Russie: la première du ballet «Noureev» va se jouer sans son metteur en scène

C'est l’événement de cette fin d'année sur la scène culturelle russe : le ballet « Noureev » consacré à la vie du célèbre danseur mort à 54 ans après avoir vécu en exil toute une partie de sa vie. La première a lieu samedi soir 9 décembre au Bolchoï et elle prendra une résonnance toute particulière. D’abord parce que le spectacle jugé trop sulfureux par les autorités avait été annulé au dernier moment en juillet dernier. Ensuite parce que son metteur en scène Kirill Serebrenikov est assigné à résidence depuis le mois d’août pour des accusations de malversation financière. Reportage lors de l’une des toutes dernières répétitions avant la première.

Le théâtre du Bolchoï à Moscou, le 23 juin 2017. Yuri KADOBNOV / AFP

Avec notre correspondant à Moscou,  Daniel Vallot

Sur scène, le jeune Noureev esquisse un pas de danse. Nous sommes dans les années 1950 au tout début de sa carrière. Dans la salle, le chorégraphe du ballet est là. Mais pas le metteur en scène, assigné à résidence depuis plus de trois mois.

« Malheureusement les autorités judiciaires ont refusé de laisser Kirill Serebrenikov assister aux répétitions malgré nos demandes. Mais je vous garantis que tout ce qui a été décidé durant ces répétitions a été approuvé par Kirill lui-même.  Et s’il y a eu des changements, c’est lui et le chorégraphe qui les ont voulus. La direction du théâtre n’a exercé aucune pression », affirme Vladmir Ourine, directeur du Bolchoï.

En juillet dernier, le ballet avait dû être annulé à la dernière minute. Officiellement, le spectacle n’était pas prêt. En réalité, il semble que les scènes évoquant l’homosexualité du danseur aient indigné les autorités russes. Cette fois, la direction du théâtre espère que tout se déroulera sans mauvaise surprise.

« Moi je ne pense pas que ça peut être annulé une deuxième fois, ce serait une vraie farce, une farce à la russe. Mais la chose la plus importante c’est que l’œuvre existe. On n’a pas créé seulement la musique, on a créé la chorégraphie, la mise en scène, les rôles. Ça existe, et je pense que c'est très important. Je crois que c'est le rôle du Bolchoï de créer, et d'innover. Et le seul critère qui devrait exister, c'est le talent des gens qui font ce travail », estime Katia Novikova, directrice de la communication du Bolchoï.

Quel que soit le sort réservé au spectacle, son metteur en scène restera de toute façon assigné à résidence dans l’attente de son jugement pour détournement d’argent. Kirill Serebrenikov encourt jusqu’à dix ans de prison.