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Aujourd'hui l'économie, le portrait

Jamal Berber : «J'ai pourtant fait des efforts pour travailler en Algérie...»

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L'entrepreneur franco-algérien, pionnier des écrans tactiles, avait renoncé à travailler en Algérie à cause de la corruption du système. Aujourd'hui, Jamal Berber est en pointe dans la mobilisation de la diaspora en France contre le régime algérien.

Jamal Berber est un entrepreneur franco-algérien.
Jamal Berber est un entrepreneur franco-algérien. RFI/David Bache
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Il est Algérien, né au Maroc. Sa ressemblance avec l'ancien président Abdelaziz Bouteflika s'arrête là. Jamal Berber, 65 ans, est installé en France depuis ses 18 ans. Aujourd'hui en charge du développement de la société d'ingénierie logicielle Intive, Jamal Berber a créé six entreprises, en France, mais également en Grande-Bretagne et aux États-Unis.

« La première société que j'ai créée, c'était pour faire un ordinateur de poche à écran tactile, se souvient ce vétéran des nouvelles technologies. Et on l'a fait ! On a le Guiness book of records (Livre Guiness des records, ndlr) du premier ordinateur de poche à écran tactile fonctionnel. C'était en 1983. La deuxième société que j'ai faite, c'était dans le monde industriel : j'ai créé des systèmes pour automatiser des usines dans l'aérospatial. J'ai participé à la création de Symbian, le premier OS (operating système, système d'exploitation, ndlr) pour téléphone mobile... J'ai fait pas mal de choses, je me suis bien amusé ! »

« Je suis d'Alger-Plage ! »

Le père de Jamal Berber était entrepreneur dans l'industrie textile. Et membre du FLN, le Front de libération nationale, pour lequel il s'occupait notamment de chercher des financements. Lorsqu'ils s'installent à Alger, après l'indépendance, Jamal Berber et sa famille emménagent dans un appartement quitté à la hâte par des Français. Le jeune Jamal découvre des meubles alsaciens et le sentiment étrange de pénétrer dans l'intimité d'une famille inconnue. Il découvre aussi son pays, l'Algérie...

« Pour moi, je suis Algérien à cause de ces années-là ! Les années où on a douze-treize-quatorze ans... Si je ferme les yeux et qu'on me demande d'où je suis, je réponds que je suis d'Alger-plage ! Vraiment, je suis viscéralement Algérien par le fait d'avoir été adolescent en Algérie, ça m'a marqué à vie. »

Après le bac, direction Paris. Maths sup, maths spé au prestigieux lycée Saint-Louis, École nationale des télécoms, le parcours est brillant. Et double. C'est le début des années 70', et Jamal Berber rencontre d'autres immigrés algériens... qui, eux, ne sont pas venus faire leurs études...

« Au pied levé, j'ai travaillé chez des sous-traitants de Renault, se souvient l'entrepreneur qui, à l'époque, cherchait des petits boulots. Et j'ai vu de mes yeux les derniers bidonvilles qui existaient encore à l'époque à Nanterre. C'était des immigrés algériens. Ce n'était pas une vie facile, bien sûr, ils n'avaient pas de toilettes, pas de quoi se laver, c'était compliqué. Sur le moment je n'ai pas été plus choqué que ça... c'est plus tard que j'ai réalisé ce que ça voulait dire. »

« J'ai rencontré les ministères, les gens de l'armée... »

Après les cours, Jamal Berber aide les travailleurs arabes des foyers Sonacotra à organiser leurs revendications et faire valoir leurs droits. Alors qu'il achève sa dernière année d'études, son père meurt... et les derniers membres de sa famille restés en Algérie le rejoignent en France. Jamal Berber avait imaginé qu'il rentrerait travailler à Alger, sa carrière débute à Paris. Elle l'emmènera ensuite dans divers endroits du monde... quant à l'Algérie, Jamal Berber a bien tenté d'y monter des affaires...

« Vraiment, j'ai fait des efforts pour travailler en Algérie, commence d'emblée Jamal Berber, comme s'il avait à se justifier. Je suis allé rencontrer les ministères, les gens de l'armée... Il y a des réseaux claniques, des réseaux familiaux, des réseaux de régionalisme... Vous ne savez même pas si c'est une corruption ou pas, sourit-il, vous avez visité quelqu'un et quelques jours après il vous rappelle en disant « mon neveu a besoin d'un stage », ça peut aussi être de l'argent... Il y a un moment où j'ai fini par faire un constat et où j'ai dit "ça ne marche pas pour moi. »

Le 22 février dernier, il y a presque deux mois, les Algériens descendent dans la rue pour dire non au cinquième mandat d'Abdelaziz Bouteflika. Aux côtés de sa femme, Jamal Berber participe à la création du collectif Debout l'Algérie, qui organise chaque semaine les rassemblements parisiens.

3500 personnes

« On a fait un appel. On avait acheté un mégaphone, une petite table, trois feuilles de papier, rien du tout ! On s'attendait à avoir 400 personnes, il y en a eu 3500 ! (lors du premier jour de manifestation place de la République à Paris, ndlr) avec des poussettes, des mamans, des bébés... Quand j'ai vu ça, vraiment... c'était beau, c'était merveilleux, se remémore Jamal Berber, des sanglots dans la voix. Si on ne crée pas une Algérie moderne, qu'est-ce qu'ils vont faire tous ces jeunes ? Ils n'auront pas de piston, pas de connexion, qu'est-ce qu'ils vont faire ? Donc c'est très important de réussir. »

Jamal Berber a rêvé les tout premiers écrans tactiles. L'histoire dira si ses espoirs pour l'Algérie connaîtront le même succès.

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