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Festival de Cannes / Cinéma / Chine

Cannes: avec «Le lac aux oies sauvages», Diao Yinan déborde d’imagination

« La lumière permet à la nuit de voir. » Ainsi Diao Yinan nous explique le rôle de la lumière dans son nouveau film noir. Après avoir décroché en 2013 à la Berlinale l'Ours d’or pour Black Coal, le réalisateur chinois espère remporter ce 25 mai au soir la Palme d'or au Festival de Cannes. Avec Le lac aux oies sauvages, il a composé un film de gangsters d’une esthétique surprenante et d’une efficacité sidérante. Entretien.

Diao Yinan, réalisateur du polar « Le lac aux oies sauvages », en lice pour la Palme d’or au Festival de Cannes 2019.
Diao Yinan, réalisateur du polar « Le lac aux oies sauvages », en lice pour la Palme d’or au Festival de Cannes 2019. Siegfried Forster / RFI
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Diao Ninan nous plonge avec brio dans les milieux mafieux de l’empire du Milieu. Au cœur de l’histoire se trouve la lutte impitoyable entre deux bandes de voleurs de moto. Après avoir tué un policier, Zhou Zenong (Hu Ge), un des chefs de bande, est obligé de prendre la fuite. Commence alors une incroyable chasse à l’homme dans un État de surveillance et une rencontre improbable avec une « baigneuse », Liu Aiai (Gwei Lun-mei), une prostituée au bord du lac aux oies sauvages…

D’un point de vue cinématographique, le réalisateur chinois montre son ambition de renouveler le genre. Des scènes d’action ahurissantes alternent avec de la poésie pure, des chansons populaires ou des images dignes d’une installation d’art contemporain.

RFI : Avec Le lac aux oies sauvages, vous avez fortement changé le style de narration. Un nouveau film signifie-t-il pour vous toujours une nouvelle vie en tant que cinéaste ?

Diao Yinan : Oui, tout à fait. Pour moi, chaque nouveau film doit dépasser l’ancien.

Il pleut beaucoup dans votre film. Est-ce une métaphore pour une société chinoise qui va mal ?

Non, je n’ai pas pensé à utiliser la pluie comme une métaphore pour la société chinoise. Pour moi, c’est plutôt un symbole poétique de la solitude. Comme si la pluie nous immergeait dans la solitude. Cela reflète la personnalité de mes deux personnages principaux, le chef de bande et la prostituée.

Le lac aux oies sauvages est un polar doté de scènes très artistiques faisant allusion aux grands maîtres du cinéma noir ou de la peinture ancienne. En même temps, on y trouve des séquences assez kitsch. On entend également des chansons comme Rasputin de Boney M. ou Dschinghis Khan du groupe du même nom, connu du Concours Eurovision. Votre but, c’était de faire un vrai film populaire ?

Bien sûr. Pour que les spectateurs s’imprègnent ou entrent dans le film, il est très important d’avoir une histoire qui tient et qui attire toute l’attention du public. En même temps, en tant que réalisateur, j’ai une approche stylistique. Je veux exprimer quelque chose concernant la vie ou la société en générale. Pour moi, un film n’est pas seulement un moyen de divertissement.

Une scène est particulièrement époustouflante. Le plan où un parapluie transperce le ventre d’un homme pour s’ouvrir de l’autre côté du corps. C’est à la fois un moment d’horreur et de terreur, mais aussi d’action, d’humour, et d’une esthétique, d'une beauté extrême. Comment décriviez-vous le style cinématographique de cette séquence ?

Cette scène vient de ma propre imagination. À partir du moment où j’avais l’idée, cette scène était écrite tout de suite et très rapidement. En ce qui concerne l’image esthétique, pour moi, cette scène ressemble un peu à une installation dans l'art contemporain et s’inspire aussi d’un travail sur les couleurs.

Le travail sur la lumière est un des nombreux aspects merveilleux de votre film. Par exemple dans une séquence avec les phares de motos où chaque marque de moto correspond à une teinte différente de lumière. Pour vous, la lumière, est-ce un personnage à part dans le film ?

Exactement, pour moi, la lumière est un personnage. Un personnage qui influence voire détermine l’ambiance de beaucoup scènes. Dans mon film, on peut même entendre la lumière.

C’est-à-dire que dans votre casting, il y a les malfrats et les mafieux, les « baigneuses » et la police, etc. La lumière fait également partie des personnages ?

Tout à fait. La lumière permet à la nuit de voir. C’est la fenêtre de la nuit.

Vous affichez une sensibilité très développée pour des scènes de groupes spécifiquement dynamiques, très chorégraphiées et puissantes. Cela rappelle parfois même les bons films de Bollywood. Est-ce que le cinéma indien vous inspire ?

Les films de Bollywood n’ont pas vraiment influencé ce film, mais à l’âge de 7 ou 8 ans, j’avais déjà regardé des films indiens. Et à l’âge adulte, j’ai vu quelques films indiens du réalisateur bengali Satyajit Ray (1921-1992). Mais je n’ai pas d’autres préférences dans ce domaine.

Votre film va sortir en Chine, mais aussi en France, Allemagne et dans plein d’autres pays. Comment imaginez-vous votre public pendant le tournage ?

Ce n’est pas moi qui décide du public, c’est le film lui-même qui décide. Bien sûr, nous espérons que les valeurs et les messages véhiculés par ce film pourront être entendus et vus par un maximum de gens. Mais on n’est pas non plus un blockbuster de Hollywood. Ce film va attirer un certain segment d’audience. Je suis convaincu que par sa couleur et sa lumière, son bon sens et son histoire, il peut attirer un maximum de public dans les salles.

Scène du film « Le Lac aux oies sauvages », de Diao Yinan.
Scène du film « Le Lac aux oies sauvages », de Diao Yinan. © Memento Films

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