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Tunisie / Terrorisme

Tunisie: le président Beji Caïd Essebsi décrète l’état d’urgence

La Tunisie a décrété ce samedi l'état d'urgence pour trente jours renouvelables. Cette décision de Beji Caid Essebsi accorde des pouvoirs d'exception à la police et l'armée. Le président s’en est expliqué dans une adresse à la nation.

Des policiers patrouillent à proximité de l'hôtel Imperial Marhaba à Sousse, victime d'une attaque le 26 juin dernier.
Des policiers patrouillent à proximité de l'hôtel Imperial Marhaba à Sousse, victime d'une attaque le 26 juin dernier. REUTERS/Zohra Bensemra
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« Nous sommes en état de guerre, a déclaré Beji Caïd Essebsi. Les circonstances exceptionnelles justifient des mesures exceptionnelles ». Dans son adresse à la nation qui aura duré une vingtaine de minutes, le président tunisien a reconnu que son pays n'avait pas la culture de la lutte contre le terrorisme et manquait de moyens humains et matériels pour contrer le fléau. BCE a aussi évoqué la menace posée par l'extrême instabilité en Libye, où s'entraînent des jihadistes avant de traverser les frontières poreuses pour commettre leur forfait en Tunisie.

L'état d'urgence devrait être décrété sur l'ensemble du territoire pour trente jours renouvelables. Concrètement, la mesure renforce les pouvoirs de l'armée et des forces de sécurité. Elle attribue aux autorités le droit de restreindre des libertés chères à la société civile tunisienne, comme le droit d'organiser des rassemblements et des mouvements de grève. La mesure peut aussi s'accompagner d'un contrôle accru des médias.

L'annonce de cet état d'urgence intervient 24 heures après l'aveu du Premier ministre Habib Essid qui, dans un entretien accordé à la BBC, a reconnu que la police avait été trop lente à intervenir et à mettre fin à la tuerie du 26 juin dans la station balnéaire de Sousse. La presse britannique a été très critique sur la réaction des forces de sécurité face à l’attaque qui a fait 38 morts, dont 30 ressortissants britanniques. Sousse avait déjà été la cible d'une attaque suicide en octobre 2013. Une attaque certes ratée, mais qui n'avait été suivie d'aucune disposition sécuritaire particulière.

Suite à cette attaque, trois plusieurs responsables politiques tunisiens, dont le gouverneur de Sousse, ont été limogés, a annoncé ce samedi un conseiller du Premier ministre. Trois directeurs de la sûreté avaient été démis de leur fonction plus tôt dans la semaine.

Prudence et méfiance

Parmi les observateurs des questions militaires, Moctar Ben Nasser, officier à la retraite, rappelle que la précédente période d’état d’urgence qui s’étalait de la chute de Ben Ali à mars 2014 n’a pas porté ses fruits et qu’elle n’a pas empêché les terroristes de s’installer en Tunisie. Il pointe également l’important coût financier d’une mobilisation supplémentaire de militaires, alors que le pays est déjà dans le rouge.

Les professionnels du tourisme ne se font d’ailleurs guère d’illusion sur une reprise de leur activité. Radhouane Ben Salah, le président de la fédération de l’hôtellerie accueille la mesure positivement, mais ne pense pas que ce renforcement sécuritaire va faire revenir les touristes cet été.

De son côté, Hamma Hammami, porte-parole du Front populaire tunisien, joint par RFI, ce dimanche 5 juillet, déclare ne pas comprendre cette décision du président tunisien de décréter l’état d’urgence et s’est même dit inquiet de cette annonce.

« Le discours que j’ai entendu, hier, est un discours confus. Il n’est pas du tout convainquant. On ne voit pas pourquoi l’état d’urgence est nécessaire. La question principale qui s’est posée et qui se pose encore, c’est la réorganisation de l’appareil sécuritaire et lui procurer les moyens nécessaires, mais pas l’état d’urgence », a-t-il estimé avant d’ajouter qu’il y a, aussi, dans ce discours, de l’amalgame.

« Il y a aussi de l’amalgame dans ce discours entre luttes sociales et liberté de presse, d’une part et terrorisme, d’autre part. Il y a de véritables craintes que la déclaration de l’état d’urgence touche les libertés, surtout la liberté d’expression et la liberté de presse et touche aussi les luttes sociales », a tenu à souligner Hamma Hammami.

Le président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme craint, quant à lui, que l’état d’urgence porte atteinte aux droits fondamentaux. Pour lui, la mesure est nécessaire, mais elle ne doit pas durer trop longtemps. Le dispositif permet aux autorités d’interdire les grèves, et Beji Caïd Essebsi a déjà accusé les multiples mouvements sociaux actuels d’empêcher les forces de l’ordre de se concentrer sur la lutte contre le terrorisme.

La vraie lutte contre le terrorisme, c'est créer un Etat de vraie démocratie, où il n'y aurait pas de corruption, pas de malversations, pas de contrebande. Et prendre des mesures sociales aussi, parce que se faire exploser ce n'est pas un réel choix, c'est l'expression d'un désespoir.

01:02

Saïda Rached

Nicolas Champeaux

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