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Le grand invité Afrique

Azali Assoumani (Comores): gagner dès le 1er tour pour montrer la «confiance»

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Aux Comores, le président sortant a choisi d'anticiper les élections. Après avoir remporté, en juillet dernier, un référendum qui repousse la présidence tournante entre les îles de l'archipel, Azali Assoumani peut envisager de réaliser deux nouveaux mandats et donc de rester au Palais de Beit Salam jusqu'en 2029. Mais les trois îles de la Fédération comorienne sont sous tension. Des violences insurrectionnelles ont éclaté en octobre à Anjouan. L'opposition accuse le pouvoir d'évincer les adversaires les plus sérieux du président Azali. Il y a quelques jours, la Cour suprême en a écarté deux de poids lourds, notamment l'ancien vice-président, arrivé seulement 4 000 voix derrière Azali Assoumani en 2016. Douze candidats affronteront le président sortant Azali Assoumani, le 24 mars. Le chef de l'Etat se défend d'avoir utilisé la justice pour écarter ses adversaires les plus sérieux. Le chef de l'Etat sortant, en congé officiel depuis mercredi soir comme la Constitution l'y oblige pour faire campagne, était au sommet de l'Union africaine dimanche et lundi à Addis-Abeba, où notre correspondant l'a rencontré.

Le président des Comores, Azali Assoumani, lors de la journée de vote pour le référendum constitutionnel à Moroni, le 30 juillet 2018.
Le président des Comores, Azali Assoumani, lors de la journée de vote pour le référendum constitutionnel à Moroni, le 30 juillet 2018. TONY KARUMBA / AFP
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RFI : La Cour suprême des Comores a rendu sa décision. Il y aura donc treize candidats à l’élection présidentielle du 24 mars prochain. Dans sa décision, la Cour suprême a donc éliminé trois candidats, l’ancien vice-président, qui avait terminé juste derrière vous à la dernière présidentielle, le candidat du parti de Juwa. Est-ce que cela ne donne pas de l’eau au moulin de ceux qui vous accusent de vouloir éliminer vos adversaires politiques ?

Azali Assoumani : J’ai tellement l’habitude, maintenant que les gens disent tout. Mais je peux, sans prétention aucune, être fier de mon pays. C’est un Etat de droit qui fonctionne. Tout est perfectible, on voit dans des grands pays comment cela se passe. La Cour suprême a pris sa décision. Je ne savais, j’ai appris comme ça, comme tout le monde. Donc, ils peuvent dire tout ce qu’ils veulent, mais ce dont je suis sûr et même fier, c’est que, très sincèrement, nous avons un Etat de droit.

Il y a aussi les forces de l’ordre qui ont pu être accusées d’avoir commis un certain nombre de violences. Pour l’instant, il n’y a pas eu de poursuites, à ma connaissance.

Si, si… Il y a eu des poursuites. Il y a eu beaucoup de délits, malheureusement. Ce que nous avons constaté, c’est qu’il y avait des gens qui voulaient empêcher le référendum et lorsque le référendum a été fait, il fallait qu’ils fassent la déstabilisation.

Le référendum de juillet dernier…

Nous avons bénéficié de la nouvelle technologie de l’information. L’audience qui en a été faite a été rendue publique et les gens de bonne foi, effectivement, ont dit : Eh bien, écoutez… Il n’y a rien à dire. Pour tous ceux qui ont été emprisonnés, condamnés, on dit « prisonniers politiques », parce que c’est politique. Mais s’ils étaient agriculteurs, on ne dirait pas « prisonniers agriculteurs ». Mais néanmoins, effectivement, il y a eu les événements d’Anjouan, l’insurrection d’Anjouan. Cela n’est pas encore traité.

Mais certains opposants vous objectent qu’on peut avoir le sentiment que certaines poursuites sont accélérées quand certaines personnes parlent publiquement contre votre autorité ou ont des velléités de se présenter contre vous.

Ils peuvent dire tout ce qu’ils veulent. Mais une enquête a été ouverte, donc la Cour suprême de l’Etat a suivi sa procédure. Nous avons tiré toutes les leçons de ce qui se passe, soit dans notre environnement, soit dans le monde, pour essayer d’avoir un climat à même de convaincre les opérateurs économiques. Quand ils viennent, ils savent qu’ils sont dans un pays de droit. S’il y a un problème, c’est le droit qui va parler.

