SAF Cacao: la faillite qui va ébranler jusqu’aux banques ivoiriennes

Prolongement malheureux de la chute des cours du cacao en 2016, SAF Cacao, le seul grand négociant ivoirien de cette matière première, est en liquidation. L'onde de choc pourrait se propager au système bancaire de Côte d'Ivoire.

Un homme rassemble des fèves de cacao, en Côte d'Ivoire. AFP Photos/Sia Kambou

SAF Cacao en faillite. C'est une page qui se tourne dans le secteur cacaoyer de Côte d'Ivoire. L'histoire d'un succès qui s'achève en fiasco. La Société Amer et Frères, dirigée par les Ivoiro-Libanais Ali Lakiss, Adnan et Ahmed Amer, n'était qu'un petit intermédiaire qui achetait les fèves aux planteurs en 2004. Douze ans plus tard, SAF côtoyait les plus grands du négoce international du cacao, et commercialisant 10 % de la production ivoirienne, au départ de San Pedro.

L'aventure de l'entreprise ivoirienne tourne au cauchemar

En août 2016, les cours du cacao s'effondrent sous l'avalanche de fèves, une récolte ivoirienne surabondante. SAF avait parié sur l'ascension continue des cours et n'avait pas fixé ses prix. Une spéculation pratiquée par d'autres petits exportateurs locaux, mais qui coûte très cher quand on commercialise plus de 100 000 tonnes de cacao. Le Brexit fait aussi plonger la monnaie britannique, or le cacao ivoirien est coté en livres sterling à Londres, il rapporte donc tout d'un coup beaucoup moins de francs CFA. Enfin, l'un des principaux clients de SAF, le broyeur Transmar, fait faillite...

Le négociant ivoirien de cacao traîne une dette gigantesque

La société de l'argent au Conseil Café Cacao qui a dû payer les producteurs à sa place, ainsi qu'à l'Etat, avec ses taxes impayées, mais surtout aux banques, majoritairement ivoiriennes : 160 milliards de francs CFA d'après le Premier ministre Gon Coulibaly, soit près de 244 millions d'euros ! Une créance énorme que les banques risquent de ne jamais recouvrer puisque SAF est en liquidation depuis le mois de juillet.

La faillite de SAF pourrait donc entraver lourdement le système bancaire ivoirien. Les actifs de SAF, eux, les entrepôts et l'usine de broyage de San Pedro, seront repris par l'américain Cargill ou le français Touton, murmure-t-on dans le secteur du négoce cacaoyer. Un secteur qui s'assainit, avec des règles plus strictes pour l'achat des droits à l'export. Mais un secteur qui se concentre aussi à nouveau entre les mains des multinationales étrangères : seuls 77 exportateurs de cacao ont été autorisés pour la prochaine campagne, un tiers de moins qu'il y a deux ans.