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Corée du Sud

«Intention», le film qui relance l'affaire du naufrage du Sewol en Corée du Sud

Intention est le nom d’un documentaire-choc qui fait un carton au box-office coréen, avec plus d’un demi-million d’entrées. Un record absolu pour un documentaire. Ce film rouvre le dossier toujours douloureux du Sewol, ferry dont le naufrage, il y a quatre ans, avait fait 304 morts, en majorité des lycéens.

Kim Ji-young et Kim Ou-joon, les auteurs du film «Intention». Séoul, mai 2018.
Kim Ji-young et Kim Ou-joon, les auteurs du film «Intention». Séoul, mai 2018. RFI / Frédéric Ojardias
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De notre correspondant à Séoul,

Il s'agit d'un film-enquête. Ses auteurs, Kim Ji-yeong et Kim Ou-joon, démontrent preuves à l’appui que l’enquête officielle comporte de nombreuses incohérences. Selon eux, les données GPS du navire ont été manipulées. En s’appuyant sur d’autres données, ainsi que sur des vidéos récupérées quand le ferry a été renfloué, ils montrent qu’avant le naufrage, le Sewol a suivi une étrange trajectoire en zigzags, ponctuée de violents à coups. Leur conclusion, c’est que l’ancre du navire a été descendue à plusieurs reprises en pleine course, dans le but de provoquer ce virage très brusque - et inexpliqué - qui a fait chavirer le bateau.

Cela paraît complètement fou. Ce naufrage meurtrier aurait-il été intentionnel ? C’est la thèse du film. L’hypothèse d’une fraude à l’assurance qui aurait mal tourné a été évoquée. Mais les auteurs se gardent d’offrir une explication. Le producteur, Kim Ou-joon, un journaliste célèbre en Corée du Sud, raconte qu’il a juste voulu offrir les preuves qu’ils ont accumulées, dans le but de rouvrir l’enquête : « Notre film s’arrête là où les questions commencent. Si le navire a été coulé intentionnellement, alors qui l’a fait ? Pourquoi ? Qui a caché ces faits, et dans quel but ? C’est au gouvernement de mener cette enquête, pas à nous. »

→ À relire : Trente-six ans de prison pour le capitaine du Sewol

Les preuves apportées par le film sont troublantes, mais il est difficile de se prononcer. Certains évoqueront bien sûr la « théorie du complot ». Ce qui est en tout cas révélateur, c’est le succès du film ; quatre ans après le drame, l’impact du naufrage sur la psyché nationale reste immense. Il faut rappeler que tout un pays impuissant a vu ces enfants mourir sous ses yeux, en direct à la télévision. Le traumatisme est si violent que beaucoup refusent d’accepter les explications officielles. La tragédie a aussi provoqué une profonde remise en question des Coréens, de leur modèle socio-économique...

La remise en cause d’une « certaine idée de la modernité » (1) comme le souligne Kim Ou-joon : « Pour les Coréens, pour chacun d’entre nous, ce naufrage est un traumatisme. Il soulève une question fondamentale. Sommes-nous protégés par notre pays ? Nous avons perdu confiance entre notre propre communauté. » Son documentaire, dont le titre coréen est « Ce jour-là en mer », a été réalisé grâce au financement participatif de 16 000 donateurs. Un signe de plus de la fascination que le Sewol continue de susciter.

→ Écouter sur RFI : Les étudiants de la « génération Sewol » se mobilisent


(1) Citation d’un excellent article de Benjamin Joinau, « Qu’est-ce qui coule quand un bateau coule ? », publié dans le numéro spécial Corée de la revue Critique, janvier-février 2018, « La Corée, combien de divisions ? »

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