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Syrie

Syrie: la reprise d'Alep, une joie pour les uns et le désarroi pour les autres

L’armée syrienne a annoncé, jeudi 22 décembre 2016 en soirée, avoir repris le contrôle total d'Alep, remportant sa plus grande victoire face aux rebelles depuis le début de la guerre, en 2011. Quelque 30 000 personnes, dont 8 000 combattants, ont été évacuées en une semaine, sous la supervision d’une trentaine d’observateurs des Nations unies et de dizaines de volontaires du Croissant-Rouge syrien et de la Croix-Rouge internationale.

Des personnes évacuées vers les bastions restés sous contrôle rebelle dans la province d'Alep, le 22 décembre 2016.
Des personnes évacuées vers les bastions restés sous contrôle rebelle dans la province d'Alep, le 22 décembre 2016. REUTERS/Ammar Abdullah
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C'est officiel : après une dernière offensive de 10 jours, Alep est tombée. La ville est désormais sous le contrôle de l'armée syrienne, soutenue par la Russie et l'Iran. C'est la plus grande victoire de Bachar el-Assad depuis le début du conflit.

Cette nouvelle donne, le retour de la deuxième ville de Syrie dans le giron du régime de Damas, a été accueillie dans la joie par les partisans du gouvernement, et dans la consternation à travers les régions encore contrôlées par les rebelles.

Notre correspondant régional, Paul Khalifeh, relate que des scènes de liesse ont éclaté dans les quartiers ouest d’Alep, où vivent 1,2 million de personnes, dès l’annonce officielle de la réunification de la cité, restée divisée pendant quatre ans.

Des milliers de personnes, brandissant des drapeaux syriens, russes ou du Hezbollah libanais, ainsi que des portraits du président Bachar el-Assad, se sont rassemblées sur les places publiques, et des des cortèges de voitures ont sillonné les rues. Des tirs de joie ont accompagné ces célébrations, qui ont duré une partie de la nuit.

Des Syriens dans les rues d'Alep jeudi 22 décembre pour célébrer la reprise en main de la ville pour le régime Assad.
Des Syriens dans les rues d'Alep jeudi 22 décembre pour célébrer la reprise en main de la ville pour le régime Assad. George OURFALIAN / AFP

Le bonheur des uns, le malheur des autres

A l’inverse, dans les régions contrôlées par les insurgés, à l’ouest d'Alep, où les nouveaux réfugiés étaient accueillis, l’amertume et la tristesse se lisaient sur tous les visages. Des chefs rebelles ont qualifié la défaite d’Alep de grande perte politique et territoriale.

« Pour la révolution, c'est une période de recul et un tournant difficile », a déclaré Yasser al-Youssef, de Nourredine Zinki, un groupe qui était parmi les plus influents à Alep-Est.

L’Armée syrienne a interdit l’accès à l’ancien fief des rebelles aux habitants des autres quartiers. Le réduit de 3 km2 doit être d’abord ratissé et déminé. Mais déjà, des bulldozers ont commencé à enlever les barricades et les remblais de terre, qui marquaient la ligne de front.

Le drapeau syrien a été hissé sur les bâtiments publics, au milieu d’immeubles éventrés et de rues dévastées. L'est d'Alep, l'une des plus vieilles villes au monde, n'est plus qu'un tas de ruines. La chute du bastion rebelle met fin à des mois de bombardements intensifs. Depuis l'été dernier, le siège affamait la population.

Un combattant rebelle marchant arme à la main vers les bastions de la province d'Alep restés sous contrôle des insurgés, le 22 décembre 2016.
Un combattant rebelle marchant arme à la main vers les bastions de la province d'Alep restés sous contrôle des insurgés, le 22 décembre 2016. REUTERS/Ammar Abdullah

Une victoire stratégique pour Assad

Au total, 34 000 personnes, civils et combattants, ont été évacuées de la partie est d'Alep en une semaine, selon les chiffres délivrés par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

Jeudi soir, encore 150 personnes ont pris place à bord d'un convoi en direction d'al-Rashidin, au sud-ouest de la ville, en zone contrôlée par les insurgés. Tandis que dans l'autre sens se poursuivait l'évacuation des villages chiites pro-gouvernementaux de Foua et Kefraya.

La victoire est éminemment stratégique pour le régime. Elle « achève la reprise en main de la quasi-totalité des grands centres urbains, qui vont d'Alep au nord jusqu'à Damas, en passant par Hama et Homs », explique David Rigoulet-Roze, rédacteur en chef de la revue Orient stratégique.

C'est donc aussi une lourde défaite pour l'opposition, qui n'a pas été soutenue par ses alliés avec la même intensité que l'armée loyaliste qui, pour sa part, a bénéficié d'un « soutien sans faille de ses sponsors » à la fois iraniens et russes, ajoute David Rigoulet-Roze.

L'administration américaine, qui pouvait soutenir une partie de la rébellion dite «modérée», est en fin de mandat. Donc, elle a refusé d'aller plus avant par rapport à l'engagement russe. Et puis, les pétromonarchies se sont retrouvées dans une posture un peu compliquée, par rapport à la Turquie, qui avait des intérêts à faire prévaloir qui ne coïncidaient plus forcément avec une solidarité sunnite

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David Rigoulet-Roze, rédacteur en chef de la revue Orient stratégique

Daniel Vallot

En dehors d'Alep, 15 autres sièges en cours

Une trentaine d'observateurs de l'ONU sont encore à Alep-Est pour superviser la phase finale des évacuations de civils et de combattants. Les évacuations doivent se poursuivre et s'achever dans les prochains jours, sauf incident majeur.

Les Nations Unies se félicitent de l'achèvement de ces évacuations. Mais elles s'inquiètent pour les autres localités toujours assiégées en Syrie. Dans ces localités, la situation humanitaire reste d'autant plus dramatique que les convois d'aide n'y sont quasiment jamais autorisés.

« Il y a 15 zones assiégées en dehors d'Alep-Est. Et la situation ne s'est pas améliorée dans ces zones, parce que tous les yeux étaient braqués sur Alep », explique Jan Egeland, chef du groupe de travail de l'ONU sur l'aide humanitaire en Syrie.

« Un seul convoi a pu atteindre l'une de ces zones assiégées, un village de réfugiés palestiniens situés au sud-ouest de Damas. Six mille personnes ont enfin pu y recevoir de l'aide en décembre », ajoute M. Egeland.

Dans les autres zones, aucune aide n'a été acheminée depuis le début du mois, et le mois de novembre a lui aussi été très mauvais de ce point de vue. Ainsi, en 2017, il faut que les bureaucrates, les combattants et les forces de sécurité cessent d'empêcher l'aide de parvenir à des civils qui sont épuisés, affamés et désespérés

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Jan Egeland, chef du groupe de travail de l'ONU sur l'aide humanitaire en Syrie

Sami Boukhelifa

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