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La semaine de

Rien que du très classique...

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A nouveau, les règlements de comptes entre adversaires politiques, au Bénin, s’invitent en France. A cette différence près, que la victime d’hier est, aujourd’hui, chef de l’Etat béninois. S’ils savaient à quel point ces rivalités ternissent l’image du pays...

Jean-Baptiste Placca.
Jean-Baptiste Placca. RFI/Claudia Mimifir
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Vingt ans de prison ferme ! Tel est le verdict rendu, ce jeudi 18 octobre 2018, par la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme, contre Sébastien Ajavon. L’homme d’affaires, désormais pleinement en politique, était accusé de trafic de drogue, mais il crie au scandale et au complot, et il demande l’asile politique en France. Un ancien partenaire du chef de l’Etat, passé dans l’opposition, qui se réfugie en France, et contre lequel le Bénin lance un mandat d’arrêt international… D’où vient donc cette impression de « déjà vu » que donne ce tableau ?

Ce qui se joue actuellement entre Cotonou et Paris rappelle, en effet, un spectacle à peu près similaire, servi au peuple béninois et à l’opinion africaine, il y a six ans, pratiquement jour pour jour. Le 21 octobre 2012, Yayi Boni, encore chef de l’Etat, faisait arrêter trois personnes, accusées d’avoir tenté de l’empoisonner. Patrice Talon est alors indexé comme étant le commanditaire de cette présumée tentative d’empoisonnement. Il crie au complot, explique que c’est parce qu’il s’était opposé à l’idée d’un troisième mandat que le président Yayi Boni lui en voulait au point de le soupçonner de lorgner sur son fauteuil. Il se battra de toutes ses forces contre ce qu’il considérait alors comme de fausses accusations et contre la demande d’extradition qui en résultait. Toujours est-il qu’il finit par briguer le suffrage de ses concitoyens et est élu président de la République, avec le soutien de… Sébastien Ajavon, et donc, les voix des électeurs de ce dernier. Curieux, comme la situation dans laquelle se retrouve aujourd’hui Ajavon rappelle celle de l’actuel président Talon. Mais, vous dira-t-on, comparaison n’est pas raison. Le vrai problème n’est pas ce que peut espérer Sébastien Ajavon, mais plutôt tout le mal que les mesquineries entre politiciens peut faire à l’image de leur pays, même s’ils feignent d’en ignorer la gravité.

Quelle est-elle, cette gravité ?

Le Bénin a été, en 1990, le premier pays à organiser une conférence nationale souveraine en Afrique francophone, et le premier à passer à la démocratie, telle que nous la connaissons aujourd’hui en Afrique. Mais le Bénin, en raison de ces mesquineries à répétition dans les plus hautes sphères de l’Etat, n’a jamais pu devenir la première démocratie dans notre Afrique. Parce que cette démocratie, au fond, semble ne s’exprimer qu’à l’occasion des scrutins, notamment de l’élection présidentielle. Après quoi, l’on retourne aux coups bas et aux mesquineries. Jusqu’à la prochaine présidentielle. Et lorsque l’élection se déroule dans la transparence et de manière exemplaire, avec un perdant qui admet sa défaite et félicite le vainqueur, tous finissent par oublier les intermèdes peu glorieux, comme celui-ci, préférant se convaincre que leur pays est à nouveau présentable, requinqué pour cinq nouvelles années… de règlements de comptes. Jusqu’à ce que recommencent les coups bas, hélas ! C’est une distraction, qui est d’autant plus dramatique qu’elle détourne les Béninois de l’essentiel. C’en est tellement affligeant que plus personne n’ose s’en mêler. Vous avez observé le silence gênant et l’indifférence des Africains, à la suite de cette affaire.

Il n’empêche qu’il y a le fond de l’affaire, justement…

De la drogue, retrouvée dans des containers, dans des circonstances au minimum troublantes   pour ce que nous en savons   et qui semblent expliquer pourquoi les accusés, lors d’un premier procès, ont été relaxés. Et pourquoi, manifestement, il n’y a pas eu d’appel. Qu’une cour créée après-coup vienne se saisir de cette affaire déjà jugée et pour laquelle il n’y a pas eu d’appel, est tout aussi troublant. De quoi mettre dans l’embarras la justice française, si elle devait se prononcer sur une extradition de Monsieur Ajavon. Exactement comme étaient dans l’embarras les magistrats à qui l’on demandait, il n’y a pas si longtemps, d’extrader Monsieur Talon vers le Bénin de Boni Yayi.

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