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Les preuves, des faits

Organisation des élections en RDC: les incohérences de la Céni

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Chaque jour ou presque en RDC, la Céni publie des communiqués sur les préparatifs des élections pour convaincre les Congolais que l’élection se prépare bel et bien dans de bonnes conditions. Le problème, c'est que cette communication souffre d’incohérences. Résultat : la Céni peine à rassurer.

Manifestation organisée contre le processus électoral prévu pour les prochaines élections en décembre en RDC, le 26 octobre 2018 à Kinshasa.
Manifestation organisée contre le processus électoral prévu pour les prochaines élections en décembre en RDC, le 26 octobre 2018 à Kinshasa. AFP/Junior D. Kannah
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« Aujourd’hui, la Céni n’est plus une commission indépendante, mais c’est une commission qui travaille pour faire plaisir à Kabila et ses acolytes », dit un manifestant rencontré ce matin dans les rues de Kinshasa, où s’est déroulée une marche à l’appel de plusieurs partis d’opposition. Puis il ajoute : « Nous voulons des élections crédibles et transparentes. C’est ce que le peuple demande. Les individus ne peuvent pas prendre un processus électoral en otage. Ce n’est pas normal. »

Une communication abondante, mais floue

Principale source d’inquiétude de la population congolaise : la machine à voter. Sans même parler de la question de sa fiabilité. C’est déjà l’acheminement en RDC des quelques 100 000 machines nécessaires au vote et produites en Corée du Sud qui interroge. Arriveront-elles à temps pour le scrutin ? Et pour cause : dès le 12 juin, la Céni annonçait l’arrivée d’environ 30 000 machines par mois, entre juillet et fin septembre, date à laquelle toutes les machines auraient dû être en RDC. Le 6 août, soit deux mois plus tard, la Céni annonçait cette fois le départ de Corée des 35 000 premières machines. On était déjà très en dessous des prévisions. Finalement ce premier lot n’est arrivé que le 6 octobre avec un peu moins de 20 000 machines.

Ce n’est pas tout : si l’on cumule les annonces successives de la Céni à propos des machines qui auraient quitté la Corée du Sud, le total dépasse le nombre de machines commandées. On constate un flou similaire pour le reste du matériel électoral. La Céni assure que tout est arrivé. La semaine dernière, un communiqué évoquait 111 containers réceptionnés. Mais si l’on regarde en détail où se trouveraient ces containers dans le pays, le compte n’y est pas.

Ce que répond la Céni

La commission électorale n’avance pas véritablement d’explication, ou alors contradictoires selon les interlocuteurs, et se contente le plus souvent de renvoyer vers ses dépêches ou de faire de nouvelles annonces. Aujourd’hui, elle assure par exemple que toutes les machines arriveront finalement le 5 novembre au plus tard. Mais comme elle n’échange quasiment plus sur ces questions de logistiques avec ses partenaires traditionnels comme la Monusco, ces informations restent très difficiles à vérifier.

Des incohérences sur l’utilisation de la machine

Autre sujet qui fâche à propos de cette machine : comment faire pour que tout le monde puisse voter dans les temps avec un outil que les Congolais n’ont jamais pratiqué ? La Céni a toujours affirmé qu’une minute suffisait à chaque électeur pour voter, mais sans en apporter la preuve. Or les experts estiment que c’est « irréaliste » et qu’en l’état actuel des choses, il est mathématiquement impossible de faire voter tous les Congolais en une seule journée. Ils réclament donc depuis des mois un test grandeur nature, en vain.

Mais en début de semaine, surprise : on apprend dans une des nombreuses dépêches de la Céni qu’une simulation a été effectuée au grand marché de Kinshasa, sans observateur indépendant a priori. Et résultat des courses : le temps moyen pour voter est bien de 57 secondes par votant. Problème : les chiffres donnés par la Céni sont incohérents. Elle annonce que 314 votants ont testé la machine en 3 heures. Or 57 secondes par électeurs, si on refait le calcul, cela fait 5 heures de vote et non 3 heures. Après discussion avec un membre de la commission, il semble qu’il y aurait eu une confusion. Ce serait non pas 57 secondes, mais 0,57 minute, soit 34 secondes, ce qui semble improbable aux yeux des experts. Difficile donc d’y voir clair. Interrogé à propos de cet imbroglio le responsable de la communication de la Céni a estimé qu’il avait « d’autres chats à fouetter » que de répondre à ces questions.

Décalage entre « sur-communication » et qualité des informations

On pourrait multiplier les exemples. Samedi dernier, une cérémonie de présentation des moyens logistiques de la Céni était annoncée. On attendait notamment la présentation des camions, avions et hélicoptères que la Commission dit avoir en sa possession pour acheminer le matériel électoral et notamment les machines à voter, dans les temps, un défi de taille à ce stade dans un pays grand comme le Congo. Finalement cette cérémonie a été annulée, là aussi sans explication.

Résultat : la société civile, l’opposition et les experts électoraux dénoncent en chœur un manque de transparence à moins de deux mois du scrutin. « On se demande, s’ils se prennent les pieds dans le tapis ou s’ils entretiennent sciemment le flou et l’ambiguïté », s’interroge un expert électoral qui suit de près ces dossiers. Ce qui frappe, les observateurs, c’est le décalage entre la « sur-communication et la qualité » des informations reçues.

« Leur communication semble plus politique que technique », déplore de son côté la Symocel, la Synergie des missions citoyennes d’observation des élections. « Toutes ces ombres, cela soulève des questions », explique l’un des représentants de cette organisation qui s’inquiète déplore également des incohérences sur la question du financement du scrutin.

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