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France - Mode - Fashion Week

Fashion Week: quand la mode s’engage

Après New York, Londres et Milan, commence ce lundi 24 septembre la Fashion Week parisienne. Au-delà de présenter les collections printemps-été 2019, cette saison de défilés est marquée par l’engagement des créateurs. Entre militantisme sincère et parfois une dose d’opportunisme, les acteurs de la mode n’ont plus peur de s’exprimer sur des sujets de société.

Le défilé Pyer Moss, la marque du jeune styliste newyorkais, Kerby Jean-Raymond, lors de la Fashion Week de New York, le 8 septembre 2018.
Le défilé Pyer Moss, la marque du jeune styliste newyorkais, Kerby Jean-Raymond, lors de la Fashion Week de New York, le 8 septembre 2018. ©Angela Weiss/AFP
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Le phénomène n’est pas nouveau. De la Britannique Katharine Hamnett, qui portait un t-shirt avec un slogan antimissile lors de sa rencontre avec Margaret Thatcher en 1984, à Karl Lagerfeld, qui terminait son défilé couture de la maison Chanel en 2012 avec deux femmes mariées accompagnées d’un enfant, alors que la France se déchirait sur la légalisation du mariage pour tous, nombreux sont les designers qui se sont emparés de la mode pour s’exprimer sur des sujets politiques. Mais cette saison de défilés qui s’achève à Paris s’annonce plus militante que jamais.

A New York, les bonnes causes étaient au rendez-vous. Si l’année dernière les sujets en vogue étaient la politique migratoire de Donald Trump ou les revendications féministes, cette saison la diversité et l’inclusion semblaient être les thèmes de prédilection sur les podiums, comme l’a montré la marque Opening Ceremony, qui a transformé son défilé en show de drag-queens.

La marque Opening Ceremony a transformé son défilé en show de drag-queen à New York, le 8 septembre 2018.
La marque Opening Ceremony a transformé son défilé en show de drag-queen à New York, le 8 septembre 2018. ©Fernanda Calfat/Getty Images/AFP

Dans cette mouvance, les mannequins deviennent aussi des symboles de l’acceptation des différences dans la mode, et font le tour des Fashion Weeks. Comme Winnie Harlow, qui défilait pour LaQuan Smith à New York, Natasha Zinko à Londres ou encore Fendi à Milan. La jeune femme, atteinte de vitiligo, vient d’ailleurs de signer un contrat pour intégrer l’équipe des « angels » de la marque de lingerie Victoria's Secret, l’un des événements les plus médiatisés de l’industrie de la mode.

le mannequin, Winnie Harlow avant le défilé de Natasha Zinko, durant la Fashion Week de Londres, le 18 septembre 2018. Elle a également défilé à New York et à Milan, et vient de signer un contrat avec la maque de lingerie Victoria's Secret.
le mannequin, Winnie Harlow avant le défilé de Natasha Zinko, durant la Fashion Week de Londres, le 18 septembre 2018. Elle a également défilé à New York et à Milan, et vient de signer un contrat avec la maque de lingerie Victoria's Secret. ©REUTERS/Henry Nicholls

Sur les pas des ancêtres africains

Très engagé, Kerby Jean-Raymond s’est fait aussi remarquer à New York avec un défilé au Weeksville Heritage Center. Le quartier, lieu emblématique des premiers Afro-Américains libres après la fin de l’esclavage, a été l’endroit choisi par le créateur d’origine haïtienne pour présenter la collection « American, Also : Lesson 2 ».

Sur le podium, il y avait des références historiques – comme «The Negro Motorist Green Book », un guide de voyage datée des années 30, qui référençait les lieux considérés sûrs pour les Noirs –, mais aussi des clins d’œil à des événements actuels, comme les t-shirts « Stop calling 911 on the culture », allusion directe aux nombreux coups de fil racistes passés à la police cet été pour « dénoncer » des Noirs. Rythmé par une chorale gospel, le défilé de sa marque Pyer Moss a été l’un des plus applaudis parmi les jeunes créateurs new-yorkais.

