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Le grand invité Afrique

Congo, Clément Mouamba: «il faut préserver les dépenses dans le domaine social»

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Depuis qu’il a été nommé Premier ministre, il y a un an, il s’est très peu adressé à la presse. Longtemps dans l’opposition, Clément Mouamba a été suspendu de son ancien parti l’UPADS avant de se rallier à la majorité et d’accepter de prendre les rênes du nouveau gouvernement nommé au lendemain de la réélection contestée du président Denis Sassou Nguesso. Aujourd’hui, cet économiste chevronné doit gérer une crise budgétaire sécuritaire et politique. Il a accepté de recevoir notre envoyée spéciale à Brazzaville, Florence Morice.

Clément Mouamba, le Premier ministre congolais.
Clément Mouamba, le Premier ministre congolais. STR / AFP
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RFI : Votre pays le Congo connaît une crise budgétaire sans précédent. Quelles sont les mesures que vous avez prises depuis un an pour tenter d’éviter la faillite ?

Clément Mouamba : Cette crise, nous l’avons vue venir puisque le 3 juin 2016 devant l’Assemblée nationale, nous avons bien annoncé que la situation économique et financière du pays était difficile. Donc ça consistait à réviser le budget 2016. Et on a dû voter un budget 2017 en forte réduction de près de 30%. Il y a un certain nombre de postes incompressibles, j’avoue que nous n’avons pas touché la masse salariale. Mais sur beaucoup de postes, il y a une grande réduction, notamment les investissements. Et en même temps, nous pensons qu’il faut continuer à assurer le strict minimum pour que les bourses de nos étudiants continuent à être assurées, que l’Etat puisse fonctionner avec les services essentiels et préserver les dépenses dans le domaine social.

Pensez-vous qu’il y a aujourd’hui une alternative pour le Congo au plan d’ajustement proposé par le Fonds monétaire international (FMI) ?

Il y a déjà le Tchad qui est en programme, la RCA est en programme, et les autres pays sont en train d’ajuster, ce n’est pas totalement exclu. Nous sommes en pleine discussion.

On a le sentiment que le Congo traîne les pieds un peu. Pour quelles raisons ?

C’est ce que les gens disent, mais le Congo ne traîne pas du tout les pieds. Le Congo veut s’assurer que lorsqu’il va proposer des mesures, il est capable de les assumer dans l’intérêt des populations congolaises. Il ne faut pas qu’on prenne le Congo pour le mauvais élève de la Cemac [Communauté économique et monétaire des Etats de l'Afrique centrale]. Ça, je m’inscris en faux. Le Congo par lui-même, nous avons les déficits qui sont importants. Lorsque ces gaps seront de nature à susciter ou à solliciter les besoins extérieurs, le Congo finira bien par prendre les décisions. Ce n’est pas un tabou.

Est-ce que vous craignez que le Fonds monétaire international tente de vous imposer des mesures qui soient impopulaires au niveau social ?

Nous l’avons dit au Fonds monétaire, j’ai été très clair avec eux que c’est un programme du Congo. D’ailleurs, ils l’ont avoué que longtemps ils venaient avec des schémas tout faits, ils les imposaient aux Etats. Cette ère est totalement révolue. C’est notre programme que nous allons mettre en place, et en même temps, ça va nécessiter le concours extérieur. Ils seront les bienvenus.

Le cours du baril de pétrole a fortement baissé. Mais pendant des années, le budget du Congo a été excédentaire. Que pouvez-vous dire aux nombreux Congolais qui se demandent aujourd’hui où est cet argent ?

L’argent du Congo excédentaire, oui. Nous avons eu quelques excédents budgétaires sur certaines périodes. Mais à mon arrivée au gouvernement, je l’ai constaté que ces excédents n’y étaient plus. Ils ont été consommés dans des charges qui se sont imposées à la République. Je n’en dis pas plus.

Comment expliquez-vous que le Congo ne soit pas en mesure de fournir au FMI le détail de l’utilisation des recettes pétrolières ces dernières années, comme le FMI le réclame ?

Madame, c’est vous qui me le dites. Depuis que je suis là, je n’ai pas eu le sentiment que mes services faisaient de la résistance.

Le questionnement du FMI porte sur les années précédentes ?

Moi, ce qui m’engage, c’est ce qui a été fait sur l’année dernière.

