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Australie / Indonésie

Indonésie: Widodo inflexible sur les deux Australiens condamnés à mort

Jakarta a refusé jeudi 5 mars la proposition de Canberra d'échanger trois Indonésiens emprisonnés en Australie pour trafic d’héroïne contre les deux Australiens condamnés à mort en Indonésie pour trafic de drogue. Andrew Chan et Myuran Sukumaran avaient été emmenés la veille sur l’île de Nusakambangan, où ils doivent être fusillés dans les prochains jours. Aucune date précise n’a été donnée. Les condamnés seront prévenus 72 heures avant.

Les Australiens Andrew Chan et Myuran Sukumaran dans une cellule provisoire en attendant leur procès, à Denpasar (Bali), le 21 septembre 2010.
Les Australiens Andrew Chan et Myuran Sukumaran dans une cellule provisoire en attendant leur procès, à Denpasar (Bali), le 21 septembre 2010. REUTERS/Murdani Usman/Files
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L’Australie fait tout pour empêcher ces exécutions. Fin février, le Premier ministre Tony Abbott avait téléphoné au président indonésien Joko Widodo ; dix jours avant, six anciens Premiers ministres australiens avaient lancé ensemble un appel à la clémence dans le journal The Australian ; les procureurs généraux de chaque Etat d’Australie ont eux envoyé une lettre au gouvernement indonésien ; les familles des deux condamnés ont présenté une pétition de 150 000 signatures ; l’évêque et le grand Mufti de Sydney ont lancé un appel à Joko Widodo pour qu’il sauve les deux trafiquants. Quant à leurs avocats, ils ont épuisé tous les recours possibles : ils sont même allés jusqu’à contester la décision du président indonésien de ne pas accorder sa grâce - une procédure extrêmement rare. Sans succès.

Les « Bali Nine »

Andrew Chan et Myuran Sukumaran ont été arrêtés par la police indonésienne en 2005 à Bali, avec les sept membres de leur équipe. Les « Bali Nine » (« Les Neuf de Bali ») étaient en possession de 8,3 kilos d’héroïne. Les autorités accusaient les deux Australiens de diriger les Neuf de Bali qui faisaient passer la drogue de l’Indonésie vers l’Australie. En 2006, les deux hommes sont condamnés à mort, sachant qu’en 2008 Jakarta fait une pause dans les exécutions, avant de les reprendre en 2013. Depuis, dix personnes ont été fusillées.

Andrew Chan et Myuran Sukumaran ont aujourd’hui une trentaine d’années. Leurs avocats plaident l’erreur de jeunesse et affirment qu’ils se sont réformés pendant leurs dix années de captivité : l’un enseigne aujourd’hui la Bible en prison (ainsi que des cours de cuisine), l’autre est dorénavant présenté comme un artiste.

Un président indonésien inflexible

Joko Widodo est arrivé au pouvoir en janvier dernier, il a tout de suite prévenu qu’il ne ferait preuve d’aucune clémence envers les trafiquants de drogue. L’Indonésie est en état d’urgence, a expliqué le président : jusqu’à cinquante personnes meurent chaque jour de la drogue dans un pays qui compte quatre millions et demi de toxicomanes. Aujourd’hui, 60 personnes sont dans le couloir de la mort pour des affaires de drogue, la moitié sont des étrangers. Le président Widodo ne veut pas faire preuve de faiblesse devant ses électeurs en reculant sur ce sujet, surtout si c’est après avoir subi des pressions de l’étranger. D’ailleurs en janvier peu après son élection, il avait déjà fait exécuter six personnes dont cinq étrangers.

Des relations très tendues

Parmi ces cinq étrangers, des ressortissants du Brésil et les Pays-Bas : les deux pays ont rappelé leurs ambassadeurs en Indonésie. Mais comme un autre de ses citoyens risque d’être prochainement exécuté, la présidente brésilienne Dilma Rousseff a aussi refusé les lettres de créance du nouvel ambassadeur indonésien au Brésil. Du coup, Jakarta serait en train de réévaluer sa décision d’acheter à Brasilia des avions de combat et des lance-roquettes.

En ce moment évidemment, les relations sont surtout tendues avec Canberra : Tony Abbott a quand même rappelé à l’Indonésie, il y a trois semaines par voie de presse, qu’elle était bien contente de trouver l’Australie à ses côtés dans les moments difficiles – par exemple après le tsunami de 2004. Fureur des Indonésiens : plusieurs groupes ont commencé à collecter des pièces pour rembourser les Australiens. Ce mercredi, Tony Abbott a quand même cherché à calmer le jeu, expliquant que l’Australie ne devait pas laisser la colère mettre à mal sa relation avec l’Indonésie si Andrew Chan et Myuran Sukumaran étaient fusillés.

Plusieurs étrangers dans le couloir de la mort

En comptant les deux Australiens, neuf étrangers (brésilien, français, nigérian, philippin et ghanéen) n’ont pas obtenu la grâce présidentielle. Pour ce qui est du Français, Serge Atlaoui, arrêté en 2005 dans un atelier clandestin de production d’ecstasy et condamné à mort en deux ans plus tard, ses avocats ont déposé un recours devant la Cour suprême pour obtenir une révision du procès. Fin janvier, le président français avait lui aussi téléphoné à son homologue indonésien pour que l’exécution n’ait pas lieu. Mais Joko Widodo ne montre toujours aucun signe de fléchissement, d'hésitation sur ces condamnations à mort.

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