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France

France: polémique autour d’une fête célébrant la vertu des jeunes filles

Couronner une jeune femme avec des roses pour célébrer « sa vertu », sa bonté et sa jeunesse. Voilà le principe de la Fête de la Rosière de Salency, petit bourg de l’Oise, au nord de Paris. Une tradition qui pourrait être remise au goût du jour en 2019, avec le soutien logistique et financier du maire de la commune. L’initiative suscite une vive polémique sur internet et des avis partagés parmi les habitants du village.

Mariage de sept rosières à Saint-Denis (1931).
Mariage de sept rosières à Saint-Denis (1931). Agence de presse Meurisse / Domaine public
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« Cela se faisait peut-être au Ve siècle. Mais aujourd’hui, c’est rétrograde », estime Muriel Dormignies, la secrétaire du maire de Salency. Elle était, depuis le départ, contre le retour de la Fête de la Rosière en 2019 dans ce petit village dans l’Oise, au nord de Paris. Avant même que la polémique n’enfle sur internet.

Et pour cause, cet événement couronne une jeune fille du bourg pour « ses vertus ». Si au XVIIIe siècle, une Rosière était décrite comme « vertueuse », les individus comprennent aujourd’hui qu’il est surtout question de la candeur, de la bonté et de la virginité d’une jeune fille. Une célébration jugée « sexiste » par beaucoup d’internautes à l’heure du mouvement #MeToo.

Résultat, l’agenda de la mairie de Salency, généralement plutôt tranquille en plein mois d’août, se trouve bouleversé. Muriel Dormignies s’applique à trier les centaines de courriels de protestation adressés à l’édile sans étiquette Hervé Deplanque, celui qui a, avec son conseil municipal, accordé une subvention de 1 800 euros à la Confrérie de Saint-Médard pour l’organisation de l’événement.

Certains messages sont plus virulents que d’autres. « Vous êtes une raclure », « espérons que cela ne vous donne pas de pulsions ». « Si ça ne tenait qu’à moi, j’annulerais tout de suite la fête », indique le maire qui confie « ne pas avoir les épaules assez larges » pour supporter cette « levée de boucliers ». Une pétition en ligne a d’ailleurs recueilli plus de 30 000 signatures pour demander l’annulation de l’événement. « J’ai toujours dit que je trouvais cette fête un peu dépassée », précise Hervé Deplanque.

Une fête villageoise traditionnelle

Trente ans après la dernière édition de la Fête de la Rosière en 1987, c’est Bertrand Tribout, le président de la Confrérie, qui s’est battu pour la remettre au goût du jour. Elle est, pour ce passionné d’histoire locale, l’occasion de célébrer « le patrimoine du village ». La légende veut en effet que la fête de la Rosière ait été initiée au Ve siècle, à Salency, par Saint Médard, natif de la commune. « Toutes les communes ne peuvent se vanter d’avoir vu naître un Saint », targue-t-il.

Un argument que partage Nicole, une habitante retraitée du village, croisée en promenade avec son mari. Pour elle, cette fête traditionnelle aussi l’occasion de « rassembler les villageois ». La boulangère de Noyons, la ville la plus proche de Salency, va même plus loin : « Nos petits villages sont en train de mourir. Il faut les faire revivre. Cette fête est un symbole pour le village ! » Le bourg de 900 habitants ne compte aujourd’hui plus de commerces de proximité.

Célébrer une « féminité des campagnes »

« Il n’y a rien de honteux à célébrer la jeunesse ! » : Bertrand Tribout, lui, n’a cure des critiques liées à l’emploi du mot « vertu ». Cette fête ne fait « pas du tout référence » selon lui, « à la virginité ». « Il ne s’agit pas de choisir la jeune fille qui a les plus beaux yeux, mais celle qui est à l’écoute des autres, rend service, se comporte aimablement et s’implique dans la vie locale », argumente-t-il. Il assure d’ailleurs avoir déjà trouvé des candidates pour devenir Rosière.

Il n’est cependant pas sûr que toutes les jeunes filles de Salency soient partantes. Christophe, le mari de la secrétaire du maire, assure que sa fille, âgée de 18 ans est « contre ». « Les jeunes filles aujourd’hui ont davantage de liberté, elles ne sont plus autant liées à leurs parents qu’autrefois », affirme-t-il.

Une vision conservatrice de la femme dont se défend Bertrand Tribout. Pour lui, la fête de la Rosière est au contraire une manière de « mettre en valeur la féminité des femmes des milieux ruraux, souvent moins valorisées que celles des villes ». Célébrer des qualités réputées féminines - comme l’écoute, la bonté, la disponibilité - Perrine, une cliente de la boulangerie est d’accord, mais alors à la seule condition que les « garçons puissent aussi être en lice » pour devenir « Rosier » de Salency.

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