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Turquie

[Tendances] Les chats, vedettes d'Istanbul

Les félins font l'objet d'une bienveillance particulière de la part des habitants d'Istanbul. On estime le nombre de chats à environ 50 000 dans la capitale économique turque, où ils font partie intégrante de la vie de la ville.

La statue de Tombili, «le dodu» en turc, célèbre chat du quartier de Kadıköy, à Istanbul.
La statue de Tombili, «le dodu» en turc, célèbre chat du quartier de Kadıköy, à Istanbul. Wikimedia Commons
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De notre correspondant à Istanbul,

L’été dernier, le quartier stambouliote de Kadıköy a perdu l’un des siens. Un de ces personnages truculents qui pimentent la vie du quotidien et que tous les riverains saluent au passage. Il ne s’agissait pas d’un artiste local ou d’un commerçant historique, mais plutôt de Tombili, bedonnant greffier qui avait ses habitudes nonchalantes dans l’impasse Güleç, derrière le stade de Fenerbahçe.

Avant sa disparition, l'animal avait connu son heure de gloire bien au-delà du pâté de maisons lorsque l'une de ses photos, le montrant avachi, l'air étrangement humain, avait fait le tour du web. Après sa mort, un groupe de fidèles a tout naturellement lancé une pétition pour demander à la mairie de quartier d'ériger une statue à la mémoire du bien-nommé Tombili, le « dodu ». Après 17 000 signatures, les édiles de Kadıköy se sont exécutés l'automne dernier, notamment grâce à l’artiste Seval Şahin qui a bien voulu immortaliser le minet sans être rémunérée.

On estime à 50 000 le nombre de chats à Istanbul.
On estime à 50 000 le nombre de chats à Istanbul. Alexandre Billette/RFI

Les Stambouliotes ont une relation amoureuse, pour ne pas dire légèrement compulsive, avec les petits félins. On ne connaît pas précisément l'origine de cette histoire d'amour. Certains expliquent qu'en terre d'islam, les chats ont souvent été bien traités, depuis le prophète Mahomet qui en aurait vanté les qualités et les vertus. D'autres avancent, plus prosaïquement, que les marchands les aimaient bien puisqu'ils tenaient éloignés des provisions les souris et autres rongeurs.

Gezi Park : les fauves en première ligne

Dans le quartier branché de Cihangir, les vétérinaires et autres vendeurs de croquettes se comptent aujourd’hui par dizaines. Emre tient une clinique pour animaux dans ce quartier prisé des artistes et des expatriés, à quelques mètres de la place Taksim. « On ne sait pas combien il y a de chats des rues à Istanbul. Certains avancent 50 000, d'autres plusieurs centaines de milliers. Presque tous les jours, on m'amène un chat de gouttière blessé ou malade, pour qu’on leur donne les premiers soins, gratuitement ».

Lors de la révolte de Gezi, en 2013, des brigades de vétérinaires, professionnels ou amateurs, s’étaient ainsi chargés de venir en aide aux chiens et aux chats, affectés autant que les humains par les nuages de gaz lacrymogène qui flottaient quasiment en permanence aux alentours de la place Taksim.

La réalisatrice turco-américaine Ceyda Torun leur a consacré cette année un documentaire, Kedi (« chat », en turc), qui a d’ailleurs connu un joli succès au box-office américain, avec des recettes de 2,4 millions de dollars. On y découvre le portrait de sept matous, leurs pérégrinations quotidiennes et leurs rapports avec leur voisinage. Le boucher du quartier réserve quelques morceaux pour la petite troupe qui se masse au pas de sa boutique, le restaurateur abandonne quelques restes à l’intention du voisinage à quatre pattes. Et même les particuliers sont nombreux à laisser, dans la rue ou à la porte de leur immeuble, une assiette remplie de croquettes pour les chats du quartier.

Félins et fraude électorale

Sevil, elle, leur consacre carrément plusieurs heures par semaine, en veillant notamment aux soins des chatons. « Je ne suis pas membre d’une association, j’ai simplement décidé de veiller sur eux, puisque les autorités municipales ne le font pas. Je m’assure que les nouveau-nés sont vaccinés, je leur donne des vitamines ». Le jugement qu’elle porte sur l’administration stambouliote est un peu sévère : ces huit dernières années, la mairie d’Istanbul a ainsi consacré plus de quatre millions d’euros pour veiller aux chats et aux chiens errants, et certains arrondissements de la ville ont mis en place pour l’hiver des petits refuges avec toit et nourriture.

Sevil, une habitante d'Istanbul, consacre plusieurs heures par semaine aux chats qui vivent dans la capitale économique de la Turquie.
Sevil, une habitante d'Istanbul, consacre plusieurs heures par semaine aux chats qui vivent dans la capitale économique de la Turquie. Alexandre Billette/RFI

De toute façon, les Stambouliotes veillent au grain : en 2012, des élus locaux avait envisagé de déplacer des milliers d’animaux des rues dans des réserves naturelles à l’extérieur du centre-ville d’Istanbul, pour lutter contre la prolifération des chats et chiens errants. Peine perdue : après une manifestation qui a rassemblé des milliers de personnes contre la mesure, celle-ci a finalement été rangée au placard.

Les greffiers turcs ont-ils tenté de se venger contre ce projet mort-né ? Deux ans plus tard, lors des élections municipales de 2014, une série de pannes électriques a frappé plusieurs bureaux de vote à travers le pays au moment même où le dépouillement des votes commençait. A l’opposition qui criait à la fraude, le ministre de l’Energie a répondu, le plus sérieusement du monde, que des chats s’étaient introduits dans les transformateurs électriques, les rendant inopérants.

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