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Pakistan: le clan Sharif menacé par la police de caractères Calibri
Alors que le Premier ministre pakistanais est visé par une enquête faisant suite aux Panama Papers, la défense de Nawaz Sharif a présenté des documents datés de 2006, mais utilisant une police de caractères Microsoft commercialisée en 2007. Des faux, d’après les experts, alors que le Premier ministre et sa fille sont déjà embourbés dans un scandale de corruption.
Ce n’est qu’un détail de forme, dans le dossier présenté par la défense de Nawaz Sharif dans une enquête pour corruption. Mais la police de caractères utilisée pourrait bien faire chuter le Premier ministre pakistanais. Il s’agit de Calibri, une police de la famille « sans serif », dessinée par Lucas de Groot et distribuée commercialement par Microsoft depuis 2007. Or les documents rédigés avec cette police de caractères sont datés de… février 2006. Consultés par la commission d'enquête civilo-militaire, les experts affirment que ce sont des faux.
La famille Sharif mise en cause par les Panama Papers
Ces documents visaient à prouver que Maryam Sharif, la fille de Nawaz Sharif pressentie pour être son héritière politique à un an des élections, était fiduciaire de luxueux appartements londoniens sur lesquels enquête la Cour suprême – et non leur propriétaire bénéficiare. L’enquête fait suite à un scandale né en 2016 après la publication des « Panama Papers », où des biens détenus par la famille Sharif via des sociétés off-shore avaient été cités. Un précédent rapport d’enquête ayant conclu que la famille Sharif vivait au-dessus de ses moyens officiels, Maryam Nawaz avait promis que ce rapport serait « anéanti » devant le tribunal.
Lundi, un nouveau rapport d’enquête mentionnait dans une note : « J’ai identifié la police de caractères utilisée pour les deux déclarations : il s’agit de la police “Calibri”. Calibri n’était pas commercialisée avant le 31 janvier 2007. Par conséquent, les déclarations ne sont pas correctement datées et ont probablement été créées ultérieurement. » Ce rapport d’enquête n’est pas contraignant juridiquement, mais la Cour suprême doit tenir lundi une nouvelle audience sur cette affaire.
Le #FontGate fait la joie des internautes
Sur les réseaux sociaux, le hashtag #FontGate n’a pas tardé à émerger dans les tweets d’internautes sarcastiques. Le journaliste Mubashir Zaidi, traduit et cité par l’AFP, a ainsi conseillé ironiquement au Premier ministre de rédiger sa lettre de démission en police Calibri. Sabena Siddiqi, une autre journaliste pakistanaise, a elle aussi raillé la dynastie Sharif en paraphrasant l’Ancien Testament :
From what heights have the mighty fallen...
Sabena Siddiqi (@sabena_siddiqi) 11 juillet 2017
Betrayed by a simple font named #Calibri pic.twitter.com/MGizUSbhBd
(De quelles hauteurs les puissants sont tombés...Trahis par une simple police de caractères #Calibri)
Political cartoonist @sabirnazar1 's exclusive cartoon for #SamaaTV on #Calibri font fiasco pic.twitter.com/uei7GNGw9J
SAMAA TV (@SAMAATV) 13 juillet 2017
Un journaliste de la chaîne pakistanaise Samaa TV a même remarqué que la bataille du Calibri avait gagné Wikipedia. Partisans et adversaires du clan Sharif modifient à tour de rôle la page du Calibri, au point que cette dernière a fini par être temporairement protégée de toute manipulation.
Wikipedia entry on 'Calibri' was edited at least 8 times from Pakistan today pic.twitter.com/6ALvyFGZuD
omar r quraishi (@omar_quraishi) 11 juillet 2017
Maryam Nawaz, ordinairement très active sur Twitter, n’a pas réagi publiquement à la polémique, mais les partisans du parti de son père, le PLM-N, ont rappelé que la police Calibri existait depuis 2004, date de sa création par Lucas de Groot. Dans un communiqué à l’AFP, ce dernier a toutefois estimé « improbable » qu’elle ait été utilisée dans un document officiel de 2006. Calibri n’existait alors que dans des versions beta des logiciels Microsoft, et ne pouvait être obtenue qu’au prix de « sérieux efforts ».