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Nigeria

Elections au Nigeria: le report de dernière minute prend le pays par surprise

Au Nigeria, les scrutins législatifs et présidentiel, prévus ce samedi, ont été reportés d’une semaine. Une annonce inattendue survenue dans la nuit à la dernière minute en raison de questions logistiques. Initialement, 84 millions d’électeurs étaient appelés à voter et de nombreux électeurs ont tout de même fait le déplacement vers leurs bureaux de vote, qui devaient ouvrir à 8h.

A Yola, la porte de ce bureau de vote est restée fermée, ce 16 février 2019.
A Yola, la porte de ce bureau de vote est restée fermée, ce 16 février 2019. REUTERS/Nyancho NwaNri
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Le report de ces élections a pris tous les Nigérians par surprise. Plusieurs milliers d’entre eux se sont d’ailleurs déplacés dans leur Etat d’origine afin d'aller voter. Le président Muhammadu Buhari, par exemple, est normalement du côté de Katsina, dans l’Etat de Katsian à Daura, sa localité d’origine. Son principal rival Atiku Abubakar, lui, s’est rendu normalement dans l’Etat d’Anamawa.

Il est vrai que l’opposition, depuis plusieurs jours, disait qu’un certain nombre des bulletins de vote n’étaient pas imprimés. L’Inec aussi, à demi-mot, avait reconnu qu’il y avait des problèmes d’acheminement de son matériel électoral à cause aussi du réseau routier nigérian sachant que les élections se déroulent dans 36 Etats. Mais, si la rumeur avait enflé vendredi soir, personne n’imaginait une telle décision il y a encore 24 heures.

Surpris et résignés

A Obalende, un quartier de Lagos, les habitants sont partagés entre la surprise et la résignation. Ce samedi matin, le quartier s’anime tout doucement : les gens se regroupent perplexes autour d’un commerce : sur le mur, les listes d’électeurs sont affichées. Mais rien, pas d’agent électoral, pas d’urnes. Alors ici, forcément, on s’interroge.

Mohamed Sabo, un vieil homme d’au moins 70 ans, s’est pointé à 7 heures, devant son bureau de vote : un simple banc, à l’angle d’un commerce. Mais rien. Pas de matériel électoral, pas d’agent de la Commission électorale. « Je suis perturbé », affirme ce vieil homme qui, comme de nombreux autres électeurs rencontrés dans ce quartier, se résigne à attendre la semaine prochaine.

Les électeurs étaient sont donc sonnés, perdus et sceptiques. A l’image de cette dame, qui a dû parcourir des kilomètres pour arriver aux aurores devant son bureau de vote : « Ce matin, je n’étais pas au courant que le scrutin a été reporté. J’ai appris la nouvelle sur le chemin pour me rendre au bureau de vote. Je suis surprise. J’étais pourtant prête à voter. Et j’ai dû venir de loin pour voter : j’habite une autre ville et il m’a fallu prendre les transports très tôt pour voter à Obalende. »

Même scepticisme exprimé par cet autre électeur rencontré dans un quartier populaire de Lagos : « Hier, j’ai commencé à avoir des doutes sur la tenue du scrutin. Parce qu’hier, je me suis rendu au bureau de gouvernement local d’Obalende, et je n’ai vu aucun préparatif. Finalement, au réveil, j’ai appris que les élections étaient reportées. J’étais surpris. Il faut prier fort pour ce pays, car franchement, je ne vois pas dans quelle direction on va. »

Beaucoup d'interrogations

A Falamo, autre quartier populaire de Lagos, on sent une certaine colère. « C’est toujours comme ça, nos autorités sont désorganisées », lâche Johnson, un jeune visiblement découragé. Il est resté connecté toute la nuit sur les réseaux sociaux. « On s’attendait à ce report : c’est une habitude au Nigeria. Pour moi, il est clair que la Commission électorale n’était pas prête : il y avait déjà des rumeurs à ce sujet qui circulaient la semaine dernière, selon lesquelles les bulletins n’avaient même pas été imprimés. » Seul indice de la tenue d’une élection : des listes d’électeurs affichées sur les murs des commerces.

Dans ce quartier, quasiment aucun commerce n’a ouvert. Les habitants songent déjà aux pertes causées par cette journée de scrutin annulée. Plusieurs questions commencent à se poser : quelle sera la réaction des Nigérians suite à cette annonce et quel impact cette décision le report aura sur les acteurs politiques dans un contexte où la violence et la mort sont très présents ? Dernier exemple en date, ce vendredi, les corps de 66 personnes tuées lors d’une attaque ont été découverts ans l’Etat de Kaduna, dans le nord-ouest du pays.

« C’est un fiasco »

Autre réaction, celle des organisations de la société civile abasourdies par ce report. Pour Yémi Adamolekun, membre du collectif Enough is Enough, c’est clairement un échec : « L’Inec aurait dû avoir une date butoir lui permettant de pouvoir dire "nous sommes prêts, nous ne sommes pas prêts". C'est juste impensable d'annuler cinq heures avant des élections et c'est pourquoi il y a beaucoup de déception. Parce que constamment la Commission nous a assurés qu'ils étaient prêts. Donc, tout le monde est surpris, même les formations politiques sont surprises. Nous demandons qu'il y ait quelqu'un de responsable, que quelqu'un assume ce problème. Pour l'élection reportée, nous exigeons un plan clair, afin que nous sachions exactement ce que la Commission électorale envisage pour faire en sorte que la date de samedi prochain ne change pas. Le Nigeria est soi-disant le géant de l'Afrique. Cette élection concerne 84 millions d'électeurs. Un groupe d'observateurs de la Cédéao, un groupe d'observateurs de l'Union africaine et aussi de l'Union européenne, des observateurs du monde entier ont fait le déplacement et cinq heures avant, vous annulez une élection ? C'est un fiasco. »

Autre réaction, celle de Clément Nwankwo. Cet activiste des droits de l’homme déplore le manque de transparence de l’Inec qui aurait assuré le respect du calendrier jusqu’à ce vendredi en fin d’après-midi. Clément Nwankwo exige aussi des garanties sur la tenue du scrutin la semaine prochaine, il demande aussi des assurances sur le matériel électoral.

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