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Ouganda

Ouganda: meurtre d'un policier réputé pour ses propos anticorruption

En Ouganda, un policier qui avait dénoncé la corruption parmi ses collègues a été abattu, samedi 8 septembre, devant chez lui, dans la banlieue de Kampala. Muhammad Kirumira se disait menacé de mort.

Des policiers ougandais montant la garde. (Photo d'illustration)
Des policiers ougandais montant la garde. (Photo d'illustration) Isaac Kasamani / AFP
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Il y a quelques mois, Muhammad Kirumira avait accusé ses collègues de corruption et leur avait reproché, publiquement, de travailler avec des groupes criminels. Juste après ces déclarations sur Facebook, en janvier, le policier avait été suspendu de ses fonctions.

On lui reprochait alors d'être, lui aussi, impliqué dans des actes de corruption et même de torture. Des accusations pour lesquelles il n'a pas été jugé et que certains défenseurs des droits de l'homme ont du mal à prendre au sérieux.

Il avait ensuite été arrêté au cours d'une véritable opération de force. Des policiers lourdement armés avaient fait irruption chez lui. L’opération avait duré plusieurs heures en raison de la forte résistance de Muhammad Kirumira.

Depuis, le policier a donc alerté à plusieurs reprises les médias mais aussi d'autres officiers sur les menaces dont il était l'objet. Cela n'aura pas suffi. Muhammad Kirumira a été assassiné devant chez lui, samedi soir, par des hommes circulant à moto.

Ce dimanche matin, lors d’une conférence de presse, la police a salué son excellent travail. Le président ougandais, lui, ne s'est pas prononcé sur le travail de Muhammad Kirumira mais a présenté ses condoléances, après s'être rendu sur les lieux du crime, samedi soir.

Prises de position

« C'était une personnalité controversée, mais il avait ouvertement pris position contre les responsables de la police », rappelle la directrice associée du département Afrique de Human Rights Watch. Maria Brunett explique qu' « avant son départ, Muhammad Kirumira avait fortement critiqué les méthodes de la police, affirmé que certains policiers étaient complices de corruption et que de nombreuses actions de police avaient en fait des motivations politiques. Il avait fait arrêter un certain nombre de ses collègues qui méritaient selon lui d'être traduits en justice. »

La responsable de HRW rappelle que le policier avait également pris position pour défendre la presse. « Muhammad Kirumira a ouvertement défendu les médias lorsqu'il avait l'impression que le gouvernement cherchait à éloigner les regards de certaines salles d'audience. Donc il bénéficiait d'un soutien très large de la part de nombreux Ougandais. »

Changements

Maria Brunett souligne « qu'il y a eu d'importants changements au sein des forces de police cette année ». Elle pointe notamment le limogeage du général qui dirigeait l'institution depuis des années et qui fait aujourd’hui l'objet de poursuites.

Ces derniers mois et ces dernières années, plusieurs responsables de la police ou personnalités publiques ont été assassinés et les affaires n'ont jamais été élucidées. La police fait l'objet de très nombreuses critiques.

Depuis, la réthorique a changé, les forces de l'ordre se sont engagées à mettre fin à la torture, mais comme le souligne une ONG américaine, il reste beaucoup à faire pour que la police soit véritablement au service des citoyens en Ouganda.

Climat de peur

Le porte-parole de la police a en tout cas assuré que tous les moyens étaient mis en œuvre pour retrouver les responsables, mais certains expriment déjà des doutes. Le décès de Muhammad Kirumira fait suite à plusieurs assassinats contre des responsables policiers ou personnalités politiques qui n'ont jamais été élucidés.

Des événements qui créent un climat de peur dans le pays, comme en témoigne l'auteur ougandais Sam J. Ssemaganda :

« L'atmosphère est très lourde lorsque vous vous promenez dans les rues de Kampala aujourd'hui, raporte-t-il. Les conversations en arrivent toujours aux mêmes questions : qui a pu faire ça ? Et qui seront les prochains ? Tout ceci a été bien planifié, bien exécuté, par un groupe bien financé et bien entraîné. Ces meurtres, souligne-t-il, on a du mal à croire qu'il s'agit de la vraie vie, que c'est la réalité. On est tenté de vouloir rouvrir les yeux pour vérifier si l'on n'est pas dans un cauchemar ou dans un film. »

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