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Photo: Olivier Papegnies expose sur une milice au Burkina

Le photographe belge Olivier Papegnies expose jusqu’au 23 février à Bruxelles ses images de la milice d’auto-défense Koglweogo, qui a pris de l’ampleur au Burkina depuis la chute du président Blaise Compaoré. Des images en noir et blanc qui dévoilent différents aspects d’une « faillite d’Etat », avec l’essor de cette forme de justice populaire.

De nouveaux membres ont rejoint le groupe de Koglweogo de Potiamanga, octobre 2017
De nouveaux membres ont rejoint le groupe de Koglweogo de Potiamanga, octobre 2017 Crédit/Olivier Papignies
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Qui sont les Koglweogo, « gardiens de la brousse » en langue moré, une milice d’auto-défense qui a pris une ampleur nationale au Burkina ? Depuis 2015, ces villageois armés font la loi dans les zones rurales, pour pallier le manque d’effectifs policiers et protéger les civils des violeurs, voleurs, braqueurs et autres coupeurs de route. Ils se sont progressivement étendus aux villes, dont la capitale Ouagadougou. 

D’un reportage sonore, vidéo et photographique fait avec la journaliste Valentine van Vyve en 2017 et 2018 pour le quotidien La Libre Belgique, Olivier Papegnies a tiré une exposition intitulée « Koglweogo, miroir d’une faillite d’Etat ». Cette série d’images en noir et blanc aux tirages contrastés s’attaque au sujet directement, sans aller dans le « dans le côté coloré » du contexte, affirme le photographe. Son travail, exposé à Bruxelles par la galerie Hangar pour la première fois, a obtenu en septembre 2018 le « Visa d’or de l’information numérique », attribué par France Info lors du festival Visa pour l’image de Perpignan.

Humiliations et châtiments corporels

La photo phare de l’exposition montre un groupe d’hommes en uniformes dans un champ, armés et menaçants. « Treize nouveaux membres ont rejoint le groupe de Potiamanga, qui se compose désormais de 36 personnes », peut-on lire en légende.

D’autres clichés montrent un homme âgé, enchaîné à un arbre et entouré par la foule. Va-t-il être jugé par un tribunal populaire, composé des « sages » et anciens du village ? Pas encore… « Il était soupçonné, explique le photographe, d’avoir été un indicateur de bandits ghanéens qui ont entrepris d’incendier un parc de motos des Koglweogo dans le Centre-Sud, une région du Burkina frontalière du Ghana. Il y avait un doute sur l’accusation, et cet homme a subi une grosse humiliation ». Le dos d’un homme fouetté avec des branches d’arbre enduites de piment se trouve au centre d’une autre photo. Sa faute : avoir été pris en flagrant délit de vol de téléphones portables.

Aux châtiments corporels s’ajoutent parfois des amendes. « Avec ou sans amendes, il y a toujours une transaction en argent liquide pour que les accusés et leur famille défraient les frais d’essence des Koglweogo », précise Valentine van Vyve, qui a rédigé les légendes de l’exposition dans l’esprit du reportage.

L’exposition a pris le parti de planter le décor de la milice, avec du contexte. Par exemple, ces enfants joyeux tirant une charrette ou sautant dans l’eau, « qui se sentent en sécurité et ne sont plus rackettés sur la route pour une cargaison de maïs », note le photographe. L’enquête n’explore pas le côté traditionnel des milices, dont les membres passent par un rite d’initiation. Elle n’a pas non plus pris le risque d’aller dans les régions nord, gangrenées par le terrorisme islamiste, que les Koglweogo combattent aussi.

Un narratif neutre et équilibré

Ce qui a le plus frappé Olivier Papignies dans ce reportage fait en deux étapes de 15 jours : « Le manque de sentiment dans la punition, assez dure à vivre. C’est la loi du talion. Les verdicts se basent sur du flagrant délit ou des aveux, dont on ne sait trop dans quelles conditions ils sont obtenus ». Les journalistes font état de « l’inquiétude des défenseur des droits humains face un une milice qui ne respecte pas la loi et devient difficilement maîtrisable, mais dont la popularité empêche les représentants politiques de les combattre ouvertement ».

Une légende donne la réponse à ces objections d’un chef de Po, dans le Fada N’Gourma : « Quand un éleveur se fait voler sa vache, alors qu’elle représente tout son patrimoine, en quoi les droits de l’homme lui sont-ils utiles ? Ici, il n’y a pas d’institution fonctionnelle ni de moyens. (…)  Nous, nous voulons faire en sorte qu’un voleur ne vole plus. Et si ça demande de lui retirer une partie de sa dignité, nous n’avons aucun problème ».

Olivier Papegnies, photographe aguerri de 48 ans, a fait un travail sur les chrétiens du Liban et poursuit un projet sur le football féminin. Il n’en est pas à son premier reportage en Afrique, loin s’en faut. Il a travaillé en Côte d’Ivoire sur les grossesses non désirées en milieu scolaire, au Bénin sur les enfants des rues avec les ONG Médecins du monde et Terres rouges. En République démocratique du Congo (RDC), il a suivi en 2011 et 2012 un groupe de mercenaires belges dans le Manyema, pour enquêter pour le Soir Magazine sur leur riposte face au groupe armé du M23. Une rébellion finalement matée en octobre 2013 grâce à l’effort conjoint de l’armée régulière et de la brigade africaine d’intervention de la Monusco.

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