Accéder au contenu principal
Chine

Un documentaire sur la pollution fait le buzz en Chine

Sous le dôme est un documentaire qui fait beaucoup de bruit en Chine. Réalisée par une ancienne présentatrice vedette de la télévision d’Etat, la vidéo diffusée sur internet a affiché plus de 155 millions de vues ce week-end. Elle raconte sans tabou les dégâts causés par le brouillard de pollution qui envahit régulièrement les mégalopoles chinoises.

Une jeune femme en vélo à Shanghaï se protège de la pollution avec son écharpe.
Une jeune femme en vélo à Shanghaï se protège de la pollution avec son écharpe. REUTERS/Aly Song
Publicité

Chai Jing en a fait un « combat personnel ». L’ex-présentatrice de la télévision centrale de Chine confie avoir eu l’idée de ce documentaire après avoir découvert que sa fille était atteinte d’une tumeur bénigne au poumon, une tumeur attribuée à la pollution. En jean et petit haut blanc, Chai Jing s'exprime devant un immense écran vidéo baigné dans la pénombre. Les visages des spectateurs dans la salle sont graves. Par défi, certains portent un masque antipollution.

Un ton percutant

Cette mise en abyme donne du rythme à la démonstration et un ton inhabituel dans ce genre de format. Vivre sous cloche, c’est prendre conscience des dangers pour la santé induits par cette pollution omniprésente. « Je n’étais pas particulièrement inquiète, je n’ai jamais porté de masque avant la naissance de ma fille », explique ainsi l’ex-vedette de la télévision d’Etat. Sur l’écran les images défilent. Vivre sous dôme, c’est ce policier qui lève désespérément ses gants blancs sur une avenue où le brouillard a avalé jusqu’aux phares des voitures ; c'est un ours en peluche portant un masque de chirurgien de l’hôpital où a été accueillie la fille de Chai Jing ; ce sont encore ces courbes montrant l’accélération du nombre des cancers, ainsi que ces méchantes particules de moins de 2,5 microns, les tristement célèbres PM 2.5 issues notamment des pots d’échappement, et représentées ici sous la forme de vilains personnages animés allant se loger dans les alvéoles de nos poumons.


Le documentaire vidéo a enregistré plus de 155 millions de vue
s ce week-end

Poissons flottants le ventre au mauvais air des rivières, fumée noire des centrales à charbon brouillant les paysages, ciels sans étoiles… L’effet est radical : Sous le dôme avait été vu dimanche 1er mars après-midi 20 millions de fois rien que sur le site de partage de vidéo Youku. Au total, près d’un Chinois sur neuf a vu le film sur internet ce week-end. Signe que la pollution est devenue le sujet de préoccupation majeure des Chinois, signe surtout qu’il est désormais impossible de censurer ce que les autorités se sont longtemps bornées a qualifier pudiquement de « brouillard ». Le Quotidien du Peuple a ainsi été le premier à afficher la vidéo son site, suivi par d’autres médias officiels. Chai Jing, 39 ans, ne mâche pourtant pas ses mots et conclut sa démonstration en appelant le peuple à « dire non » et à « se lever » pour changer la situation.

Un documentaire test pour le gouvernement

Devant l’avalanche de commentaires, dont certains très hostiles aux institutions, les censeurs ont toutefois repris du balai et fait le ménage dans les forums. Dimanche soir, le documentaire avait notamment disparu de la Home de certains sites populaires. Lancé par Tencent, le premier portail web de Chine, et toujours en accès sur Youku lundi 2 mars, le documentaire a, de toute façon, largement atteint sa cible. Est-ce une nouvelle manière pour le Parti communiste chinois de tester un sujet d’opinion avant la réunion annuelle de l’Assemblée nationale populaire ce jeudi 5 mars ? Est-ce plus simplement une façon de faire passer le fléchissement de l’activité économique, lié au « changement de modèle de croissance » initié par le douzième plan quinquennal ?

La pollution au cœur du discours officiel

Ce n’est de toute façon pas la première fois que le pouvoir chinois reconnaît l’existence du problème. La pollution revient chaque année dans la bouche des officiels avant la réunion du Parlement. « Si la pollution est devenue un sujet politique, c’est parce qu’elle incarne, peut-être mieux que tout autre fléau chinois, l’usure de la parole publique, écrit Gabriel Grésillon. En matière industrielle, la Chine s’est construit une réputation : elle décide, et elle exécute. Mais en matière environnementale, elle s’illustre avec constance par son inaction. Elle peut subventionner massivement les énergies renouvelables et devenir un redoutable producteur de panneaux solaires et d’éoliennes. Mais elle ne parvient pas à enrayer l’effrayante dégradation de la qualité de son air, de ses sols, de ses eaux », poursuit l’auteur de Chine, le grand bond dans le brouillard publié aux éditions Stock.

Une critique sous contrôle

La pollution est aussi une manière de ne pas parler d’autres choses. Si Sous le dôme se permet de critiquer le manque de décisions de certains responsables gouvernementaux en province, jamais il ne remet en cause l’action du gouvernement central. Une prudence qui permet à ce brillant documentaire de près d’une heure quarante-cinq d’exister. « La réalisation nerveuse rappelle Une vérité qui dérange, de l’ancien vice-président américain Al Gore », estime de son côté l’AFP. Nul doute que Chai Jing sera invitée à Paris pour la conférence sur le climat organisée par la France en décembre 2015.

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI

Partager :
Page non trouvée

Le contenu auquel vous tentez d'accéder n'existe pas ou n'est plus disponible.