Dans ce contexte, est-ce que vous craignez un vote sanction aux législatives qui se préparent ?

Quelle sanction ? Mais pas du tout. Ce n’est pas parce que la situation est difficile que pour cela il faut sanctionner le gouvernement. Et le sanctionner pour le remplacer par quoi ? C’est la vraie question.

Est-ce que vous pensez que ces élections peuvent être apaisées alors que deux anciens candidats à la présidentielle sont en attente de procès et que la situation sécuritaire n’est pas résolue dans le département du Pool ?

Les élections doivent être apaisées.

Est-ce qu’elles peuvent l’être dans ce contexte ?

Elles le seront. Et le Pool, on parle du Pool. Mais le Pool, c’est résiduel. Ce n’est pas tout le Pool. La partie qui pose problème, ça concerne à peine le quart du département du Pool. Mais c’est toujours le Congo qui a une blessure quelque part. Nous en sommes conscients. Si jamais il y a des difficultés dans cette petite partie-là, nous la solution que nous préconisons, ce n’est pas de faire des élections là où il y a un risque, mais nos textes qui existent disent également que lorsque l’élection n’a pas pu avoir lieu, les députés qui sont dans cette localité, on les reconnait provisoirement jusque-là paix revienne. Mais ce n’est pas un schéma que j’affectionne.

On recense aujourd’hui environ 30 000 déplacés qui ont le sentiment d’être abandonnés, livrés à eux-mêmes, sans assistance. Est-ce qu’aujourd’hui le gouvernement a le moyen d’aider ces populations qui sont prises en étau ?

Tous ceux qui ont pu quitter ces localités ne sont pas du tout abandonnés, mais leur dire qu’on leur donne toute l’aide qu’elles veulent avoir, c’est certain, elles ne sont pas du tout abandonnées. Ceux qui sont dans la zone où exerce monsieur Ntumi, s’il y a encore des citoyens dans cette zone-là, c’est sûr que celles-là sont en difficulté. Nous sommes bien conscients qu’il y a des gens qui veulent bien sortir de cette zone. Nous sommes également conscients que lorsqu’on fait sortir certaines personnes de ces zones, il faut en avoir le cœur net que ce se sont bien des gens qui ne sont pas des faux ninjas déguisés, qu’une fois arrivés à Brazzaville se transformeraient en poseurs de bombes.

De nombreux témoignages fustigent également l’attitude des forces de l’ordre dans le Pool. Des cas sont signalés de maisons pillées, de maisons brûlées, d’arrestations arbitraires, parfois de cas de torture. Cela vous préoccupe ?

Cette accusation, moi je considère qu’elle n’est pas du tout fondée. Qu’on m’en apporte les preuves ! Si ce sont des preuves tout à fait avérées, ces militaires, ces policiers seront sanctionnés. Nous recherchons Ntumi, mais les forces de l’ordre ne sont pas là-bas pour traquer les populations congolaises. Donc il ne faut pas qu’on nous amène un mauvais débat, que le gouvernement volontairement se comporterait en train de martyriser les populations du Pool.

Pourquoi ne pas laisser les organisations des droits de l’homme aller enquêter sur place pour en avoir le cœur net ? Beaucoup dénoncent un huis clos aujourd’hui ?

Mais il n’y a pas de huis clos. Moi j’ai même dit que pour certains organes qui le voulaient bien, j’étais prêt à les accompagner dans le Pool. Je l’ai dit. Mais il n’est pas question d’amener les partenaires internationaux dans une zone lorsque nous avons la certitude qu’il y a quand même un danger. Aider les gens, ce n’est pas en se faisant hara-kiri.

Les partisans du pasteur Ntumi estiment que les garanties apportées par ce couloir humanitaire que le gouvernement propose ne sont pas suffisantes et que ce n’est pas une solution. Ils veulent un dialogue.

Nous ne dialoguons pas avec un terroriste. Il n’y a pas la peine de mort au Congo. Monsieur Ntumi lui qui sait très bien qu’il faut qu’il se présente aux forces de l’ordre. Il ne sera pas tué. Il vient. Il subit son procès. C’est tout ce qu’on lui demande. Et qu’il laisse tranquilles les populations qui sont dans cette zone. Pour nous, c’est un bandit qui n’a pas le courage d’affronter la justice de son pays.

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