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France / Social

Taxes: nouveau recul de Macron mais des «gilets jaunes» toujours remontés

L'Elysée a annoncé, le 5 décembre au soir, que la hausse des carburants était finalement annulée pour 2019. Initialement, cette augmentation était seulement gelée pour six mois. Emmanuel Macron recule d'un pas supplémentaire et prend tout le monde de court dans son camp, à commencer par son Premier ministre. Un geste encore insuffisant pour nombre de « gilets jaunes ».

Slogan écrit sur le dos de ce «gilet jaune»: «Qui sème la misère récolte la colère».
Slogan écrit sur le dos de ce «gilet jaune»: «Qui sème la misère récolte la colère». Reuters/Pascal Rossignol
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L'annonce de l'annulation de la hausse de la taxe sur les carburants pour 2019 est tombée un peu après 20h, le 5 décembre au soir. Edouard Philippe était encore à la tribune de l'Assemblée nationale, en train de défendre les mesures du gouvernement pour sortir de la crise. En fait, l'Elysée a changé de ligne, sans en informer à l'avance le Premier ministre. Et c'est finalement le ministre de la Transition écologique, François de Rugy, qui a confirmé sur BFMTV l'annulation pure et simple de la taxe carbone dans la soirée.

Pourtant quelques heures plus tôt, le Premier ministre ne parlait que de la « suspension » des taxes. N'évoquant seulement qu'un éventuel abandon si aucune solution n'était trouvée au bout des six mois de concertation ; et sans convraincre un hémicycle surchauffé, ni les « gilets jaunes ». Emmanuel Macron a donc voulu aller plus loin, quitte à corriger publiquement le chef du gouvernement.

Edouard Philippe en première ligne

Un humiliation pour Edouard Philippe qui est en première ligne. Depuis plus d'une semaine, il prend, seul, les coups de l'opposition et maintenant, il doit digérer le désaveu du président. Du coup, l'Elysée et Matignon ont tenté d'éteindre le début d'incendie : l'annulation a été décidée « de concert » par le président et le Premier ministre, affirme l'entourage du chef de l'Etat. Mais le mal est fait. Edouard Philippe est plus que jamais fragilisé.

Avec ce nouveau recul, Emmanuel Macron espère faire baisser la tension à deux jours d'une nouvelle mobilisation des « gilets jaunes ». Surtout que l'Elysée s'attend à « une très grande violence » pour ce troisième samedi de manifestation. L'exécutif a multiplié hier les appels au calme. Et compte s'appuyer dorénavant sur les corps intermédiaires. Les syndicats se réunissent d'ailleurs aujourd'hui. Mais le président français continuera de garder le silence, et ne parlera pas avant de voir comment se déroulent les manifestations de samedi. En attendant, c'est encore Edouard Philippe qui sera exposé. Il enchaîne cet après-midi avec un autre débat au Sénat.

Sur un rond-point à Sainte-Eulalie non loin de Bordeaux (France), le 5 décembre 2018.
Sur un rond-point à Sainte-Eulalie non loin de Bordeaux (France), le 5 décembre 2018. REUTERS/Regis Duvignau

La colère des « gilets jaunes » ne faiblit pas

La volte-face de l'exécutif sur la taxation des carburants n'y change rien, la colère des gilets jaunes ne faiblit pas. Partout en France, les appels à se mobiliser une nouvelle fois le samedi 8 décembre pour l'acte IV se multiplient, et le mouvement semble même se durcir. Les mots d'ordre sur les réseaux sociaux en disent long : « Dissolution de l'Assemblée nationale », « Pot de départ de Macron ou encore Tous à la Bastille » peut-on lire ce matin sur les pages Facebook des « gilets jaunes ».

De nombreux sympathisants du mouvement disent vouloir monter à Paris samedi, et le gouvernement redoute une nouvelle explosion de violences et une extension de cette colère à d'autres secteurs : tel le monde agricole, le transport routier ou les lycéens. Le mouvement profite toujours du soutien de l'opinion publique: 72% des Français approuvent la mobilisation et près de huit français sur dix estiment que les annonces du gouvernement ne répondent pas aux attentes exprimées.

A Monistrol-sur-Loire, au sud de Saint-Etienne, les « gilets jaunes » bloquent l'accès à un supermarché : « Ils nous prennent vraiment pour des imbéciles, explique cette manifestante à RFI. Non, on est révoltés à fond ! Je trouve que c’est dommage, ils auraient pu mettre un grand coup, les augmentations de salaire et tout ça. Je pense que l’on est assez intelligents, les gilets jaunes. C’est juste le pouvoir d’achat, je pense. On n’en peut plus de payer toutes ces taxes. Ils augmentent les salaires et c’est bon, on débloque. On est assez intelligents. L’écologie ? Ils parlent d’écologie, ils mettent ça sur l’écologie. Il n’y a pas de problème, on la veut tous l’écologie. Tous, une planète verte ! Augmenter les salaires, c’est tout ! Arrêtez de nous prendre pour des imbéciles. »

Enfin, les « gilets jaunes » entendent ouvrir un nouveau front : judiciaire cette fois, certains ont saisi des avocats. Ces derniers doivent ce matin annoncer le dépôt de plaintes de manifestants blessés par les tirs de grenades assourdissantes lancées par les forces de l'ordre. L'opposition dans la rue et devant les tribunaux risque donc de s'intensifier.


 ■ A l'Assemblée, haro sur le président

Neuf jours sans un mot, neuf jours que le chef de l’Etat laisse son Premier ministre monter au front et prendre les coups. Pour Christian Jacob, le patron des députés Les Républicains, la crise continuera tant qu’Emmanuel Macron gardera le silence : « C’est à lui et lui seul qu’incombe la responsabilité de la crise. C’est donc lui et lui seul qui doit proposer une sortie de crise. Sa responsabilité est historique. En a-t-il seulement conscience ? »

Marine Le Pen, la patronne du Rassemblement nationale, lance un appel au président : « Ne vous cachez pas à l’Elysée. Ne demandez pas à d’autres de faire ce que les Français attendent de vous car la parole du président de la République serait très certainement susceptible de calmer la situation si tentez qu’il vienne évidemment leurs dire qu’il ne les a pas seulement écoutés, mais qu’il les a également entendus. »

Un an et demi après l’élection d’Emmanuel Macron, les opposants au chef de l’Etat en ont profité pour faire le procès du macronisme à l’image d’Olivier Faure, le chef du Parti socialiste : « Jupiter, c’est fini. Les valeurs de la République reprennent leur place. La République, elle est vivante. Elle est aujourd’hui dans la rue. Ces enfants vous demandent justice. »

Emmanuel Macron, qui ne s'est pas exprimé publiquement depuis son retour du G20 dimanche dernier, n'a pas prévu de prendre la parole avant samedi « inclus », date d'une nouvelle mobilisation des « gilets jaunes » dans la rue, a-t-on indiqué jeudi dans son entourage.

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