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Liban

Liban: nouveaux affrontements à Beyrouth entre manifestants et forces de l'ordre

De nouveaux heurts ont opposé, dans la nuit de dimanche à lundi, des manifestants libanais aux forces de l'ordre, près du Parlement à Beyrouth, au lendemain d'autres violents affrontements ayant blessé des dizaines de personnes dans la capitale libanaise.

Affrontements dans le centre-ville de Beyrouth, le 15 décembre 2019.
Affrontements dans le centre-ville de Beyrouth, le 15 décembre 2019. ANWAR AMRO / AFP
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Le calme est revenu progressivement aux premières lueurs de l’aube, ce lundi 16 décembre, dans le centre de la capitale libanaise, indique notre correspondant à Beyrouth, Paul Khalifeh. Tout a commencé lorsque des manifestants ont lancé des pétards, des pierres et des bouteilles d’eau sur des policiers qui bloquaient une route menant au Parlement. En l’espace de quelques minutes, le centre-ville de Beyrouth, enveloppé dans un épais nuage de gaz lacrymogène, s’est transformé en champ de bataille.

Violence inouïe

La police anti-émeute a utilisé des canons à eaux pour disperser des groupes de manifestants qui ont brisé les devantures des boutiques, arraché des arbres, et détruit les parcmètres. Des scènes d’une violence inouïe que les Libanais ont suivi en direct sur toutes les télévisions. Après des heures d’efforts, la police a réussi à éloigner les protestataires du périmètre du Parlement. Mais la situation a failli dégénérer lorsque des habitants de quartiers environnants, considérés comme des fiefs du Hezbollah et du mouvement Amal chiite, ont commencé à se rassembler pour en découdre avec les manifestants au prétexte qu’ils insultaient leurs chefs.

Devant la gravité de la situation, l’armée libanaise a acheminé de très importants renforts. Des soldats en tenue de combat ont repoussé et séparé les manifestants des deux bords, avant de boucler tout le centre de Beyrouth.

Il faut que ces consultations aient lieu, et qu’ils nous donnent au moins un nom de premier ministre qui ne soit pas refusé par la rue. Mais je crois que c’est celui de Saad Hariri qui va émerger. Alors, nous fermerons les rues, encore et encore.

01:26

«Les forces du pouvoir nous frappent. Mais ce dimanche, on a exprimé notre réaction à cette violence : on est descendus plus nombreux, et plus forts que la veille»

Laure Stephan

À la veille de consultations parlementaires pour nommer un nouveau chef de gouvernement, les contestataires - qui réclament un cabinet composé de technocrates et d'indépendants - refusent une possible reconduction à son poste de M. Hariri, qui a démissionné le 29 octobre sous la pression de la rue.

Les principaux leaders politiques semblent encore totalement autistes... Ils ne comprennent pas l'ampleur de ce mouvement de colère...

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Karim Emile Bitar, professeur de Relations internationales à l'Université Saint-Joseph de Beyrouth.

Nicolas Falez

Lundi sera « le moment de la vérité », a estimé sur Twitter le coordinateur spécial de l'ONU pour le Liban, Jan Kubis. « Soit les politiciens montreront (...) qu'ils comprennent les besoins du Liban (...) soit ils resteront prisonniers de leurs habitudes. »

Samedi soir, durant d'autres manifestations, des dizaines de personnes ont été blessées à Beyrouth, les forces de sécurité ayant fait usage de gaz lacrymogènes et de balles en caoutchouc. Ces heurts sont « honteux, parce que nous sommes pacifiques », s'est indignée auprès de l'AFP, Nour, une manifestante.

Un photographe de l'AFP a alors vu des hommes en civil matraquer des manifestants. La police anti-émeute a tiré des balles en caoutchouc et les manifestants ont jeté des pierres, selon la même source. Selon la défense civile, 36 personnes ont été hospitalisées et 54 autres soignées sur place.

À lire aussi : Manifestations au Liban: Beyrouth comme un champ de bataille

La Croix-Rouge libanaise a dit avoir transporté 15 blessés vers des hôpitaux et soigné 37 personnes sur place, selon un bilan donné à l'AFP. Les blessés étaient des civils, mais aussi des membres des forces de sécurité.

Les Forces de sécurité intérieure ont évoqué, quant à elles, dimanche sur Twitter une vingtaine de blessés dans leurs rangs, évacués vers des hôpitaux, et d'autres soignés sur place.

Au lendemain de ces violences, le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian a appelé sur la radio France Inter « les autorités politiques » libanaises à « se secouer », estimant que le pays se trouvait « dans une situation dramatique ».

Multiplication des accrochages

Ces heurts du weekend des 14 et 15 décembre sont les plus significatifs depuis le début de la mobilisation, qui s'est globalement déroulée dans le calme. Les accrochages se sont récemment multipliés et les forces de sécurité ont plusieurs fois eu recours à la force.

La ministre de l'Intérieur Raya el-Hassan a réclamé dimanche aux Forces de sécurité intérieure l'ouverture d'une enquête « rapide et transparente » pour déterminer les responsabilités dans les violences.

Elle a évoqué la présence de personnes « infiltrées » et alerté les manifestants sur « des parties » qui tenteraient d'« instrumentaliser » les rassemblements pour provoquer une « confrontation » avec les forces de l'ordre.

Le chef des Forces de sécurité intérieure, Imad Othman, a appelé les manifestants à la retenue. « Nous devons tous être pacifiques », a-t-il dit.

Sur Twitter, Diala Haidar, de l'ONG Amnesty International, a dénoncé un « usage excessif de la force » par les forces de sécurité, évoquant la présence d'hommes en civil, parfois masqués, attaquant les manifestants.

Des réformes en « urgence »

Jusqu'à présent, les principaux partis du Liban n'ont pas réussi à s'entendre sur le successeur de M. Hariri qui continue de gérer les affaires courantes avec son gouvernement.

Car si le système politique du Liban doit garantir l'équilibre entre les différentes communautés religieuses, il ouvre la voie à des tractations interminables. La formation du nouveau cabinet pourrait donc s'éterniser, dans un pays économiquement au bord du gouffre.

Réunis mercredi à Paris, les principaux soutiens internationaux du Liban, dont la France ou encore les Émirats arabes unis et les États-Unis, ont conditionné toute aide financière à la mise en place d'un gouvernement « efficace et crédible », qui engagerait rapidement des réformes « d'urgence ».

La Banque mondiale prévoit une récession économique pour 2019 avec un taux de croissance négatif qui dépasserait les -0,2%. Environ un tiers des Libanais vivent sous le seuil de pauvreté, selon l'organisation.

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