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Iran

Iran: Hassan Rohani réussira-t-il son pari?

Les propos du nouveau président iranien envers les Occidentaux sont certes conciliants. C'est en cela que son discours diffère de celui d'Ahmadinejad. Mais l'Occident attend un changement de fond dans la politique étrangère de la République islamique. Tant que le dossier nucléaire sera sur la table, il sera difficile de suivre la voie du dialogue.

Hassan Rohani devant l'Assemblée générale de l'ONU.
Hassan Rohani devant l'Assemblée générale de l'ONU. REUTERS/Ray Stubblebine
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Que pouvons-nous retenir du discours très attendu du président iranien, Hassan Rohani, à la tribune de l'Assemblée générale des Nations unies et de ses déclarations en marge de cette intervention ? Quels sont les principaux points de divergence entre son discours et celui de son prédécesseur sur les questions internationales impliquant directement ou indirectement l'Iran ? Commençons par le sujet de prédilection de son prédécesseur.

La question de l’Holocauste

Contrairement au discours ouvertement belliqueux de Mahmoud Ahmadinejad, le discours du nouveau président iranien envers les Occidentaux se veut conciliant. Sur la forme, aucune agressivité verbale n'a été repérée, aussi bien dans son intervention du 25 septembre à la tribune de l'ONU que dans ses déclarations face aux journalistes.

Sur la chaîne de télévision américaine CNN, il a certes reconnu l'existence de l'Holocauste en le qualifiant de « grand crime » commis par les nazis contre les Juifs. Mais il a aussitôt fait planer le doute sur l'ampleur et la monstruosité de ce crime, en précisant d'abord qu'il n'était pas un historien pour estimer son ampleur et qu'il revenait aux historiens de le faire.

Ensuite, en assimilant l'Holocauste à tous les crimes commis contre l'humanité dans l'histoire, qui d'une manière générale, a-t-il ajouté, sont répréhensibles et condamnables, il a habilement dénié la singularité de ce crime sur laquelle insistent beaucoup d'historiens, c'est-à-dire le massacre systématique et ciblé des Juifs par les nazis pour la seule raison qu'ils appartenaient à une « race ». Enfin, il a aussi déclaré que rien ne justifiait la création d'un Etat au détriment d'une autre population, reliant ainsi de façon implicite la création de l'Etat juif à l'Holocauste.

Il nous faut garder en mémoire les propos révoltants de Mahmoud Ahmadinejad sur l'Holocauste. Ne renvoyait-il pas lui aussi la détermination de l'ampleur de ce crime aux historiens et ne lui reconnaissait-il pas aucune singularité ? Ne reliait-il pas lui aussi la conception et la création de l'Etat juif à ce crime ? La question qui se pose maintenant est de savoir où se trouvent à ce propos les points de divergence entre les deux discours.

Plus de transparence sur le nucléaire ?

Sur le nucléaire, le contentieux le plus brûlant entre l'Occident et l'Iran, M. Rohani a certes promis plus de transparence. Mais sur le fond, il n'a fait aucune concession. Tout en réitérant la position officielle de l'Iran selon laquelle les armes nucléaires - tout comme d'autres armes de destruction massive - sont en contradiction avec les principes religieux et éthiques de la République islamique, il a réaffirmé le droit de son pays à la maîtrise de l'industrie nucléaire à des fins pacifiques.

Concernant ce contentieux, son discours reste parfaitement aligné sur la position officielle de la République islamique. D'ailleurs, tout le monde sait que le nucléaire est le domaine exclusif du Guide de la révolution, Ali Khamenei. Ce qui est intéressant à noter, c’est que juste avant son passage à l'ONU, M. Rohani a fait annoncer l'ouverture officielle de la centrale nucléaire civile de Bouchehr, en construction depuis plusieurs dizaines d'années. Peut-on considérer cet acte comme un signe fort de la détermination de son pays à aller jusqu'au bout de son chemin ? Chemin que contestent les Occidentaux ?

On sait que l'Iran est soupçonné par les pays occidentaux de s'acheminer vers l'acquisition de la bombe atomique sous couvert d'un programme nucléaire civil. Le discours du nouveau président iranien, malgré sa tonalité apaisante, montre que les autorités de Téhéran n'ont pas l'intention d'abandonner le développement de leur programme nucléaire. Elles essaient sans doute d'obtenir, à terme et par la voie diplomatique, la levée des sanctions internationales qui frappent durement l'économie du pays.

Comme il fallait s'y attendre, la rencontre prématurément annoncée entre le président américain et son homologue iranien n'a pas eu lieu. Il est vrai qu’ils se sont entretenus par téléphone, l’importance de ce fait étant diversement appréciée. Par contre, une entrevue entre François Hollande et Hassan Rohani à New York s'est déroulée en marge de l'Assemblée générale des Nations unies. On a entendu dire que Hollande voulait tester la sincérité du nouveau président iranien qui tient un discours conciliant.

Quoi qu'il en soit, cette rencontre peut être considérée comme le commencement de la voie du dialogue entre l'Iran et l'Occident. Elle sera bientôt suivie par une rencontre américano-iranienne. Mais peut-elle aboutir à des résultats tangibles tant que le dossier nucléaire iranien est sur la table et tracasse particulièrement Israël ? Tout en saluant le ton conciliant du président iranien, Barack Obama et François Hollande lui ont demandé des actes concrets et vérifiables.

La Syrie, reflet du conflit entre chiites et sunnites

Un autre problème qui préoccupe les dirigeants occidentaux, notamment les présidents français et américain, est le soutien politique et les aides militaires de la République islamique au régime de Bachar el-Assad. Tout le monde sait que l'Iran se bat contre les insurgés en Syrie avec ses pasdarans (les gardiens de la révolution) et le Hezbollah libanais aux côtés des forces militaires de Damas. François Hollande a demandé à son homologue iranien d'accepter une transition en Syrie avec la mise à l'écart de Bachar el-Assad. Mais il est difficile d'imaginer que l'Iran acquiesce à une telle solution.

La famille Assad appartient à la minorité alaouite, dont la doctrine est rattachée au chiisme et qui représente 10% de la population syrienne. Bien que la communauté dans son ensemble ne partage ni les privilèges du clan Assad ni ses convictions politiques, l'opposition du régime syrien ne compte pas beaucoup d'alaouites. Par peur de représailles ou d'exclusion qui ne datent pas d'hier, la communauté alaouite est plus que jamais soudée.

Le régime iranien est non seulement un allié politique mais aussi, en un sens, un coreligionnaire du régime de Bachar el-Assad dans la région. Région dont la complexité est inconcevable si l’on ferme les yeux sur cette guerre larvée que livre depuis la révolution islamique le chiisme, tous rites confondus, contre le sunnisme dans son ensemble. L'attitude de chacun des pays de la région, ainsi que celle des mouvements politico-religieux du Moyen-Orient vis-à-vis de la guerre civile en Syrie, s'expliquent également par cet affrontement idéologique.

Le nouveau président iranien plaide pour une solution politique de la crise syrienne et demande d'écarter l'option militaire pour épargner l'effusion de sang du peuple syrien. La question est de savoir si cette solution est possible sans la mise à l'écart de Bachar el-Assad. Au vu de toutes ces données, force est de constater que les points de divergence entre le discours du nouveau président iranien et celui de son prédécesseur sur les contentieux internationaux impliquant directement ou indirectement l'Iran sont minimes.

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