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Le grand invité Afrique

RDC: Cyrille Ebotoko: l'audit citoyen du fichier électoral est «un outil de pacification»

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En République démocratique du Congo, l’enrôlement des électeurs n’est pas encore tout à fait terminé. Les provinces du Kasaï Central et du Kasaï où les opérations avaient été retardées devraient débuter la semaine prochaine, selon la Ceni. Mais, déjà, la conférence épiscopale annonce un audit citoyen du fichier électoral après les premières contestations formulées par l’opposition. Le rassemblement de l’opposition s’est en effet procuré les chiffres du nombre d’électeurs enregistrés, circonscription par circonscription et a constaté des accroissements qu’il juge anormaux. Pourquoi cet audit du fichier électoral ?De quelle nature sont les irrégularités constatées ? Ce fichier est-il crédible ? Cyrille Ebotoko, chargé du programme éducation civique et électorale de la Cenco, répond aux questions de Sonia Rolley.

Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo (RDC).
Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo (RDC). DESIREY MINKOH/AFP
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RFI: Pourquoi avoir décidé d’organiser un audit citoyen du fichier électoral ?

Cyril Ebotoko: L’un des objectifs d’une mission d’observation électorale, c’est de donner de plus en plus de crédibilité à une opération et aujourd’hui, l’observation électorale au Congo doit être aussi considérée comme un outil de pacification. Ce dysfonctionnement que nous avions constaté à la Céni dont un rapport avait été fait, nous aurons le temps de constater si ces dysfonctionnements ont été améliorés ou pas mais aussi de vérifier les statistiques, s’il y a des inscriptions fictives ou pas. Je pense que notre rapport, à ce moment-là, favorisera un processus électoral apaisé.

Le Rassemblement de l’opposition a observé les chiffres sortis de ces centres d’enrôlement qui n’ont donc pas encore été nettoyés, mais ils disent qu’il y a des accroissements de la population électorale. Certaines circonscriptions voient leur population électorale augmenter de plus de 60 % ?

Je ne voudrais pas baser mon intervention sur les déclarations des politiciens. Il faut que je vous dise que les partis politiques n’ont pas observé 3 % des centres d’inscription. Ils ont été quasi absents des centres d’inscription.

Moi, je vous donne un élément technique. Je peux vous en parler parce que ce sont des données qui ont déjà fait l’objet d’échanges avec la Céni. Nos observateurs ont constaté un certain nombre de couacs en ce qui concerne l’enrôlement des personnes qui ne détiennent pas les pièces requises pour se faire enrôler.

Lorsque le cas se présente, ces personnes doivent faire appel à trois témoins pour que l’on puisse les enrôler et les témoignages doivent être approuvés par le chef du groupement, le chef du quartier ou bien le chef des localités. Il se trouve que, dans la pratique, cette procédure n’a pas été suffisamment observée et cela a donné lieu à des enregistrements de personnes non éligibles, notamment des enfants qui n’ont pas atteint l’âge requis, c’est-à-dire qui sont nés avant le 31 décembre 2 000. Ceci nous laisse également entendre qu’il pourrait y avoir d’autres personnes non éligibles à l’inscription des électeurs qui se seraient fait enrôler à cause des dysfonctionnements de cette disposition.

Ces autorités locales n’ont donc pas accepté de rester des journées entières dans les centres d’inscription et les agents des centres d’inscription ont dû alors se débroiller. Par exemple, quand un enfant arrivait, au lieu de chercher les trois personnes, eux-mêmes prenaient la fiche et notaient sur un bout de papier qu’il s’agissait d’un enfant enrôlé pour ensuite présenter ces cas à la Céni qui a d’ailleurs promis d’y pallier par le nettoyage de toutes ces données, pour fiabiliser les fichiers.

On voit la Céni parler de chiffres. L’opposition aussi s’empare maintenant de ses chiffres. Est-ce que ce n’est pas dangereux ?

Je peux vous dire que nous avons constaté que les Congolais se sont fait enrôler massivement. C’est un fait que nous avons vécu. A Kinshasa, c’était extraordinaire. Mais cette course sur les statistiques, c’est quand même étonnant. Nous aurions voulu que la Céni mette davantage l’accent sur la qualité du fichier plutôt que sur le nombre de personnes enrôlées parce que c’est la mauvaise qualité du fichier qui a fait que l’on ne puisse pas avoir les élections en 2016.

Il y a aussi une source d’inquiétude, en tout cas pour certains observateurs, c’est de voir que malgré les mesures qui ont été prises, les femmes sont peut-être moins en train de s’enrôler qu’en 2011 et en 2006. Est-ce que vous avez fait le même constat ?

Oui. Les hommes sont plus enrôlés que les femmes. C’est clair. Les raisons sont multiples. Il y a la pesanteur de la culture mais il y a aussi le fait que les femmes portent le gros du poids de cette situation socio-économique de notre pays qui est connue de tout le monde. Nous avons constaté par exemple, dans les régions où l’opération se déroulait pendant la période de la cueillette et où les femmes étaient très prises aux travaux champêtres, eh bien la Céni a pris des dispositions. Chaque dimanche, par exemple, l’enrôlement des femmes était prioritaire.

Parmi les autres problèmes que vous avez constatés, est-ce que les agents étaient suffisamment formés ?

Nos observateurs ont rapporté que généralement, les agents de la Céni étaient bien formés mais le budget de sensibilisation a manqué.

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