Et justement, en parlant d’économie, c’était l’une de vos grandes promesses de campagne, est-ce que vous en tirez un bilan plutôt positif ou plutôt mitigé un peu plus de deux ans après ?

Ce n’est pas mitigé du tout. Malheureusement, nous vivons une malhonnêteté intellectuelle qui dépasse les limites, mais je vais vous donner un petit exemple : nous sommes arrivés en 2016 et la croissance était de zéro. En 2018, elle était de 3. Cette année 2019 nous sommes montés à 4, voire même plus. Les preuves sont là. Vous savez, nous avons vécu dix ans sans électricité ! Et là, nous avons été obligés d’aller acheter des moteurs, les faire venir par bateau…

Votre objectif c’est d’être réélu dès le premier tour. Vous pensez que la population vous soutient ?

J’espère que le ciel est ouvert, quand vous dites cela. Oui, c’est mon objectif. Chez nous, les deux tours, c’est toujours des problèmes. Je ne dis pas que je vais passer au premier tour. Mais très sincèrement, j’espère passer au premier tour, parce qu’effectivement, cela prouve que le peuple comorien me fait confiance et aussi cela évite les problèmes. Et c’est le coût, aussi. Parce que, un scrutin c’est nous qui le finançons avec nos finances propres.

Vous avez annoncé publiquement que vous étiez pour les observateurs, pour qu’ils viennent observer cette élection. Ce qui veut dire que, si jamais des critiques se font jour, vous vous obligez à les accepter ?

Tout à fait. Pas les critiques. Je vais accepter le droit. C’est moi qui suis allé aux Nations unies, à la Ligue arabe, à l’Union africaine, à la CEI, pour leur dire de venir. Ils sont venus. Je les ai appelés au référendum et malheureusement, ils ne sont pas venus. Mais cette fois-ci, je les appelle et j’ai besoin d’eux. Parce que je fais mon effort pour que cela passe bien, mais nous sommes des humains. Mais eux, ils vont nous corriger. Eux, ils vont nous donner des conseils.

Pour évoquer les relations internationales des Comores, où en est-on avec la France ?

On est mieux. Quand le président Macron est venu au pouvoir, il n’avait même pas encore 40 ans, je me suis dit : peut-être que c’est le moment de trouver la solution. Nous, effectivement, le souhait d’avoir un leader français pour accepter de s’asseoir et discuter, c’est une envie qui nous hante. Finalement, il y a eu un contact entre lui et moi et là, on l’a transmis au ministre des Affaires étrangères. Donc je suis confiant, nous sommes sur la bonne voie. Je pense qu’incessamment un document va être signé, un cadre de concertation sur la question de Mayotte, qui est une question particulière, mais surtout dans la coopération bilatérale avec la France.

L’un des problèmes était les expulsions de la France depuis Mayotte vers Anjouan, notamment. Est-ce qu’elles ont repris ces expulsions ? Est-ce que nous sommes revenus à la situation d’auparavant ?

Vous savez là vous me provoquez, mais vous allez en assumer la responsabilité. Parce que je me suis toujours posé une question : il y a des Comoriens à Paris qui sont en situation irrégulière. On voit des Sénégalais, des Africains, qui prennent la Méditerranée pour venir en France et les Français les accueillent. Mais comment, aujourd’hui, un Comorien qui est à Paris ne gêne pas les Français, mais quand il est à Mayotte il les gêne ? Nous avons parlé avec la France dans le cadre de la coopération bilatérale. Aujourd’hui, nous commençons par les motifs qui font que les gens vont à Mayotte, on les crée ici. Par exemple, on va à Mayotte pour des cas de santé. Nous sommes en train de construire un hôpital. Pourquoi la France ne nous aide pas ? Et pourquoi ne pas nous aider à former les jeunes à aller dans la création d’emplois, parce que les Mahorais en ont besoin ? J’espère qu’un jour nous aurons tellement d’emplois que les Mahorais diront : Eh bien écoutez, on va à Anjouan travailler. J’espère que nous allons arriver à ce point-là.

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