Cameroun: Maurice Kamto et 89 coaccusés devant la justice militaire
Le procès de Maurice Kamto, le leader du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), s’ouvre ce vendredi 6 septembre. Principal opposant de l'inamovible président Paul Biya, arrivé second à la dernière présidentielle, l'ancien ministre délégué de la Justice avait été arrêté lors des marches de contestations du régime organisées fin janvier.
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Le tribunal militaire de Yaoundé ne connaît pas de répit. Après le procès du leader sécessionniste Julius Sisiku Ayuk Tabe, condamné à la prison à vie, le 20 août dernier, c'est au tour de Maurice Kamto de faire face à cette même juridiction militaire avec 89 coaccusés. Parmi eux : Christian Penda Ekoka, ex-conseiller économique du président Paul Biya, Michelle Ndoki, avocate et cadre du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC). Ou encore, le célèbre rappeur Valséro, connu pour ses textes critiques à l'égard du régime.
Cette marche du 26 janvier, Michelle n'y était pas. (...) Elle n'a jamais appelé à l'insurrection, elle ne s'est jamais alliée à une puissance étrangère pour déstabiliser le Cameroun...
Me Felicité Zeifman, secrétaire générale du Réseau international des femmes avocates
Quasiment tous détenus à la prison principale de Yaoundé, ils comparaissent pour « insurrection », « rébellion », « hostilité envers la patrie », « attroupement à caractère politique », « détérioration et destruction de biens publics » et « outrage au chef de l'État ». Des motifs d'inculpation pour lesquels ils encourent de très lourdes peines.
Un procès « politique »
Il y a cinq mois, les avocats avaient contesté la compétence du tribunal militaire pour juger des civils, mais la cour d'appel a finalement tranché la semaine dernière, estimant la requête irrecevable. Les avocats – une cinquantaine se sont constitués – ont donc saisi la Cour de cassation.
En attendant, les inculpés s'estiment victimes d'un procès « politique ». Ils accusent les autorités de vouloir « décapiter » le MRC et toute forme d'opposition au Cameroun, quand Yaoundé jure qu'il s'agit d'une affaire de droit commun.
Le pouvoir explique que le MRC a choisi la provocation, la déstabilisation des institutions, l'insurrection et le chaos comme modes de combat politique, et que force restera à la loi.
Pour les avocats de la défense, ce procès n'est qu'« un simulacre ». « Les règles de procédures, les droits les plus essentiels des accusés sont bafoués », affirmait jeudi Me Emmanuel Simh qui promet que ce procès sera plutôt celui « du régime de M. Biya et de ses amis ».
Je l'ai vu, je lui ai parlé, il est sûr de son innocence. Il est combattif, il est prêt à défendre son honneur bafoué, à défendre sa liberté confisquée, il se battra jusqu'au bout.
Emmanuel Simh, un des avocats de la défense
De son côté, la communauté internationale exerce une forte pression. Plusieurs ONG – Human Rights Watch et Amnesty International entre autres – dénoncent un procès politique. Les grandes capitales occidentales sont sorties de leur traditionnelle réserve : les États-Unis ont déclaré qu'il serait « sage de libérer » l'opposant. L'Union européenne a évoqué une « procédure disproportionnée ». Jean-Yves Le Drian, le ministre français des Affaires étrangères, déclarait il y a quelques jours à la presse : « On connaît le parcours et les qualités de M. Kamto. Nous faisons fortement pression sur le président Biya pour qu’il puisse élargir ces prisonniers. »
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