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Roumanie

[Reportage] Saber Guardian 2017: l’Otan en manœuvre dans le sud-est de l’Europe

Le plus gros exercice allié de l’année se termine dans la région de la mer Noire. Saber Guardian a réuni du 11 au 20 juillet, près de 25 000 militaires dont 14 000 Américains. Cet exercice à cheval sur la Hongrie, la Roumanie et la Bulgarie et qui s’inscrit dans la posture «dissuasive» de l’Otan, est financé par les Etats-Unis à hauteur de 90 millions de dollars. Des partenaires non membres de l’alliance, comme l’Ukraine ou la Géorgie ont été invités, tout cela sous l’œil d’une poignée d’observateurs russes. Un reportage en Roumanie, partenaire clef des Etats-Unis dans la région, d'Olivier Fourt, spécialiste défense de RFI.

Le général Ben Hodges, commandant général de l’US Army en Europe après un exercice aéroporté de l’OTAN sur la base de Bezmer en Bulgarie.
Le général Ben Hodges, commandant général de l’US Army en Europe après un exercice aéroporté de l’OTAN sur la base de Bezmer en Bulgarie. OLIVIER FOURT/RFI
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Ce matin-là, le temps est à l’orage sur le Danube. Tirs de canons, roquettes, artillerie, une pluie de feu s’abat soudain, sur la petite île de Borchia située entre les deux bras du fleuve. L'armée roumaine utilise tout ce qu’elle possède pour contrer une "invasion" venant de l’Est.

 

Blindés américains « Striker » du Second Cavalry Regiment passant le Danube à Bordusani durant l’exercice Saber Guardian 2017.
Blindés américains « Striker » du Second Cavalry Regiment passant le Danube à Bordusani durant l’exercice Saber Guardian 2017. OLIVIER FOURT/RFI
 

Après deux heures de bataille, les véhicules Stryker du second régiment  de cavalerie  de l’armée américaine, franchissent à leur tour, les 600 mètres qui les séparent de la rive d’en face. Le général américain, Ben Hodges est patron de l’armée de terre américaine en Europe, il fait part de sa satisfaction : « Ce que nous venons de voir est très impressionnant,  la seule participation américaine  c’était 14 véhicules qui ont traversé le pont flottant, tout le reste était roumain, donc ils doivent vraiment avoir confiance en eux ».

Frontière naturelle du sud-est de l’Europe.

Bien sûr, tout cela n’est qu’un exercice, mais en cas de débarquement sur les rives de la mer Noire, le Danube constituerait l’unique ligne de défense. Passé le fleuve,  une grande plaine jaunie par le soleil d’été et hérissée de pylônes électriques s’étend jusqu’à la capitale Bucarest , à deux heures de route seulement.

« Le Danube est probablement la voie navigable la plus stratégique de l’Europe, mais la frontière entre la Roumanie et la Fédération de Russie, c’est la mer Noire !  Après l’annexion illégale de La Crimée, la Russie  a fait bouger cette zone  -frontalière- encore plus à l’Ouest, et les capacités militaires qu’ils ont installées  en Crimée sont égales à ce qui celles qui sont déployées à Kaliningrad » , ville garnison russe sur la Baltique, explique Ben Hodges.

Missiles en mer noire

En ce mois de juillet, les vacanciers viennent se baigner à Constanta, la Côte d’Azur de la Roumanie. La côte, expliquent les marins roumains, est à portée de missiles russes. Le grand port militaire russe de Sébastopol n’est qu’à 500 km. Les bateaux de guerre russes viennent patrouiller jusqu’aux limites des eaux roumaines, et les puissants radars de leur batterie de missile S-400 balaient une bonne partie de la mer Noire, ce qui pourrait entraver la liberté d’action des  Etats riverains. Les Roumains eux aussi réfléchissent à acheter de puissants missiles de défense aérienne : des Patriots. Les Américains sont d’accord. Avec des missiles, l’armée roumaine pourrait protéger ses villes, mais aussi gagner en profondeur stratégique si elle les installe sur la côte.

Tir de missile S-300 ukrainiens sur le polygone de Shabla en Bulgarie durant un exercice de défense aérienne. La Russie aurait déployé des batteries encore plus sophistiquées de S-400 en Crimée.
Tir de missile S-300 ukrainiens sur le polygone de Shabla en Bulgarie durant un exercice de défense aérienne. La Russie aurait déployé des batteries encore plus sophistiquées de S-400 en Crimée. OLIVIER FOURT/RFI

« Cold Base »

A la sortie de la ville se trouve « MK », Mihail Kogalniceanu. Il s’agit d’une base roumaine réaménagée grâce aux fonds de l’initiative américaine de réassurance européenne dont le budget atteindra en 2018, 4,8 milliards de dollars, un budget en forte hausse, décision du président américain Donald Trump. Quelques vieux Mig 29 roumains, relique d’un passé socialiste, rouillent dans un coin, mais à MK, de nouvelles constructions sortent de terre tous les jours. Ici les Américains bâtissent en « dur», pour pouvoir accueillir en cas de crise une brigade américaine complète soit 2 500 hommes. « Une base froide », selon le concept américain.

Joe Copeland est ingénieur en construction pour l’armée américaine : « On n’appelle pas ça une base permanente parce qu’on n’a pas d’unités positionnées en permanence ici. On parle de présence « persistante » et ça veut dire que vous allez avoir des gars qui viennent ici s’entraîner de manière régulière. On prévoit qu’on aura une présence continue de groupes qui viendront ici pour s’entraîner et qui transiteront par-là, avant d’aller ailleurs en Roumanie ou dans la région de la mer Noire ».

Base militaire de Mihail Kogalniceanu près de Constanta. Base d’entraînement et de transit pour les troupes américaines déployées en Irak.
Base militaire de Mihail Kogalniceanu près de Constanta. Base d’entraînement et de transit pour les troupes américaines déployées en Irak. OLIVIER FOURT/RFI

Méfiance de Moscou

Moscou met régulièrement en garde contre le « stationnement permanent » de troupes alliées à sa frontière qui serait contraire à l'acte fondateur Otan-Russie, signé en 1997. Mais les Etats-Unis ont prévu d’installer en Roumanie cinq sites militaires à travers le pays en plus de la base stratégique de Deveselu qui abrite les missiles du bouclier anti-missile américain (DAMB) considérés comme « une menace » par la Russie.  « La défense anti-missile est la pièce maîtresse de notre partenariat », reconnaît-on du côté de l’ambassade américaine,  et « cela impose une responsabilité particulière vis-à-vis des Roumains ». Dans toute l’Europe du Nord et de l’Est, une quinzaine d’implantations américaines sont en train de voir le jour, de la Baltique à la mer Noire.

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