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Aujourd'hui l'économie

Travail: attente du verdict dans l’affaire des travailleurs marocains détachés

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Une décision plusieurs fois reportée des prud'hommes d'Arles dans une affaire d'exploitation présumée de travailleurs est attendue ce jeudi. Cinq ressortissants marocains ont lancé il y a deux ans une procédure contre des entreprises agricoles françaises.

Les travailleurs détachés marocains attendent leurs audiences devant le conseil des Prud'hommes à Arles, dans le sud de la France, le 4 octobre 2018.
Les travailleurs détachés marocains attendent leurs audiences devant le conseil des Prud'hommes à Arles, dans le sud de la France, le 4 octobre 2018. GERARD JULIEN / AFP
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Les cinq plaignants ont été employés entre 2012 et 2017 par huit entreprises du sud-est de la France spécialisées dans le conditionnement des fruits et légumes dans des conditions indignes selon leur témoignage. L'un des plaignants -une femme- a raconté dans la presse avoir été à la merci des employeurs. Pendant des mois, l'été, ils auraient accumulé 260 heures de travail, soit pas loin du double des 35 heures hebdomadaires, suivis de mois sans activité et de contrats qui s'arrêtent sans préavis. Le tout pour un salaire allant de 300 à 1500 euros les mois les plus remplis toujours selon cette plaignante qui parle d'esclavage.

Ces cinq salariés, qui réclament la requalification de leur contrat en CDI et près de 60 000 euros, n'étaient pas employés directement par les entreprises françaises, ni par des boîtes marocaines mais par une agence d'intérim espagnole. L'avocate de Laboral Terra récuse d'ailleurs la légitimité du conseil des prud'hommes d'Arles et estime que c'est en Espagne que l'affaire doit être jugée.

Travail détaché

Mais, même si l'agence d’intérim a son siège en Espagne, ce sont les minima salariaux français qui auraient du s'appliquer, conformément à la directive européenne sur les travailleurs détachés. Pour rappel, elle permet à toute entreprise de l'Union européenne d'envoyer ses salariés pour des missions dans d'autres États membres. Cette directive donc prévoit que les règles du pays d'accueil en terme de minimum salarial, de temps de repos, ou encore de congés s'appliquent au travailleur détaché.

En revanche, les cotisations sociales sont payées dans le pays d'origine de l'entreprise. Mais une fois pris en compte les frais de déplacement et d'hébergement, selon la Commission européenne, en France, un travailleur détaché au SMIC (salaire minimum interprofessionnel) ne reviendrait pas moins cher qu'un salarié français. Mais il y a tout de même un avantage pour l'employeur en raison des écarts de niveau de vie au sein de l'Union européenne. Un Smic peut rester très attractif même pour des travaux plus qualifiés. C'est pourquoi cette directive a été révisée. A partir de l'an prochain le principe « à travail égal salaire égal » s'appliquera.

Le réel problème, en fait, ce serait en fait que ce régime offre un terrain propice à la fraude. C'est ce que pointe du doigt la Cour des comptes française dans un rapport rendu cet hiver. Difficile de quantifier le nombre d'infractions. Mais l'institution en a identifié trois grands types : l'absence de déclaration, une fraude dite complexe, relevant parfois du prêt illicite de main d’œuvre et du marchandage, ou le non respect du noyau dur des droits du travailleur. Cela représente une infraction pénale sur cinq parmi celles relevées par l'inspection du travail en matière de travailleurs détachés en 2016 et 2017.

Difficile lutte contre la fraude

Or, ces salariés sont parfois fragilisés par leur situation. Un représentant syndical met en avant la crainte de certains de devoir rentrer dans leur pays s'ils n'acceptent pas les conditions qu'on leur impose. La barrière de la langue et le manque de connaissance de leur droit peut aussi être un frein.

La France a pourtant renforcé son arsenal pour lutter contre les fraudes.

Trois lois ont été adoptées depuis 2014 et les contrôles ont été renforcés. Mais la caractérisation de ces faits restent difficile à établir en raison parfois de l'existence «de doubles registres pour les décomptes horaires» ou du paiement en liquide. La Belgique a d'ailleurs récemment interdit les versements de salaire en espèce pour pouvoir vérifier les sommes perçues par les travailleurs. Par ailleurs, pour faire aboutir certaines procédures, il faut pouvoir obtenir des informations d'autres Etats et d'entreprises étrangères. Et même au sein de l'Union européenne cela peut prendre du temps.

Le phénomène va bien sûr bien au-delà du système de travail détaché. L'agence des droits fondamentaux de l'UE s'est d'ailleurs inquiétée l'an dernier de l'exploitation de travailleurs immigrés intra ou extracommunautaires et appelle à un renforcement des contrôles.

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