Le t-shirt « Stop calling 911 on the culture », lors du défilé Pyer Moss, la marque du styliste très engagé Kerby Jean-Raymond lors de la Fashion Week de New York, le 8 septembre 2018.
Le t-shirt « Stop calling 911 on the culture », lors du défilé Pyer Moss, la marque du styliste très engagé Kerby Jean-Raymond lors de la Fashion Week de New York, le 8 septembre 2018. ©Theo Wargo/Getty Images/AFP

Londres boycotte la fourrure

Chez les Londoniens, la cible était la fourrure. Avant même le démarrage du marathon des défilés, le British Fashion Council (BFC), qui organise l’événement, annonçait « Qu’aucune fourrure d'animal ne serait utilisée à la Fashion Week de Londres ». Les dernières saisons de défilés au Royaume-Uni avaient été marquées par plusieurs manifestations de militants pour les droits des animaux, notamment ceux de l'association de protection des droits des animaux PETA, qui a salué l’annonce du BFC.

Une militante pour les droits des animaux proteste dans une rue de Londres lors de la Fashion Week, le 15 septembre 2018 avec ecrit sur sa pancarte : «Je préfère être nue que porter de la fourrure».
Une militante pour les droits des animaux proteste dans une rue de Londres lors de la Fashion Week, le 15 septembre 2018 avec ecrit sur sa pancarte : «Je préfère être nue que porter de la fourrure». ©REUTERS/Hannah McKay

Cette tendance prend de l’ampleur depuis quelque temps. La marque britannique Burberry, ainsi que l’italienne Gucci ou encore les américaines Michael Kors et Ralph Lauren avaient annoncé récemment qu’elles allaient bannir la fourrure.

Milan plus verte que jamais

En Italie, la mode était surtout au vert. Notamment avec l’organisation du Green Carpet Fashion Awards, une sorte d’oscars éco-responsables qui récompensent dans une cérémonie de remise à la Scala de Milan, les entreprises du secteur ayant une posture écologiquement correcte.

Lors de la conférence de presse pour cette deuxième édition du Green Carpet, Carlo Capasa, le président de la Camera Nazionale della Moda Italiana, expliquait que ce prix « montre que l'industrie de la mode de luxe, définie par le Made in Italy, est à la proue d'un réveil mondial du développement durable ». Une façon à la fois de mettre en avant l’industrie locale, qui se revendique comme étant respectueuse de l’environnement, et être dans l’air du temps.

La mode milanaise semble avoir pris conscience de la dimension polluante de l’industrie textile et tente de se racheter. Au risque d’être accusée parfois de pratiquer le greenwashing, nom donné aux actions de marketing qui consistent à dépenser dans des opérations de communication pour « nettoyer son image ».

Risque d’instrumentalisation

Paris clôture la saison et on s’y attend déjà à des défilés chargés de discours politiques. Certains disent que ce militantisme fashion répond à un changement de comportement des consommateurs, surtout les « millennials », qui seraient très sensibles à l’engagement des marques. Rien d’étonnant à l’ère des réseaux sociaux, où les paroles se libèrent dans presque tous les domaines. Mais il y a aussi ceux qui y voient une forme d’instrumentalisation des sujets à la mode.

Quand Dior a défilé des t-shirts avec le message « We all should be feminist » en septembre 2016, la marque a été pointée du doigt par certains dans les coulisses de la Fashion Week, qui criaient au coup de marketing de la part de la créatrice Maria Grazia Chiuri, qui faisait ses débuts à la maison de l’Avenue Montaigne. Cependant, la marque a montré, grâce à plusieurs actions par la suite, qui l’appropriation du manifeste de l'auteure nigériane Chimamanda Ngozi Adichie était juste la pointe de l’iceberg d’une stratégie plus large, qui visait mettre en avant les femmes, y compris avec des programmes de valorisation de ses propres employées.

Mais la mode est faite de cycles et il est difficile de savoir combien de temps cette mouvance engagée va durer. Serait-elle pérenne ou balayée dans quelques saisons, comme le minimalisme et le normcore remplacés par la logomanie, qui est de retour ? Une chose est sûre : cette tendance n’est pas pour déplaire Katharine Hamnett. A l’âge de 71 ans et toujours militante, la créatrice qui a fait rire jaune la « Dame de fer » dans les années 1980 refait surface avec ses t-shirts à message. Mais cette fois, sa cible principale est la lutte contre le Brexit et la défense de réfugiés. C’est ce qu’on appelle vivre avec son temps.

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