À Berlin, le président allemand appelle à abattre les «nouveaux murs»
La journée de ce samedi 9 novembre a été marquée par l'émotion et le recueillement à Berlin, où l'on commémorait les 30 ans de la chute du Mur. Après la chancelière Angela Merkel qui a appelé à la défense des valeurs, le président allemand Frank-Walter Steinmeier s'est prononcé pour celle de la cohésion nationale.
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Trente ans après l'effervescence du 9 novembre 1989 qui vit le Mur de Berlin tomber, l'heure n'était plus à l'euphorie dans la capitale allemande. Elle aurait de tout façon paru peu crédible comparée à l'immense joie ressentie dans la capitale allemande, dans le pays et partout dans le monde lors de cette journée qui signifiait la fin de la division du pays et celle de la guerre froide.
Trois décennies plus tard, le monde actuel paraît surtout confronté à de nombreuses menaces et inquiétudes. Si les responsables allemands ont évoqué le souvenir de l’automne 89, c’est moins pour insister sur ce qu’il a représenté à l’époque que pour le message, voire l’obligation, qu’il implique pour la période actuelle pleine d’incertitudes, observe notre correspondant à Berlin Pascal Thibaut.
« Nous ne pouvons pas rester silencieux »
Dans son discours prononcé ce soir près de la porte de Brandebourg, Frank-Walter Steinmeier a rendu hommage à tous ceux qui ont permis d'abattre le Mur de Berlin. Il a évoqué les « révolutionnaires pacifiques » est-allemands, les peuples d'Europe de l'Est, ainsi que l'ancien dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev, qui a amorcé, « avec courage et humanité », une politique de « détente ».
Mais le président, dont le rôle est essentiellement honorifique en Allemagne mais qui est considéré comme l'autorité morale du pays, a prévenu : « Nous ne pouvons pas rester silencieux face à ce qu'il se passe aujourd'hui ». « Il y a de nouveaux murs qui traversent le pays, des murs de frustration, des murs de colère et de haine, des murs invisibles qui nous divisent. »
Une allusion à la percée importante de l'extrême droite dans l'ex-Allemagne de l'Est, mais aussi aux frustrations qui continuent à être exprimées dans cette partie du pays : des salaires, des retraites et un niveau de vie moins élevés qu'à l'Ouest. L'ex-RDA ne s'est jamais aussi bien portée, mais reste à la traîne par rapport à l'ancienne RFA, rappelle notre envoyée spéciale à Berlin, Léa-Lisa Westerhoff. « Le Mur de Berlin a été construit par une dictature. Mais les nouveaux murs d’aujourd’hui, nous les avons construits nous-mêmes. Et nous seuls pouvons les abattre. Ne restons pas passifs. Abattons enfin ces murs ! », a lancé Frank-Walter Steinmeier.
Défense des valeurs fondamentales européennes
Ce matin, dans la chapelle de la Réconciliation, un des lieux de mémoire de la division de la ville qui dura du 13 août 1961 au 9 novembre 1989, Angela Merkel a également fait part de ses craintes devant les menaces qui pèsent sur l'Europe. La chancelière allemande l'a exhortée à défendre ses valeurs fondamentales comme « la démocratie et la liberté » face aux contestations grandissantes. « Les valeurs qui fondent l'Europe, la liberté, la démocratie, l'égalité, l'État de droit et la préservation des droits de l'homme ne vont pas de soi » et « doivent toujours être défendues », a-t-elle lancé.
Aucun mur qui exclut et restreint la liberté n'est assez haut ou long qu'il ne puisse être franchi.
L'Allemagne commémore les 30 ans de la chute du Mur de Berlin
Certains pays d'Europe de l'Est, comme la Hongrie ou la Pologne, pourtant pionniers dans la contestation de la dictature communiste dans les années 1980, se voient aujourd'hui accusés par l'Union européenne de ne pas respecter pleinement les règles de l'Etat de droit.
Le président français, Emmanuel Macron, qui se rendra ce dimanche soir à Berlin, a fait écho aux propos de la chancelière allemande en rendant hommage aux manifestants est-allemands de l'automne 1989 qui ont fait tomber le mur. « Soyons à la hauteur de leur courage et dignes de leur promesse », a-t-il plaidé dans un message en français et en allemand sur Twitter.
Il y a 30 ans, le Mur de Berlin n’est pas tombé. Il a été abattu par le courage de milliers de femmes et d’hommes épris de liberté. Ils ont ouvert la voie de la réunification de l’Allemagne et de l’unité de l’Europe. Soyons à la hauteur de leur courage et dignes de leur promesse.
Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) November 9, 2019
Sur une note plus joyeuse, des supporteurs du club de football berlinois Hertha ont symboliquement abattu un « Mur » de carton dressé sur la pelouse avant le coup d'envoi d'une rencontre de championnat face à Leipzig. Parmi les badauds à Berlin, un violoncelliste français s'est aussi mis à jouer samedi devant une portion de Mur, en souvenir du récital improvisé en novembre 1989 par le maestro Mstislav Rostropovitch dans la ville, une scène devenue iconique.
Cette journée de commémorations se clôturait ce soir par un concert géant devant la porte de Brandebourg.
Pascal Thibaut (@pthibaut) November 9, 2019
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