Accéder au contenu principal
Musique

Moune de Rivel, étoile de la chanson créole, aurait eu 100 ans cette année

Depuis le 7 janvier, le centième anniversaire de la naissance de Moune de Rivel (1918–2014) est célébré en Guadeloupe à l'initiative de la chanteuse Winny Kaona et à Paris par plusieurs associations antillaises.

La chanteuse guadeloupéenne Moune de Rivel (1918-2014).
La chanteuse guadeloupéenne Moune de Rivel (1918-2014). Fofo Forey Fumey
Publicité

Cécile Jean-Louis, dite Moune de Rivel, est née à Bordeaux, de parents originaires de Saint-Anne en Guadeloupe. Elle est la fille de Fernande de Virel, pianiste et violoniste diplômée du Conservatoire de Paris en 1902, et de Henri Jean-Louis Jeune, dit Jean-Louis Baghio'o (1874-1958), premier magistrat noir des Antilles.

Moune de Rivel, compositeure, interprète, guitariste, pianiste, est une excellente musicienne. Enfant, elle apprend la musique et baigne dans un milieu culturel. Parmi les amis de la famille figurent des artistes connus comme Léona Gabriel ou Stellio et Archange Saint-Hilaire.

Elle commence sa longue carrière à l’âge de 15 ans. A Paris, elle chante dans le quartier de Montparnasse, haut lieu de la vie culturelle. Peu avant la fin de la Seconde Guerre mondiale, elle assure l'ouverture du nouveau cabaret, « La Canne à Sucre », qui devient la vitrine des Antilles dans la capitale française. L’on y retrouve tous les grands orchestres de biguine ou de mazurka...

Ambassadrice des Antilles

Repérée par un agent artistique américain, la talentueuse Moune de Rivel quitte Paris pour les Etats-Unis à l’âge de 28 ans. La Guadeloupéenne est engagée au célèbre café Society de New York. Elle rencontre et joue avec des musiciens afro-américains de renom parmi lesquels Eron Bridgers et Erold Garner. Elle épouse le jazzman Ellis Larkins.

Après deux ans de vie aux Etats-Unis, elle décide de rentrer à Paris. Elle reprend ses activités artistiques et enchaîne les tournées en Europe et en Afrique pour faire connaître la musique antillaise. Dans les années 1960, elle ouvre un cabaret sur les Champs-Elysées : Le Perroquet du nid.

Elle écrit plus d’une centaine de chansons. La voix de Moune séduit. L’Office de radiodiffusion-télévision française (ORTF) l’engage pour animer des émissions radiophoniques de 1961 à 1974, telles que « Charmes de Paris » et « Regards sur les îles ». Dans ses émissions, elle n’hésite pas à aborder l'histoire des Antilles et de l'Afrique.

05:57

Ecoutez un extrait de l’émission de Moune de Rivel «Regards sur les îles», (ORTF), où elle reçoit Victor Sablé, avocat et homme politique martiniquais. Il a été député de la Martinique de 1958 à 1986.

Eric Amiens

Très jeune, elle a accompagné son père, Jean-Louis Baghio'o, au domicile de l’écrivain guyanais René Maran, lauréat du prix Goncourt en 1921, qui réunissait régulièrement des écrivains antillais et africains pour débattre de littérature et de culture et réfléchir aux sujets liés à la situation des Noirs à travers le monde.

Adhérent au concept de la « négritude » développé par Aimé Césaire, Léon Gontran Damas et Léopold Sédar Senghor, Moune de Rivel participe en 1956, à Paris, au premier « Congrès des écrivains et artistes noirs », à la Sorbonne, aux côtés de nombreuses personnalités telles que Alioune Diop, Aimé Césaire, Frantz Fanon, Edouard Glissant, Paul Niger, Richard Wright, Amadou Hampâté Bâ, James Baldwin, Joséphine Baker….

Passionnée d’Afrique

Moune de Rivel est solidaire des mouvements de décolonisation des pays africains. Sa famille est très attachée au continent. Son père était un panafricaniste qui souhaitait pour le continent une « Union arabe et noire ». Il était également partisan d’une « République des Antilles ». Il a été en 1923 président du tribunal de première instance de Brazzaville et substitut du procureur général.

Son engagement pour la cause de peuples noirs dérange les autorités coloniales. Muté à Madagascar, il démissionne de ses fonctions pour devenir simple avocat au barreau de Brazzaville de 1926 à 1931. Le frère de Moune de Rivel, Victor Jean Louis Baghio’o, ingénieur et directeur technique à la Radiodiffusion française puis à l'Office de coopération radiophonique (OCORA) a contribué à la création des radios africaines au Burundi, au Cameroun, au Congo, en Haute-Volta et au Sénégal..

Il sera même l’un des premiers directeurs de la première radio publique de Haute-Volta, l'actuel Burkina Faso, à l’accession à l’indépendance de cette nouvelle république. Moune de Rivel a d'ailleurs interprété deux chansons en honneur de la Haute-Volta : Ouagadougou et Bobo-Dioulasso.

Durant de nombreuses années, Moune de Rivel a écrit des chroniques dans le journal panafricain Bingo. Dans une rubrique intitulée « Madame Afrique », elle y a réconforté et conseillé les lecteurs du journal.

Moune de Rivel est appréciée pour son talent de musicienne mais aussi pour sa beauté, elle participe comme comédienne au tournage de plusieurs films, parmi lesquels Night-Club Room, L’Atlantide, La Belle et le Truand... Elle a joué aux côtés d’acteurs comme Alain Delon, Claudia Cardinale, Jean Marais et Jean-Louis Trintignant.

Moune de Rivel crée à Paris, en 1995, un conservatoire de musique traditionnelle créole « Mizik an nou ». En 1997, elle a été nommée, en France, Chevalier des Arts et des Lettres. Malade et atteinte de la maladie d'Alzheimer, la grande voix guadeloupéenne s’éteint le 27 mars 2014 à l’âge de 96 ans. Elle repose désormais au cimetière du Montparnasse, à Paris.

Ecoutez Moun de Rivel interpreter une chanson traditionnelle haïtienne, « Choucoune » :

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI

Partager :
Page non trouvée

Le contenu auquel vous tentez d'accéder n'existe pas ou n'est plus disponible.