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Sports/Rugby

De 2007 à 2017, la longue marche du rugby algérien

La Fédération algérienne de rugby a inauguré son siège à Alger le 24 février 2017, dix ans pile après la naissance d’un projet : faire renaître le rugby sur le sol algérien. Un long combat qui porte désormais ses fruits. L’équipe nationale s’apprête à disputer la toute première Coupe d’Afrique des nations de son histoire.

Le XV d'Algérie juste avant le tout premier match sur son sol, le 17 décembre 2015 à Oran.
Le XV d'Algérie juste avant le tout premier match sur son sol, le 17 décembre 2015 à Oran. FAROUK BATICHE / AFP
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Enfin, le rugby algérien s’apprête à transformer l’essai après plusieurs années de (dé)mêlées juridico-administratives. C’est l’histoire d’un long combat qui a commencé dans la presse spécialisée française. « Monsieur Morad Kellal [ex-joueur, formateur et entraîneur, Ndlr] avait lancé un appel dans le journal Midi Olympique, raconte Azzouz Aïb, le Secrétaire général de la Fédération algérienne. Il disait qu’il cherchait des joueurs d’origine algérienne. On avait été plusieurs à répondre à cet article, dont Sofiane Benhassen, actuel président de notre Fédération, et moi-même. On s’est tous rencontré comme ça. A la suite de tout ça, j’ai beaucoup discuté avec Sofiane qui voulait vraiment monter une équipe de rugby en Algérie. Il voulait aussi que le premier club soit à Oran, la ville dont il est originaire ».

Cette équipe nationale non-officielle, composée de binationaux, se retrouve le 24 février 2007 à Nabeul, en Tunisie, pour affronter une sélection tunisienne. « Sans accord de l’Etat ni de qui que ce soit, se souvient Azzouz Aïb. On avait acheté des maillots à des prix dérisoires. Chacun avait payé son billet d’avion ».

Une grande première qui donne envie de poursuivre l’aventure. Mais celle-ci se révèle semée d’embuches. « Ça a été très long d’un point de vue juridique, soupire Azzouz Aïb. Pour être franc, certaines personnes n’étaient pas vraiment favorables au fait de voir du rugby sur le sol algérien. Durant ces dix années, on a rencontré des personnes formidables mais on a aussi rencontré des personnes qui nous ont mis des bâtons dans les roues ».

« Le sport du colonisateur »

Si Azzouz Aïb pointe du doigt un mélange de méconnaissance et de jalousie, Khaled Kahlouchi, capitaine actuel de l’équipe nationale a une autre explication. « C’était un sport inconnu tout d’abord, souligne le troisième ligne. Lorsque j’en parlais à ma famille, il trouvait ça violent. Et enfin, je pense que c’était quand même un peu perçu comme le sport du colonisateur. Un sport que des joueurs nés en France et formés en France, pour la plupart, voulaient ramener en Algérie ».

Pendant plusieurs années, au sein des ministères et des institutions sportives nationales, les portes s’ouvrent et se ferment sans cesse devant la petite troupe d’amis. Au point de parfois leur donner envie de tout plaquer. « Oui, c’est arrivé, lâche Azzouz Aïb, la voix presque éteinte. C’est arrivé une ou deux fois où c’était vraiment compliqué. Mais la passion nous a rattrapées. Et puis on s’est dit qu’on n’avait pas fait tout ça pour rien ».

Algérie : les Fennecs du rugby en quête de reconnaissance (Reportage de France 24)

Un autre coup dur intervient en juin 2015, en Malaisie. Alors que la sélection algérienne dispute une de ses premières compétitions officielles, la finale face à la sélection malaisienne tourne au vinaigre, suite à plusieurs décisions arbitrales. Les baffes pleuvent et des chaises volent même pendant quelques minutes. « Pendant huit ans, on n’avait jamais eu le moindre problème, tempère Azzouz Aïb. Mais c’est vrai que juste après cet événement, on s’est posé beaucoup de questions. On s’est dit qu’on allait peut-être être pris pour des voyous ». D’autant que l’incident est (pour une fois) largement relayé par la presse algérienne et même internationale. « On n’est pas fiers de cette bagarre mais elle nous a permis d’exister un peu plus médiatiquement. Beaucoup de personnes ne savaient pas qu'il y avait du rugby en Algérie. Mais ce type d’incident ne se reproduira plus et ce n’est pas l’image qu’on veut donner aux enfants qui pratiquent le rugby. »

Développer le rugby sur le territoire algérien

Lentement mais surement, ces nouveaux pionniers du rugby tissent un réseau sur le territoire algérien, en attendant une reconnaissance officielle qui interviendra en 2015. Un championnat national se crée donc, des compétitions de jeunes et des sections féminines voient également le jour. « Notre priorité, c’est le développement du rugby sur le territoire algérien, les enfants, la formation et les éducateurs, explique Azzouz Aïb. Le deuxième volet de notre projet, c’est de bâtir une équipe nationale qui est, pour le moment, essentiellement composée de joueurs qui évoluent à l’étranger – en France, en Angleterre ou en Nouvelle-Zélande – et qui ont tous un passeport algérien. Ça nous permet de faire la promotion du rugby avec une équipe nationale dont le niveau est plus que correct ». En attendant que les joueurs formés localement prennent le relais.

Le 17 décembre 2016, Khaled Kahlouchi et ses partenaires ont vu leurs efforts récompensés. Le XV national dispute son premier match officiel sur le sol algérien. Une défaite 11-12 face au Maroc, en Tri-Nations. La rencontre provoque tout de même un tourbillon d’émotions et de larmes chez les joueurs et les membres de la Fédération. « C’est surtout dû au fait qu’on pense à nos familles qui sont en Algérie, à nos parents et à nos grands-parents », explique Kahlouchi. « Entendre l’hymne national, voir ce ballon de rugby, des enfants et des femmes dans le stade... », s’émeut de son côté Azzouz Aïb.

Gagner la Coupe d’Afrique et disputer la Coupe du monde

Grâce au soutien de Mustapha Berraf, président du Comité Olympique et Sportif Algérien, à celui du ministre des Sports algérien El Hadi Ould Ali ou à l’appui du président de la confédération africaine de rugby (Rugby Afrique), le Marocain  Abdelaziz Bougja, le rugby algérien a désormais une Fédération et un siège inauguré le 24 février 2017 à Alger.

Reste donc à briller sur les terrains. « On ne veut plus perdre du temps. On veut obtenir des résultats tout de suite, lance Khaled Kahlouchi au sujet de la Bronze Africa Cup, la 3e division de la Coupe d’Afrique. Ce sera ma dernière aventure. Mais je me suis toujours dit qu’il faudrait que je la dispute avant de quitter ce groupe ».

« Disputer pour la première fois une grande compétition internationale comme celle-là, c’est un peu comme gagner au loto, ajoute Azzouz Aïb. Pour nous, c’est une grande fierté. C’est un peu le bout du tunnel. Ce serait difficile d’expliquer tout ce qui s’est passé parce que dix ans c’est très long. On a vécu des moments exceptionnels mais aussi des moments très difficiles ». Et de conclure : « On a beaucoup d’ambitions. On veut être la première équipe arabe à disputer la Coupe du monde. On se laisse entre six et dix ans pour accomplir ce rêve. […] On a travaillé d’arrache-pied pendant dix ans, il ne faut pas que ce soit pour rien. Il faut prouver aux gens que l’Algérie a une vraie équipe de rugby et qu’on peut faire partie des quarante meilleures nations mondiales. »

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