Accéder au contenu principal
Le grand invité Afrique

I.Shango (POCIM): au Mali «la participation n'était pas à la hauteur du 1er tour»

Publié le :

L'invité Afrique de ce matin est Ibrahima Shango, chef de la mission d'observation du POCIM, le Pool d'observation citoyenne du Mali. Quelque 2 000 volontaires, déployés sur tout le territoire malien, ont pu suivre dans les bureaux de vote, le déroulement de l'élection présidentielle. Ibrahima Sangho livre ses premières conclusions au micro de notre envoyée spéciale.

Ibrahima Sango est le chef de la mission d'observation du POCIM, le Pool d'observation citoyenne du Mali
Ibrahima Sango est le chef de la mission d'observation du POCIM, le Pool d'observation citoyenne du Mali RFI/Gaelle Laleix
Publicité

RFI : Au lendemain du second tour de l’élection présidentielle malienne, peut-on tirer un premier bilan ?

Ibrahima Sangho : Le bilan que l’on peut tirer, c’est que l’élection s’est déroulée, le deuxième tour s’est tenu malgré les contestations de certains candidats par rapport aux résultats. Dans la majorité, le peuple malien a accepté les résultats du premier tour et est allé au deuxième tour. C’est une victoire pour notre démocratie parce qu’il n’y a pas eu de contestation majeure dans la rue.

Dans votre dernier communiqué de presse publié hier soir, vous parlez de plusieurs dysfonctionnements que vos observateurs ont pu voir. Est-ce vous pouvez nous en parler, nous donner quelques détails ?

Bien sûr. Les dysfonctionnements, c’est surtout par rapport au centre du pays, la région de Mopti et notamment celle de Touwarou et Ténenkou. Dans la région de Tombouctou, le cercle de Niafounké, il y a eu beaucoup de dysfonctionnements, les matériels électoraux ont été saccagés, les bureaux de vote ont été attaqués et il y a même un président de bureau de vote qui a perdu la vie, qui a été assassiné, dans le cercle de Niafunké, notamment dans la commune de Korokou. Puis la psychose s’est installée et les électeurs n’ont pas voulu aller directement aux élections. Comme lors du premier tour, la menace jihadiste était là, la menace sécuritaire. Dans la région de Ségou, particulièrement dans la zone de Niono, certaines communes n’ont pas ouvert leur bureau de vote par crainte de représailles jihadistes.

A ce stade, nous ne disposons que des tendances mais quel niveau de participation avez-vous pu observer ?

Ce qu’on a observé sur l’ensemble du territoire, c’est une participation qui n’est pas à la hauteur de ce qu’on a vu pendant le premier tour quand il y avait 24 candidats en lice, il y avait cette mobilisation, cet espoir placé dans certains candidats. Mais pendant le deuxième tour, avec les résultats d’abord du premier tour qui ont été contestés par une majorité des candidats. Les candidats déçus se sont réunis pour contester les résultats du premier tour, voulaient un boycott tout simplement du scrutin. Mais à la dernière minute, cette menace a volé. Participer, continuer dans la course et alors le taux de participation s’en est ressenti. Nous estimons que le taux de participation va diminuer, ne va pas atteindre les 43% comme pour le premier tour et va se situer aux alentours de 30%.

Ces polémiques autour du scrutin, des résultats et de la fraude auraient donc mis un frein à la participation ?

On a vu non seulement dans la remontée des données par rapport à ce que l’Observation citoyenne a obtenu comparé aux résultats de l’administration, et aussi au niveau de la commission de centralisation quand il y a eu décompte des voix, la centralisation des résultats, des différences entre les résultats remontés par internet et les résultats menés par le préfet par rapport aux procès-verbaux des opérations des dépouillements. Cela a suscité, pour le deuxième tour, que le ministère de l’Administration territoriale ait pris des instructions qui ont été adressées aux préfets, aux gouverneurs et aux sous-préfets pour que l’administration électorale, qui est essentiellement composée de préfets, de sous-préfets, de gouverneurs qui remontent les informations, soient plus professionnelles.

Par rapport au remplissage des procès-verbaux, des dépouillements, il y aussi une instruction qui a été donnée, aux alentours du 7 août aux préfets et sous-préfets pour leur dire de bien tenir compte du remplissage des procès-verbaux, des dépouillements parce que c’est nouveau, beaucoup d’insuffisances, beaucoup de dépouillements, beaucoup de disfonctionnements ont été constatés et qui posent aussi la formation des agents électoraux.

Ce scrutin a été émaillé d'incidents sécuritaires assez importants. Un faible taux de participation, notamment ce second tour, plus des défaillances dans la remontée des résultats : dans ces conditions, est-ce que cette élection est crédible ?

Depuis le premier tour, nous n’avons pas voulu caractériser l’élection mais nous avons dit qu’il y avait des insuffisances et des dysfonctionnements qui sont quand même assez majeurs. Et nous lions tout cela à la préparation du processus électoral. A trois mois des élections, vouloir prendre une loi électorale pour encadrer le processus électoral, la date de promulgation de la loi électorale, c’est le 23 avril 2018, alors que les élections sont prévues pour le 29 juillet 2018, à trois mois des élections. Et si on prend en compte qu’au Mali, il y a près de 80% d’analphabètes qui ne maîtrisent pas le français. Or, c’est le français qui est la langue d’écriture de la loi électorale. Donc, le temps qui a été mis pour informer la population, de la sensibiliser et l’éduquer par rapport au processus électoral, c’est un manqué. Il aurait fallu s’y prendre tôt. Et aussi l’inclusivité dont on parle dans le processus électoral. Ce ne sont pas seulement l’administration et les partis politiques qui doivent se mettre à relire les textes mais ce sont aussi les organisations de la société civile.

Malheureusement au Mali, les organisations de la société civile ne sont pas associées à souhait sur la question de relecture de la loi électorale et puis sur la question du processus électoral. C’est un processus où il y avait des activités à faire avant et des activités à faire après. Et aussi ce qu’on a déploré dans la loi électorale qui est dite consensuelle par les partis politiques de l’opposition et de la majorité, à trois mois de ces élections, cela viole le droit des citoyens à l’information, cela ne pose pas un cadre réglementaire et transparent en amont de l’organisation du scrutin. Tout cela, c’est des insuffisances qui ne sont pas de nature à crédibiliser vraiment l’organisation d’élections sincères en république du Mali.

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI

Voir les autres épisodes
Page non trouvée

Le contenu auquel vous tentez d'accéder n'existe pas ou n'est plus disponible.