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France / Algérie

Tibéhirine: le mécontentement des familles des victimes

En France, les familles des moines de Tibéhirine, assassinés en Algérie en 1996, font part de leur mécontentement. L'Algérie refuse de laisser ramener en France des prélèvements réalisés sur les crânes des religieux. Lors d’une conférence de presse donnée jeudi 23 octobre, leur avocat, Me Patrick Baudouin, a dénoncé la confiscation des preuves alors que les juges antiterroristes français, Nathalie Poux et Marc Trévidic, rentrent tout juste d’un déplacement en Algérie.

Les sept moines trappistes du monastère de Tibéhirine dans l'Atlas algérien, fermé depuis leur massacre en mai 1996.
Les sept moines trappistes du monastère de Tibéhirine dans l'Atlas algérien, fermé depuis leur massacre en mai 1996. (Photo : AFP)
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Ces preuves, dont les familles estiment qu’elles font l’objet d’une confiscation, avaient été compliquées à obtenir. En effet, en 2011, le juge antiterroriste français Marc Trévidic avait délivré une commission rogatoire internationale. Il n'a pu se rendre en Algérie qu'il y a deux semaines seulement pour exhumer les crânes des moines et pratiquer, avec des experts français et algériens, la première autopsie. Ces crânes étant la seule partie de leur dépouille retrouvée. Ces prélèvements devaient permettre tout d'abord l'identification ADN des crânes et déterminer si la décapitation a provoqué la mort des moines ou si elle est intervenue après leur décès.

Il a donc fallu un bras de fer de trois ans pour que ces examens médicaux légaux puissent être faits, mais la déception des familles aujourd’hui tient au fait que le juge Trévidic n’a pas pu repartir avec les prélèvements. Les autorités algériennes ont refusé qu'il les rapporte à Paris. « Notre colère est d’autant plus grande que c’est sans doute l’autopsie qui permettrait de faire le pas le plus important depuis le début de l’ouverture de l’information », assure Me Baudoin, l'avocat des familles.

Une attitude incompréhensible

Une attitude incompréhensible pour les parties civiles, car ces prélèvements ont été faits en double, de sorte que chaque pays puisse en avoir un lot pour mener ses propres investigations. « Il ne s’agissait pas d’empêcher les autorités algériennes d’enquêter de leur côté », fait remarquer Me Patrick Baudouin.

Une attitude incompréhensible aussi sur le plan juridique : d’après l’avocat des familles, le juge d’instruction algérien a invoqué le Code de procédure pénal de son pays pour justifier ce refus, mais il n’a pas pu montrer l’article en question. « Or, souligne Me Baudouin, il existe un accord de coopération judiciaire entre la France et l’Algérie, qui devrait obliger l’Algérie à ce transfert de preuves. »

Pour les familles de victimes, ce refus des autorités algériennes interroge sur leur rôle dans la mort de leurs proches. Et elles s'inquiètent de voir ces nouveaux éléments, attendus depuis longtemps, disparaître. D'autant que s'ils ne sont pas conservés dans des conditions très strictes, ils ne pourront rapidement plus être analysés.

Une décapitation post-mortem ?

L'information judiciaire ouverte il y a onze ans n'a donc toujours pas répondu à des questions essentielles sur les conditions de la mort des moines. Or, après cette visite, la justice française n'a qu'une partie des éléments pour y répondre. « Les experts ont quand même pu revenir avec des photos, des radiographies qui ont été effectuées. Ils ont également pris toute une série de notes sur la base de leurs contestations puisqu’ils ont, pendant les trois jours où l’exhumation a eu lieu, pu faire beaucoup de constatations », rapporte Me Baudoin.

Les experts penchent ainsi pour une décapitation post-mortem (après le décès des moines). S'ils n'ont pas vu de trace de balle dans les crânes, ils confirment aussi le doute qui existait sur la date de la mort - peut-être antérieure à celle revendiquée. Et ils s'interrogent aussi sur l'identité de deux crânes : sont-ils ceux de moines ? Des questions qui ne peuvent trouver de réponses sans analyses plus poussées. Les familles des moines en appellent désormais au président français François Hollande, lui demandant de faire pression sur les autorités algériennes pour obtenir ce transfert de scellés.

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