tout ça et c’est ce qui me démotive. Je sais que mon pays traverse une crise. Mais lorsque vous donnez le meilleur de vous-même aux Jeux olympiques, cela devrait entraîner un soutien des autorités de votre pays pour aller plus loin, non ? Mais s’il n’y a pas de soutien pour aller plus haut, comment faire ?

Je vais participer aux Mondiaux alors que mon entraîneur n’a pas de billets d’avion. Je vais utiliser une petite prime de victoires pour lui payer le trajet. Tout ça fait que je termine la saison en étant démotivé. […]

Je me sens vraiment à bout, malgré cette médaille à Abidjan. Je vais rentrer chez moi. Mais comment est-ce que je vais faire pour payer mes dettes en France et au Maroc ? Je réfléchis à une solution. J’essaie de rembourser avec l’argent gagné durant les meetings. Mais ce n’est pas suffisant et je retombe toujours dans les mêmes problèmes. […]

Qui pourrait vous aider ?

J’attends un geste de la part du président de la République [Denis Sassou-Nguesso, Ndlr] et du gouvernement. Il y a de nombreuses fondations au Congo…

En attendant, je vais continuer à travailler. Je souffre mais ce n’est pas ce qui va m’arrêter. […] Je ne pourrais pas tout plaquer. J’ai un objectif et je vais le réaliser : aller chercher une médaille à Tokyo. Cette médaille, elle sera pour moi et pour ma famille. Pour ma mère surtout qui m’a beaucoup aidé. Elle est à la retraite et elle souffre. On espère que le bon Dieu nous aidera.

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